PAR PÉRONCEL-HUGOZ
Jean de La Varende disait : « Napoléon III est le dernier roi de France ». Charles de Gaulle, lui, estimait qu’en cas de restauration il faudrait se tourner vers les Capétiens et non pas vers les Napoléonides dont les règnes se sont terminés en catastrophe de grande ampleur, à Waterloo et à Sedan , deux boulets historiques plombant à jamais le régime impérial français.
Cependant le fils d’Hortense de Beauharnais et de Louis Bonaparte, éphémère roi de Hollande, eut quelques bonnes idées, dont celle du « Royaume arabe » à instaurer en Algérie et inspirée à l’empereur par le penseur métis guyanais converti à l’islam, Ismaël Urban.
L’Algérie aurait eu un vice-roi pris par exemple dans une lignée chérifienne – les chérifs sont au Maghreb les descendants de Mahomet, ce qui était le cas de l’émir Abdelkader, adversaire puis ami de la France.
Napoléon III selon ses propres dires aurait été alors « empereur des Français et roi des Arabes ».
UNE REPUBLIQUE VINDICATIVE
Sedan empêchera ce grand projet , à peine ébauché, à la fin du Second Empire (égalité juridique proclamée de tous les Algériens, colons européens et israélites indigènes compris) ; la République, vindicative, et malgré sa devise trinitaire , fit exprès tout le contraire de ce que prévoyait Napoléon III, établit une Algérie juridiquement inégalitaire avec deux collèges électoraux : pour entrer dans le premier collège , celui des Européens, les musulmans devaient renoncer non pas à leur religion mais à leur statut personnel (polygamie, répudiation, héritage inégal, pas d’adoption, etc. ) ce que très peu de mahométans osèrent faire, comme le pharmacien de Sétif, Ferhat Abbas, marié à une chrétienne.
Le « Royaume arabe » d’Algérie fut donc moqué, calomnié, oublié. C’était pourtant un avant-goût du « protectorat », système appliqué par la France avec un certain succès en Tunisie , en Annam, au Tonkin, au Laos, au Cambodge, en attendant la réussite incontestable du Maroc.
Si l’idée du troisième Napoléonide avait été réalisée en Algérie, ce pays à présent en déshérence anarchique et islamoïde, aurait peut-être eu le déstin enviable du Maroc, pays bien dans sa peau et gouverné par des chérifs « démocrates » puisqu’ils ont accepté de déléguer un certain nombre de leurs pouvoirs à un gouvernement que dirige un islamiste proche des Frères musulmans , lesquels en cette contrée, sont en général plus patriotes marocains qu’internationalistes islamo-arabes. ■
« Napoléon III le magazine du Second Empire »
Dirigé par Christian Castellani, a publié cette année un hors-série, « l’Algérie sous le Second Empire » dirigé par une mahométane non idéologique Fathia Aïssiou, et remarquablement illustré de plus de 200 images, photos et documents.
(15 €, à commander à SOTECA, Hors-Série Algérie. 60643 Chantilly cedex.)
Merci de ce « retour » qui suscite une certaine nostalgie ou mélancolie, selon Zemour. Que d’occasions ratées à cause de nos instabilités institutionnelles et politiques. Le barbichu avait donc peut-être vu ce qu’il fallait faire en Algérie. La suite a tout gâché !
C’est bien intéressant, en effet ! La somme des occasions gâchées en Algérie (en supposant qu’on en approuve la colonisation) est effectivement abyssale.
Bien sûr on ne retient de Napoléon III que Sedan (et l’expédition au Mexique) ; mais il ne serait pas mauvais quelquefois de relever les réussites du régime. Ce n’est pas parce que Zola (dont je suis fort amateur, au demeurant) en a fait le procès sans nuances qu’il faut tout vilipender. Philippe Séguin a d’ailleurs écrit un intéressant « Napoléon III le Grand ».