Monde malade
Atlantico : On en sait désormais davantage sur le profil de Mikhaël Harpon, le tueur de la Préfecture de Police de Paris. Comme l’a indiqué Laurent Nunez, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Intérieur : « La piste privilégiée est celle d’un individu passant à l’acte au nom d’un « projet personnel ». Les tueurs de ces dernières semaines sont des « loups solitaires » ne faisant partie d’aucune organisation politique les poussant à agir. Faut-il conclure que leurs motivations sont spirituelles ?
Bérénice Levet : Je ne parlerai pas de « loup solitaire », cette expression est sans fondement, Gilles Kepel l’a puissamment établi : quand bien même Mickaël Harpon aurait agi seul, il s’inscrit dans un faisceau de relations, son acte est directement inspiré par les vidéos diffusées par les réseaux islamistes.
On ne saurait qualifier ces tueries de spirituelles. La vie de l’esprit est une chose trop noble pour les en gratifier. Gardons-nous de confondre le prêt-à-penser délivré par le discours islamiste avec le travail de la pensée. La vie de l’esprit est d’abord inquiétude au sens étymologique du terme, c’est-à-dire non repos. Elle suppose la passion d’interroger. Socrate, le premier des philosophes, lui-même se compare un taon. Autant de choses étrangères aux terroristes.
Qu’entendait Laurent Nuñez par la formule « projet personnel » ? Sans doute lui-même l’ignore-t-il ! Permettez-moi à cet égard, une brève parenthèse. La question de la langue, des mots pour dire les choses, est absolument décisive en ce domaine, comme dans tous les autres d’ailleurs : il ne pourra y avoir de politique à la hauteur des défis que l’islamisation de la France nous pose, aussi longtemps que nous en resterons à cette langue de carton. Même si naturellement, cela ne saurait suffire. On le voit avec notre Président qui excelle dans l’art de nommer les choses, il n’a pas craint de parler d’ « hydre islamiste », de volonté de « sécession » de l’islam politique, mais comme si c’était une fin en soi. Je ne demande qu’à être détrompée, mais jusqu’à présent, Emmanuel Macron s’est seulement distingué, par rapport à ses prédécesseurs, dans l’exercice de ce que le philosophe Clément Rosset appelait la « perception inutile » : « C’est une perception juste, explique-il, qui s’avère impuissante à faire embrayer sur un comportement adapté à la perception. […] J’ai vu, j’ai admis, mais qu’on ne m’en demande pas davantage. Pour le reste, […] je persiste dans mon comportement, tout comme si je n’avais rien vu ».
J’en reviens à votre question. Si j’exclus de parler d’actes à caractère spirituel, il me semble en revanche pertinent de les qualifier d’idéologiques, au sens littéral qu’Hannah Arendt donnait à ce terme dans les Origines du Totalitarisme, comme « logique d’une idée » c’est-à-dire reposant sur un grand récit d’une cohérence extrême qui « ne se rencontre
nulle part dans la réalité », qui offre ceci de formidablement réconfortant pour l’esprit humain qu’il « permet de tout expliquer jusqu’au moindre événement ». Évidemment cela a un prix, pour pouvoir ainsi tout expliquer, il faut « s’affranchir de toute expérience », « s’émanciper de toute réalité que nous percevons au moyen de nos cinq sens et affirmer l’existence d’une
réalité “plus vraie” qui se dissimule derrière les choses que l’on perçoit ». D’où l’adhésion à l’idéologie complotiste.
Bertrand Vergely : Il est surprenant d’entendre dire de la part du ministre de l’intérieur ainsi que de son secrétaire d’État que la tuerie qui a eu lieu à la Préfecture de Police ne relève pas du terrorisme. Certes, cette tuerie n’a pas été faite par une bande organisée comme cela a été le cas de la tuerie du Bataclan en 2015. Mais tout de même, si ce n’est pas du terrorisme qu’est-ce ? Dans la façon dont les medias ainsi que les responsables politiques distinguent la tuerie de la Préfecture de Police du terrorisme, on sent comme une peur d’apparaître comme raciste en les reliant. Ce comportement est d’autant plus étrange que Jeudi 10 Octobre le ministre de l’Intérieur a interdit la tenue d’une manifestation à Gonesse lancée par un activiste s’insurgeant contre l’amalgame entre la tuerie de la Préfecture de Police et le terrorisme islamiste. Il faut savoir : ou il n’y a aucun lien et dans ce cas on n’interdit pas la manifestation prévue à Gonesse, ou il y a lien et dans ce cas on le dit.
