PAR RÉMI HUGUES.
Un spectre hante lʼEurope, nous avertit lʼéconomiste Daniel Cohen[1]. Ce spectre, cʼest la récession… qui devrait concerner lʼAllemagne, le Royaume-Uni et lʼItalie. La hausse du prix du baril de pétrole entraînée par lʼattaque des champs pétroliers dʼArabie Saoudite et là pour renforcer ce constat pessimiste, si ce nʼest alarmiste.
La France, avec une prévision de croissance de 1,3 % pourrait y échapper, mais au prix dʼun nouvel emprunt considérable, alourdissant notre vertigineuse dette publique.
Macron peut remercier ses compatriotes Gilets jaunes qui lʼont forcé à mener une relance par la demande avec lʼaugmentation de la prime dʼactivité annoncée en décembre 2018, quand le pays, à feu et à sang, lui avait, pour parler trivialement, foutu la peur de sa vie. « Dʼune certaine manière, la crise des Gilets jaunes a été une bonne chose », vient-il dʼailleur de déclarer.
Le président de la République peut également remercier Mario Draghi, dont la mandat de chef de la B.C.E. sʼachève par cette situation aberrante que sont les taux dʼintérêt négatifs.
On est arrivé à cette réalité inouïe, conséquence des choix de lʼinstitution de Francfort décidés afin dʼéviter une déflation généralisée dans la zone euro après la crise de lʼeuro de 2010, faisant suite à celle de 2007-2008 (dite des subprimes), en rendant quasiment nul le taux de refinancement des banques auprès de la B.C.E., et en « taxant » les liquidités quʼelle déposent dans ses caisses.
« Super Mario » a lʼair satisfait de son coup si disruptif quʼil est prohibé par lʼarticle 1902 du code civil, lequel stipule en substance quʼun prêt ne peut quʼêtre à taux dʼintérêt supérieur ou égal à zéro. Christine Lagarde a été choisie pour le suppléer pour la législature européenne 2019-2024. Pendant quʼelle sʼinstalle dans sa nouvelle fonction, une rumeur court : son arrivée à Francfort pourrait coïncider avec la tout aussi disruptive politique de « monnaie hélicoptère ». Cʼest notamment lʼidée que lui soufflerait Stanley Fischer, ex-n° 2 de la Réserve fédérale, empruntant à lʼéconomiste de renom Milton Friedman la métaphore de lʼhélicoptère.
Daniel Cohen en définit le principe de la manière suivante : « à la fin de chaque année, la Banque centrale offre à chacun un chèque de 1 000 euros. » Ainsi peut-être que pour Noël 2019 les enfants entendront dire que le Père Noël a changé de sexe – ce qui est à la mode ! –, quʼil a quitté la Laponie pour lʼAllemagne et quʼil a troqué son traineau et ses cerfs contre un joli hélicoptère… ■
[1]« Oser la ʽʽmonnaie hélicoptèreʼʼ », LʼObs, n° 2862, 12 septembre 2019.