Vous aurez tous noté – et même subi – le discours désespérément monocorde des médias. Les têtes changent et les styles, les tons, les voix, et même les financiers propriétaires de chaîne ou de presse, qui seraient au nombre de neuf, mais au-delà de ces différences de surface, on habite en toute hypothèse l’oppressant empire du même.
Y a-t-il un chef d’orchestre clandestin, un grand ordonnateur secret ? Non, sans-doute. Le conformisme, l’autocensure, la force auto-organisatrice des coteries du microcosme, leurs palabres et leurs salons, leurs loges, leurs clubs ou leurs think-tanks et leurs grandes écoles qui les préfigurent, suffisent à imposer à tous un système collectif unique d’opinions politiques et sociétales. Système clos, diffus, intouchable, inentamable, irréformable, et répétible à l’infini.
De cette uniformité totalisante d’où finit par naître l’ennui, la défiance et finalement le mépris du citoyen ordinaire, se dégagent des réflexes pavloviens qui pourraient porter à rire s’ils n’étaient liberticides. De la liberté de penser avec bon sens…
Exemple, le traitement parfaitement discriminatoire réservé aux chefs d’État ou de gouvernement étrangers. Du moins une poignée d’entre eux. Car il faut se focaliser pour être efficaces. Et là, il ne faut pas hésiter à mettre la dose. Il faut des têtes-de-Turc. Au sens figuré et non au sens propre. Erdogan est relativement épargné. Il n’a pas le premier rôle. Il pourrait l’avoir mais ne l’a pas. Les têtes-de-Turc prééminentes du moment ne sont natives ni du Bosphore, ni de l’Anatolie profonde. Qui sont-elles ?
ncontestablement, Donald Trump a longtemps tenu la vedette mais son obstination à occuper la Maison Banche, la perspective assez plausible de sa réélection, l’effacent un peu du premier rang des premiers rôles. Mais il y en a, avons-nous dit, une poignée d’autres : Orban, Bolsonaro, le nouveau venu, Poutine, bien-sûr, le vétéran, malgré Versailles et Brégançon, Matteo Salvini, le perdant et … Boris Johnson, l’ex-maire de Londres, le bouillonnant biographe de Churchill (bouillonnant lui aussi) et accessoirement Premier ministre de Grande-Bretagne. Son blasphème permanent envers la technocratie européenne, son nationalisme anglais atavique comme l’était celui de son modèle Churchill, le vouent à la vindicte universelle, en tout cas médiatique. Et la liturgie anathématisante doit être permanente, sans répit, sans merci.
Avez-vous compté le nombre de fois où, de France-Inter à BFM, de la 5 à LCI, les journaux d’information ont ouvert par la même formule, exactement répétée d’un bout à l’autre du PAF: « nouveau revers pour Boris Johnson » ? On pourrait en dresser la liste fastidieuse, innombrable, ridicule. Par le nombre et le caractère strictement répétitif, honteusement marqué de psittacisme et de dépit. Car Londres a défié Bruxelles … Elle en a défié d’autrement puissants !
A noter que Xi Jinping, le tyran qui gouverne d’une main de fer le peuple le plus nombreux et le plus encadré de la planète, est, la plupart du temps, épargné. Business oblige !
En d’autres temps moins hypocrites, sous Staline ou Goebbels, on appelait cela : la propagande.
Il y eut un temps à Paris sous l’Occupation ce qui s’est appelé Propagandastaffel. Son siège était à l’hôtel Majestic, sur les Champs-Elysées …. Dans le Paris de l’époque moderne, les choses et les lieux n’ont pas tellement changé. Ils se sont faits plus diffus et plus subtils pour susciter moins de rejet. ■