Par Gabriel Matzneff.
Le Point publie les chroniques de Gabriel Matzneff sous la rubrique – justifiée, bien-sûr – Un diable dans le bénitier. Mais il arrive que le diable lui-même porte pierre, comme on disait jadis. Matzneff dit ici, dans son style des anciens temps, le beau style, désinvolte et profond tout à la fois, des choses que bien des catholiques et même au-delà des catholiques, pensent aussi. [Le Point, dernière livraison]. Un peu d’humilité et de lucidité combinées ne feront de mal à personne, ni aux catholiques, ni aux Français tout court. En bref, il s’agit de dire que l’islamisation de la France n’est pas la faute des musulmans mais bien des Catholiques, clergé et pratiquants. Certes, c’est ce qu’écrit Matzneff. Et c’est, sans-doute le fond des choses. À lire sûrement avec intérêt. Et même avec sympathie. JSF
CHRONIQUE. La nature a horreur du vide : si l’islam nous semble envahissant, c’est parce que le catholicisme, vidé de toute ferveur, lui a laissé la place.
« S’il y avait plus de curés passionnés, plus de paroissiens enthousiastes dans nos banlieues, on y rencontrerait moins d’imams. »
En France, tout est affaire de mode. Casanova et Stendhal l’ont écrit avant moi. Présentement, nous avons, chez les hommes, la mode de porter la barbe ; la mode de ne plus mettre de cravate. Les barbes, quand elles sont dûment taillées, peignées, parfumées, peuvent être un précieux ingrédient de l’élégance masculine. La cravate peut, en certaines occasions, être heureusement remplacée par une pochette signée par le Napolitain Marinella (qui est à la cravate et à la pochette ce que le pape de Rome est au catholicisme, ce que Freud est à la psychanalyse) ou, si l’on veut acheter français, Hermès. Nous pouvons même soutenir sans crainte d’en recevoir le démenti qu’un homme qui porte une longue barbe, vu que celle-ci cacherait une éventuelle cravate, a tout intérêt à donner sa préférence à une jolie pochette.
Je pourrais dater avec précision ces modes des poils au menton et du col de chemise ouvert. En revanche, je prie les sociologues de nous éclairer sur la date de naissance des logorrhéiques éloges des « vertus républicaines » et de la « laïcité » dont les politiciens, tant de droite que de gauche, nous cassent quotidiennement les oreilles.
Enfant, adolescent, je n’ai jamais entendu de tels discours. Comme tous les petits Français – en particulier ceux d’origine étrangère, fils et filles d’émigrés russes, italiens, polonais, arméniens, espagnols –, je fus élevé dans l’amour de la France, mais personne, ni à la maison, ni à l’école, ni ailleurs, ne me parlait des valeurs républicaines, et moins encore de la laïcité. Les chefs d’État de ma jeunesse – Auriol, Coty, de Gaulle, Pompidou – parlaient de la France, et seulement de la France. Les trois derniers, catholiques, allaient à la messe ; le premier, socialiste et franc-maçon, n’y allait pas, mais, quand, élu président de la République, il reçut le titre, hérité des rois de France, de chanoine d’honneur de Saint-Jean-de-Latran, il l’accepta avec simplicité, bonhomie, comme l’acceptera plus tard François Mitterrand. Aucun de ces hommes lettrés, patriotes, pour qui l’histoire de France ne commençait pas en 1789, ne se serait abandonné à la goujaterie laïcarde du Pingouin qui, avec la vulgarité qui le caractérise, se drapant dans l’hypocrisie vertueuse de Tartuffe, refusa le titre : « Cachez ce sein, cachez cette croix que je ne saurais voir ! »
La laïcité nous casse les pieds. Certes, la plupart des catholiques français ne vivent plus leur catholicisme, sont trop mous, trop douillets pour se soumettre aux sévères exigences de l’Église, ne pratiquent plus le jeûne du carême pascal. Est-ce une raison pour anathématiser les Français mahométans qui observent le jeûne du ramadan ?
Un Dieu mort
Si Paris est devenue une ville si triste, si ennuyeuse, c’est parce que les grandes fêtes du calendrier liturgique – Noël, l’Annonciation, Pâques, la Transfiguration, l’Assomption de la Vierge, l’Exaltation de la croix – n’y sont plus célébrées qu’en catimini, quasi clandestinement. Où sont les processions, les chœurs d’enfants chantant sur le parvis des églises, la joie communicative qui rend si merveilleusement allègre, vivifiante une ville telle que Naples ?