En vérité, une fois de plus, à chaque fois qu’un attentat islamiste a lieu on passe davantage de temps à expliquer que cela n’a rien à voir avec l’islam et qu’il ne faut pas faire d’amalgame qu’à comprendre pourquoi il s’agit d’un attentat effectivement islamiste.
L’islamisme fascine un certain nombre de jeunes. La raison en est simple. Il leur offre de pouvoir jouer avec la violence en toute légitimité en reconnaissant cette violence comme un acte héroïque au nom des valeurs supérieures Quand l’islamisme attire et recrute il le fait de trois façons : par le combat militaire direct, par l’attentat en bande organisée ou bien par l’action purement solitaire comme celle du tueur qui se précipite au milieu d’une foule avec un couteau en tuant au nom de « Allah Akbar », « Dieu est grand ». Le ministre de l’intérieur pense que la tuerie de la Préfecture de Police ne relève pas du terrorisme parce qu’elle est le fait d’un tueur isolé et non d’une bande. Il néglige le fait que tuer de façon solitaire est recommandé par Daech depuis sa défaite. Quand donc un tueur agit de façon solitaire, il est le terrorisme à lui tout seul. C’est d’ailleurs pour cela qu’il tue, être le terrorisme à lui tout seul étant ce qui le fascine.
La spiritualité est ce qu’il y a de plus élevé dans la vie humaine. Résidant dans le fait de pratiquer l’esprit qui est présence et intelligence de la présence, cette expérience est tellement passionnante que l’on pense à tout sauf à aller égorger ses semblables. Quand il y a tuerie cela ne peut jamais venir de la spiritualité mais plutôt de son absence. Dans l’Islam on trouve des courants religieux comme le soufisme qui, étant d’une haute spiritualité, sont totalement éloignés de la violence qu’ils réprouvent. Il y a cependant des courants religieux qui sont radicalement le contraire en prêchant la violence. Ces courants reproduisent ce à quoi on assiste toujours quand on a affaire à un maniement primaire des idées à savoir d’abord l’apparition d’un système politique ou religieux prétendant tout expliquer, puis transformation de cette théorie prétendant tout expliquer en théorie prétendant tout régler pratiquement, enfin transformation de cette théorie prétendant tout régler pratiquement en projet de dictature, puis passage à l’acte et mise en place de la dictature par des actes au sein d’une milice, d’une bande ou seul. Dans les années soixante dix le gauchisme en Europe a fonctionné sur ce mode. Aujourd’hui c’est l’islamisme, avec parfois une convergence de luttes entre gauchisme et islamisme débouchant sur l’islamo-gauchisme. Pour comprendre ce qui se passe, autrement dit, ne faisons pas l’erreur de parler de religion ou de spiritualité. Parlons plutôt du poids des images et des idées à l’intérieur du champ religieux, politique, social et culturel, la violence terroriste étant le fait de l’emprise des mots, des images, des idées, des idéaux et derrière eux de la passion de « la solution finale » pour tout, que ce soit la pensée, la pratique, la religion, la culture et l’humanité dans son ensemble.
À la base des tueurs n’y a-t-il pas une crise spirituelle ? Et cette crise n’est-elle pas le résultat de la déconstruction des repères traditionnels (famille, religion, patriotisme) qui donnaient un sens à la vie ?
Bérénice Levet : Sans exonérer un instant les coupables de leur responsabilité – on pactise toujours en première personne avec le diable –, il est difficile de ne pas penser que l’attrait qu’exerce l’islamisme sur une partie des musulmans soit sans lien avec la philosophie et l’anthropologie qui nous gouvernent depuis les années 1970. Le péché originel du progressisme est d’avoir prêté des vertus émancipatrices à la désaffiliation et à la désidentification d’avoir prétendu que l’individu serait d’autant plus libre, plus original qu’li serait délié de toute héritage. Depuis lors, l’éducation consiste en une succession de désidentifications : désidentification religieuse, désidentification nationale, et désormais, dernier avatar de ce processus, désidentification sexuée et sexuelle. d’abord religieux, ensuite national. Le retrait de l’identité nationale – seule identité à fabriquer du commun, à cimenter un peuple – a permis l’offensive actuelle des identités particulières, et singulièrement du communautarisme musulman.
Quand nous travaillons avec obstination à délester l’individu de tout passé, de toute histoire, l’islamisme leur livre un kit identitaire n’autorisant aucun jeu, aucun écart ; quand nous nous faisons un devoir de lever tous les interdits, l’islam radical parle d’autorité, imposant prescriptions, proscriptions à ses recrues, leur confie des missions, meurtrières assurément mais qui donnent un sens, dans la double acception du mot, une signification et une direction, à leur vie.
