Journal du Maroc et d’ailleurs. Extraits.
Par Péroncel-Hugoz.
Casablanca, 5 juin 2012
Visite au fameux collectionneur indigène casablancais, Si Mohamed Tangi, qui conserve dans son vaste appartement moderne, près de l’ex-église du Sacré -Cœur, livres, affiches, photos, plans, journaux, cartes postales, cendriers, porte-clés, bibelots etc etc consacrés à Casablanca, de la naissance de cette ville, il y a 100 ans à aujourd’hui.
Je rappelle à mon hôte cette phrase amère de l’essayiste judéo-français Emmanuel Berl (Photo), un temps conseiller du Maréchal Pétain à Vichy : « Les Romains étaient fiers d’avoir détruit Carthage, les Français ont honte d’avoir fondé Casablanca… ». Tangi rit.
Ce jour, justement, nous parlons de Marcellin Flandrin (1889-1957), le « Nadar de Chérifie », né à Bône, mort à Casa où il vécut et travailla environ un demi-siècle. Je prépare un texte sur lui pour un gros album de ses clichés sur les Marocains (Photo) à paraitre ici cette année Inchallah. (Note de 2019 : il parut en effet, sous le titre Un demi-siècle de photographie au Maroc par Flandrin 1907-1957). Editions de la Fondation Banque Populaire, Casablanca, 2012)
En regardant les photos aériennes de Casa, domaine où Flandrin fut pionnier, avec l’aide de l’aviation militaire française, éclate à nos yeux le prodigieux, le rapidissime, l’époustouflant essor de ce port entre 1915 et 1935 ; nous survolons en imagination imagée la malheureuse Medina ancienne ou plutôt Vieille Medina (dite à tort de nos jours « Ancienne Medina » car elle est toujours Medina même si les Français du Protectorat ont construit près du palais royal de Casa (autre idée française) une « Nouvelle Medina », toujours superbe et entretenue, but touristique très connu, contrairement à la Vieille Médina, délabrée et délaissée (Photo). Nous en venons donc, avec Tangi à parler du récent écroulement d’immeubles dans ladite Medina. Mon hôte a eu le privilège de guider Sa Majesté chérifienne durant une heure, à travers ce quartier historique et populaire en lambeaux – mais en cours de réparation depuis peu. Tangi me dit : « Une fois de plus, le roi a donné des ordres de relogement des sinistrés, ordres qui, derechef ne sont pas exécutés, par les fonctionnaires. »
Et on nous parle « d’absolutisme royal », voire de « tyrannie » du Palais ! Plût au Ciel qu’il en soit ainsi parfois, car, alors les ordres royaux seraient enfin exécutés… ». Régulièrement les journaux marocains titrent « Colère royale » après telle visite du monarque sur un chantier qu’il avait déjà visité, et où revenant, il découvre que ses ordres sont restés lettre morte …(Fin. La semaine prochaine : Var 2012) ■
Notre confrère Péroncel-Hugoz, longtemps correspondant du Monde dans l’aire arabe, a publié plusieurs essais sur l’Islam ; il a travaillé depuis 2005 pour l’édition et la presse francophones au Royaume chérifien. Il tient aussi son Journal du Maroc et ailleurs, dont la Nouvelle Revue Universelle a déjà donné des extraits. Nous en faisons autant, depuis janvier 2016, en publiant chaque semaine, généralement le jeudi, des passages inédits de ce Journal. JSF
Retrouvez l’ensemble des textes parus depuis le 14 janvier 2016 : Journal du Maroc et ailleurs.