Si les chrétiens orthodoxes ne célébraient pas de manière solennelle, spectaculaire, la résurrection du Christ, saurions-nous encore en France ce que représente la fête de Pâques ?
Un Dieu qui n’est plus prié, sur les autels duquel ses disciples ne viennent plus déposer de fleurs et brûler de l’encens, est un Dieu foutu, un Dieu mort.
Où sont les prêtres ? Où sont les fidèles ? S’il y avait plus de curés passionnés, plus de paroissiens enthousiastes dans nos banlieues, on y rencontrerait moins d’imams.
Si les églises sont vides et les mosquées pleines, ce n’est pas la faute des sectateurs de Mahomet. Toute la responsabilité en incombe à ceux qui se prétendent chrétiens mais qui, dans le secret de leur cœur, n’ont plus foi en la résurrection du Christ, n’ont plus le cœur brûlant d’amour pour le Christ ressuscité.
Je préfère cent fois un prolétaire mahométan au nom exotique sans cesse fourré à la mosquée à un grand bourgeois catholique au nom fleurant le terroir qui se tape une entrecôte saignante chez Lipp le Vendredi saint. Une religion, que ce soit celle de Shiva, de Vénus, de Moïse, du Christ ou de Mahomet, est faite pour être pratiquée, et pratiquée avec ferveur. Un « croyant non pratiquant » est une couille molle, le nec plus ultra du pauvre type, et sa prétendue religion, une coquille vide. Ne comptez pas sur moi pour pleurnicher sur « la montée de l’islamisme ». Où sont les prêtres ? Où sont les fidèles ? S’il y avait plus de curés passionnés, plus de paroissiens enthousiastes dans nos banlieues, on y rencontrerait moins d’imams. La nature a horreur du vide.
À Cherchell, l’antique Césarée du roi Juba, se dresse un très beau temple de Minerve. (Photo) Quand les fidèles de la déesse se firent rares, ils furent remplacés par les disciples du Christ. Pendant la guerre d’Algérie, j’ai souvent prié dans cette église où les parachutistes, avant d’aller communier, déposaient leur PM sur leur chaise. Quand j’y suis retourné en 1964, deux ans après l’indépendance, le temple de Minerve et de Jésus était devenu celui de Mahomet, mais c’est le même encens qui y chatouille agréablement les narines du Divin. Telle est la vie, messeigneurs, et ce ne sont pas les discours enflammés sur « l’hydre islamiste » qui arrêteront son cours inexorable. ■
Enfin , l’on sort du » salon beige » . t
Il faut donc que ce soit un journal non catho pour trouver les mots justes . Cet article vaut bien mieux que le style » salon beige » .
Une chanson de Brassens , un peu triviale , disait » sans le Latin , sans le Latin , la Messe nous em….. «
Matzneff n’a pas tort; mais, comme tous les gens qui ne sont pas engagés dans la vie d’une Paroisse, il e n fait trop et il ne voit pas que, depuis Saint Jean-Paul II et, à Paris, le Cardinal Lustiger, le catholicisme est bien plus visible et offensif. En témoignent les semaines de mission, devant et à proximité de beucoup d’églises, en témoignent les multiples et exaltants chemins de croix qui, le vendredi saint, irriguent les rues de Paris.
Je ne crois pas plus aux vertus du latin (et de la soutane) pour faire prospérer le catholicisme qu’à celle du vertugadin et de la culotte à la française pour restaurer la monarchie. Ceux qui aiment ces vieilleries en sont libres. Mais combien de ceux qui grognent ont un engagement paroissial ?
Exact , qu’avons nous a offrir à un jeune islamiste militant? Un catholicisme honteux attaqué de toutes parts.
On ne combat une idéologie que par une autre idéologie , pas par les armes.
Il faut avoir le courage d’imposer nos lois notre foi notre façon de vivre sans honte et sans concessions .il faut être fiers de nos ancêtres et de ce qu’ils nous ont transmis. Qui a envie d’intégrer un hexagone honteux de son passé et mal à l’aise dans le présent ?
La France c’est chacun de nous et il nous appartient de la faire aimer.
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