La propagande islamiste vient ainsi moins satisfaire un irrésistible besoin de spiritualité ou de religion que combler un vide creusé par l’éducation et la pensée progressistes. Les communiqués djihadistes diffusés en français jouent de cet argument d’un besoin spirituel ou religieux sacrifié par l’Occident et tout particulièrement par la France, opposant ce « pays faible [qui] abrutit son peuple de divertissement » à l’État islamique dont chaque membre est « un combattant en puissance, ayant suivi un entraînement militaire, faisant la guerre pour sa foi, espérant le paradis éternel s’il est tué ». L’abrutissement des masses par l’industrie de l’entertainment est parfaitement indifférent à un islam qui n’exècre rien tant que l’esprit des Lumières et la passion du questionnement, du discernement. Notre enfoncement dans le consumérisme et l’utilitarisme travaille assurément contre nous. « La médiocrité spirituelle que les immigrés islamiques perçoivent dans l’Occident moderne n’est pas imaginaire et pourrait être la plus grande entrave à la préservation de la culture européenne », écrivait ainsi en 2011 le journaliste américain Christopher Caldwell. Kamel Daoud a très bien raconté comment, dans sa jeunesse, il se laissa harponner par la rhétorique des Frères musulmans : « L’offre religieuse donnait du sens à mon corps, à ma sexualité, à mon rapport à la femme, à l’au-delà, etc. L’effondrement philosophique est plus grave que l’échec économique. »
Bertrand Vergely : Pour comprendre ce qui se passe aujourd’hui avec la violence il importe de distinguer ce qui nous est propre, l’attentat d’extrême droite en Allemagne et les attentats islamistes de Paris et de Manchester. La crise spirituelle liée à la déconstruction nous concerne. Elle ne concerne pas l’extrême droite allemande et les islamistes. La France a été un pays catholique. Puis elle a été un pays républicain. Aujourd’hui la déconstruction ne veut ni du catholicisme ni de la République mais l’ultra-démocratie et l’individualisme absolu. Cela se traduit non pas par un terrorisme physique faisant des attentas mais par un terrorisme intellectuel jouant à fond la carte du politiquement correct, de l’ultra-féminisme et de l’ultra-écologie. Via cette radicalité on voit s’exprimer un désir de liberté et de pureté comblant une mystique qui n’a pas lieu. Il n’y a pas d’attentat physique, mais il convient d’être prudent. Il y a les gilets jaunes, les black blocks, les zadistes, les vegan qui attaquent des boucheries et un militantisme écologique prenant d’assaut des grandes surfaces comme à la place d’Italie le weekend dernier ou bien récemment un pont près de l’île de la Cité. S’agissant de l’extrême droite allemande on est dans une autre problématique. Manifestement de jeunes allemands épris de provocation s’identifient à l’antisémitisme nazi. À cela s’ajoute le réveil de l’extrême droite en Allemagne et dans l’Europe de l’Est. S’ajoute également un courant anti-migrants qui y prend de l’ampleur. Enfin il y a la mouvance islamiste. Si l’on considère les jeunes qui rejoignent celle-ci une chose est frappante : ces jeunes sont attirés par la structure à la fois rigide et communautaire que l’islam leur offre. Alors que certains jeunes s’engagent dans l’armée pour ces mêmes raisons, eux s’engagent dans l’islam. Pour ces jeunes, l’Islam est commode. Il leur permet de revenir vers des valeurs dites traditionnelles comme la religion, mais via l’islam comme figure contestataire de l’Occident. Si bien que l’islam leur permet d’être traditionnaliste dans la contestation et contestataire dans une tradition. Une façon de dépasser l’opposition droite-gauche qui n’intéresse plus personne. Autrement dit, ce n’est pas vraiment la déconstruction qui est à la base des attentats qui se commettent : leur source se trouve dans la provocation .
Pour expliquer les tueries qui ont lieu au États unis certains avancent une crise de la masculinité. Dans les faits tous les terroristes qui sont passés à l’acte sont des hommes. L’explosion de violence à laquelle nous assistons est-elle liée au bouleversement actuel des modèles de virilité ?
