Toute la France officielle ou officieuse bruisse et s’émeut, dans des heures des plus délétères, de deux affaires parallèles à scandale, ou présumé scandale, dont l’une relève de « l’ancien monde » (avant Macron) et l’autre du « nouveau monde » (depuis Macron) puisque le langage mis en vigueur par la gent communicante attribue à l’actuel Chef de l’État, la qualité en principe exceptionnelle de fondateur d’une ère nouvelle. Et la chose incline à sourire pour qui observe les réalités.
Patrick Balkany a dormi hier et avant-hier en prison où il semble assez probable qu’il ne restera pas une éternité. Son avocat a, comme on dit, interjeté appel et son âge (plus de 70 ans) devrait conduire à un aménagement de peine assez rapide. Si tout va bien, Patrick Balkany finira porteur d’un bracelet électronique et voilà tout. Il ne sera pas le seul du genre parmi les politiques. Il y a bien eu des députés-ées qui siégeaient à l’Assemblée porteurs du leur.
Après tout, le bracelet électronique ce n’est tout de même pas Auschwitz … C’est peut-être ce que se sera dit Balkany pour se consoler, songeant au destin autrement malheureux de ses parents enfermés jadis dans ce camp archétype de tous les autres. Il les évoque souvent ces parents juifs, venus de Hongrie et plus anciennement d’on ne sait où, qui lui ont légué sans trop qu’il le sache, sans même qu’il en ait été tout à fait conscient, cette fortune – anonyme et vagabonde – qui lui cause aujourd’hui et même depuis un temps certain, tant de soucis et tant de dérangement.
Balkany est l’un de ces hommes venus de nulle part et même du fond des âges orientaux, qui a peut-être fini par aimer la France. Mais à sa façon, qui ne connaît guère de règles qui pourraient s’imposer à lui, notamment en matière d’argent. L’argent n’a pas d’odeur ni de territoire. L’éthique financière, encore moins fiscale, leurs contraintes pratiques, ce n’est pas sa culture, sa tradition, ni ce qui peut troubler sa conscience ou la sérénité de son sommeil. Alors, comme il reste maire de Levallois-Perret, qu’il y a en quelque façon ses habitudes, que l’appel interjeté par maître Dupont~Moretti est suspensif de son inéligibilité, et que les élections municipales ne sont pas si loin comme chacun sait – lui surtout – il va passer à autre chose : présenter sa candidature et préparer sa campagne. Un second procès est bien prévu en décembre. Mais Balkany est optimiste. On s’arrangera. Alors fallait-il le jeter en prison ou non ? C’est ce dont on parle beaucoup … Stricto sensu, c’est oui. Mais n’est-ce pas trop tard tout simplement et ridiculement trop tard ? L’affaire traîne depuis si longtemps … Et le remord secret – ou la crainte – des Balkany les ont conduits à dispenser autour d’eux cette forme de générosité locale compensatrice qui, dans leur esprit, les absolvait de leurs fautes. Générosité au profit de leur clientèle, naturellement, mais cette dernière est nombreuse, fidèle, et Levallois -Perret pleure déjà son maire embastillé. Au fond, l’excuse véritable que Balkany se trouve, et ce n’est pas si faux ce sont ses origines aventureuses, sa filiation. De nombreuses voix s’élèvent en défense de Balkany.
La seconde affaire qui trouble et occupe le microcosme du Système relève quant à elle du nouveau monde. Elle n’implique pas un homme du niveau des Balkany du point de vue mondain ou politique. Mais le hasard des affectations plus qu’autre chose a voulu que l’homme en question soit président de l’Assemblée Nationale et quatrième personnage de ce qu’il reste d’État. Richard Ferrand n’était rien aux temps de la splendeur des Balkany. Eux fréquentaient l’Élysée ou Matignon, le couple Chirac et plus tard le couple Sarkozy, les ministres et les grands du spectacle, des arts, du patronat, de la banque ou de la finance, quand Richard Ferrand s’occupait des Mutuelles de Bretagne, était Conseiller général du Finistère ou Conseiller régional de Bretagne. Il fréquentait les mutuelles, les préfectures et les conseils de région. Il n’était pas du même monde que les Balkany. Il militait au parti socialiste… Une astucieuse concomitance entre la restauration d’un immeuble propriété de son épouse et un bail consenti par cette dernière aux Mutuelles de Bretagne que présidait Ferrand, ce n’était pas un crime, seulement un enrichissement de sa compagne ; ça n’était pas très grave, ça ne défraierait pas la chronique, ça ne titillerait pas l’appétit des juges, tant qu’on n’est pas grand-chose. Mais voilà que son engagement dans la campagne électorale de Macron et l’élection de ce dernier, ont changé la donne et que, accroché comme lierre aux basques du jeune stratège, il a été en quelques mois, ministre, chef de parti et hic et nunc, président de l’Assemblée nationale. Le voilà mis en examen. Ancien monde, nouveau monde ? Après l’affaire Benalla, le défilé des ministres démissionnaires, de François Bayrou et Marielle de Sarnez, à Nicolas Hulot ou Gérard Colomb, l’affaire de Rugy et l’affaire Ferrand, la distinction entre les dits deux mondes n’est rien d’autre que dérision.
Il fut un temps où une affaire Balkany ou Ferrand eût embrasé Paris. Les Français avaient encore des illusions, des envies de lutte et de combats. Aujourd’hui, ils observent immobiles, désenchantés et méprisants le spectacle « démocratique ». La démocratie française n’oppose même plus, elle pourrit tout. JSF lafautearousseau ■
Parfait. On ne peut être plus clair.
L’ancienneté des faits pour lesquels Patrick et Isabelle Balkany sont condamnés n’est pas une circonstance atténuante oubliée par leurs juges dès lors que le couple a pendant de nombreuses années joué au chat et à la souris avec la Justice par tous moyens et subterfuges, depuis que l’affaire Schuller a déclenché les hostilités.
Les Balkany sont des gens très sympathiques – ça aide en politique locale – mais aussi de grands débiteurs de la morale sociale.
Quant à Me DupontMoretti il a planté son procès en plaidant l’émotion devant le jury d’Assises, alors qu’il n’y avait aucun juré présent et que les juges sont étanches à l’émotion. A quoi mon spécialiste maison me répond que l’affaire lui a peut-être semblé pliée dès le début et qu’il a joué les effets de manche pour remplir le contrat avec son client.
Pour Ferrand, pas d’avis discordant, c’est limpide, il a fait payer l’acquisition du bâtiment de sa copine par les Mutuelles de Bretagne mais pas directement bien sûr. Quoique !
Vox populi, Vox Dei…..aux municipales pour notre facétieux taulard qui a de quoi cantiner de façon souterraine; de Rugy veille aux grands crus transmis comme on peut aisément l’imaginer.
En tout cas, lui au moins était efficace et apprécié ce qui n’est pas le cas du Ferrand pas Maréchal.