Bérénice Levet : On sait que les mouvements dits masculinistes qui sont venus répliquer à la criminalisation des hommes blancs par les mouvements féministes, sont puissants aux Etats-Unis et entretiennent une idée régressive, caricaturale de la virilité. On ne rappellera jamais assez que notre idée de la virilité était faite de codes, de normes, elle consistait en une domestication des pulsions, une mise en forme du désir, un idéal de constance, de fermeté. La négation de la différence des sexes et la disqualification des représentations traditionnelles livre le jeune garçon à des formes de masculinité des plus sommaires.
Cependant, la crise de la masculinité ne peut à elle seule expliquer les tueries de masse.
Quant aux attentats islamistes, les hommes n’en ont pas l’exclusivité. Certes jusqu’à présent, ceux qui nous ont frappés ont été commis par des hommes mais au moment même où Mickaël Harpon égorgeait ses victimes à la Préfecture de police se déroulait le procès de quatre des huit jeunes filles poursuivies pour tentative d’attentat à proximité de Notre-Dame en septembre 2016.
Bertrand Vergely. Certes, ce sont des hommes qui font les attentats. Mais attribuer ces derniers à la crise de la virilité n’st pas la bonne raison. Qui s’intéresse à la crise de la virilité ? Ceux qui cherchent à la mettre en crise comme la LGBT ou bine encore l’ultra-féminisme. Pour faire advenir la transsexualité comme vérité de la sexualité la LGBT a besoin à tout prix de défaire la notion de virilité. Aussi ne perd-telle pas une occasion de mettre celle-ci en crise en se servant par exemple des attentats commis par des hommes. De son côté quand il attaque la virilité L’ultra-féminisme ne cherche pas tant à faire advenir le transsexualisme qu’à attaquer le machisme en se servant là encore de toutes les occasions. Quand un attenta se produit tout le monde cherche à en tirer profit en voyant dans celui-ci la confirmation des thèses qu’il défend. Un homme sort un coteau dans la foule ? La LGBT va y voir l’expression d’un monde qui ignore le transsexualisme en se disant que si cet homme avait été un transsexuel jamais il n’y aurait eu d’attentat. L’ultra-féminisme va y voir de son côté une manifestation du machisme. Si celui a commis un attentat avait été transsexuel, jamais il n’y aurait eu d’attentat. La psychologie est intéressante. Elle n’explique pas tout et notamment les attentats dont les racines plongent dans le pouvoir de l’idéologie. La théorie du genre entend réinterpréter l’ensemble de la culture mondiale. L’idée que le terrorisme est lié à une quête éperdue de virilité par peur de se dépouiller de l’orgueil masculin a encire du chemin à faire afin d’être convaincante. D’autant qu’il va falloir que celle-ci explique pourquoi, il y a deux ans de cela, des jeunes filles ont étét arrêtées à la suite d’un projet d’attentat avec bouteilles de gaz et clous, pourquoi d’autre jeunes femmes ont décidé d’aller en Syrie combattre aux côtés de Daech, pourquoi certaines jeunes filles aujourd’hui deviennent musulmanes et décident de prendre le voile musulman.
Pour expliquer son acte le tueur de Halle en Allemagne s’est appuyé sur les jeux vidéo qui utilisent des cibles parmi lesquelles certaines sont qualifiées de « bonus ». Quel rôle joue la montée d’un monde ludique dans les tueries auxquelles nous assistons ?
Bérénice Levet : La pratique des jeux vidéos contribue à faire vivre celui qui en est familier dans un monde fictif. Les jeux vidéo, mais aussi la pratique des réseaux sociaux, sont de redoutables machines à déréaliser le réel. Et cela rejoint ce que je disais plus haut concernant le caractère idéologique de ces actes.
Bertrand Vergely : Il est vrai que le nihilisme ainsi que le cynisme s’appuient sur une vision du monde dans laquelle tout est jeu. Il est vrai également que certaines violences produites par la délinquance sont liées au désir de reproduire la toute puissance que l’on voit s’exercer dans les jeux vidéo où il s’agit de tuer un maximum d’adversaires. Il est vrai enfin que des films comme La tour infernale ont pu donner des idées aux terroristes du 11 Septembre 2001 à New York. Néanmoins, n’oublions jamais le poids de l’idéologie. Quand un terroriste d’extrême droite fait un attentat comme à halle si la modalité de son attentat relève d’une mise en scène ludique le fond de son geste criminel renvoie au simplisme idéologique qui s’est emparé de son esprit à travers des explications expéditives de la réalité et des solution s improvisées toutes aussi expéditives. En fait, il y a derrière de tels comportements un jeu idéologique réducteur se mariant avec un univers ludique pour déboucher sur un scénario de films d’épouvante. ■
Profonde lucidité de Bérénice Levet lorsqu’elle avance :
» Sans exonérer un instant les coupables de leur responsabilité – on pactise toujours en première personne avec le diable –, il est difficile de ne pas penser que l’attrait qu’exerce l’islamisme sur une partie des musulmans soit sans lien avec la philosophie et l’anthropologie qui nous gouvernent depuis les années 1970. Le péché originel du progressisme est d’avoir prêté des vertus émancipatrices à la désaffiliation et à la désidentification d’avoir prétendu que l’individu serait d’autant plus libre, plus original qu’li serait délié de toute héritage. Depuis lors, l’éducation consiste en une succession de désidentifications : désidentification religieuse, désidentification nationale, et désormais, dernier avatar de ce processus, désidentification sexuée et sexuelle. d’abord religieux, ensuite national. Le retrait de l’identité nationale – seule identité à fabriquer du commun, à cimenter un peuple – a permis l’offensive actuelle des identités particulières, et singulièrement du communautarisme musulman.
Quand nous travaillons avec obstination à délester l’individu de tout passé, de toute histoire, l’islamisme leur livre un kit identitaire n’autorisant aucun jeu, aucun écart ; quand nous nous faisons un devoir de lever tous les interdits, l’islam radical parle d’autorité, imposant prescriptions, proscriptions à ses recrues, leur confie des missions, meurtrières assurément mais qui donnent un sens, dans la double acception du mot, une signification et une direction, à leur vie. »
Il y a une crise de l’identité occidentale, et une crise de la personne occidentale lorsque l’individualisme libéral et le politiquement correct réduisent cette dernière à l’homo œconomicus et au sujet de droit indifférencié, nomade et désaffilié. C’est à cause de ce vide et ce nihilisme que s’avancent les affirmations identitaires des musulmans. Intégration en panne dit-on, d’accord, mais intégration à quoi ? À un pays où les élites nous disent que la France, ça existe si peu, et que de toute façon elle est coupable de tous les drames de l’histoire (je suis étonné qu’un président n’ait pas encore pensé à un musée de la repentance), où l’actuel chef de l’État affirme doctement que la culture française ça n’existe pas. Nos mœurs sont-ils si aimables ? On imagine sans peine la stupeur de ces immigrés venant d’une autre civilisation et découvrant par exemple l’exhibitionnisme de la Gay Pride, ou cette annulation de la différence homme femme jusque sur les documents officiels (Ah la poésie de » parent I et parent II ») Regardons jusqu’où va la dégradation de la personne humaine sous l’effet du culte hébété de la consommation, avec des zombies capables de passer une nuit devant l’entrée d’un Apple Store pour être sûrs de pouvoir acheter au petit matin le dernier modèle d’iPhone, où ces troupeaux se battant à l’entrée des supermarchés le jour de l’ouverture des soldes et courant pour se jeter sur les écrans de télévision. Crise de l’identité dit Bérénice Levet. Un symptôme (c’est souvent dans les détails que gisent les plus profondes réalités) parmi d’autres, révélé par Olivier Rey : tout à coup en Europe, on a vu les poussettes avec un siège pour bébé orienté vers l’avant, alors qu’auparavant, il regardait vers le père ou la mère (pardonnez-moi d’employer encore ces termes désuets et bientôt poursuivis en justice pour discrimination) ce qui revient à dire » ne me regarde pas, je n’ai rien à t’apprendre ou à te transmettre, tu dois te faire tout seul. » Comment s’étonner, face à ces pathologies occidentales que certains fraîchement arrivés chez nous cherchent dans la religion de leur père un ancrage et une identité? Je n’ai rien contre ces affirmations identitaires, sauf sur un seul point, c’est qu’elle se fassent chez nous. Il est beau que des musulmans veuillent être musulmans, mais en terre d’islam, pas ici. Ce n’est peut-être pas d’abord de services spéciaux et de police etc. dont nous avons le plus besoin en Europe, pour combattre l’islamisme, mais d’un réarmement moral et de la réaffirmation de notre identité gréco-romaine et judéo-chrétienne, d’une fierté d’appartenir à une grande civilisation qui ne veut pas être laminée par l’utilitarisme anglo-saxon, à et des peuples à la riche histoire, qui méritent notre respect et notre admiration. Quant à cette idéologie de » l’émancipation qui sévit en Europe depuis des décennies, que reste-t-il quand on s’est émancipé de tout, culture, passé, histoire, identité sexuelle ? Il ne reste que le zombie à trottinette, bardé de téléphones portables , strictement semblable aux autres zombies, comme cloné.