par Gérard Leclerc.
Qu’un étudiant s’immole par le feu, comme cela vient de se passer à Lyon, voilà qui glace le cœur et provoque la compassion. Il s’agit d’une tragédie personnelle, de l’acte de désespoir d’un jeune homme en situation d’échec ? Sans aucun doute ! Convient-il de donner une signification sociale à ce désespoir ? C’est ce à quoi prétendent un certain nombre d’associations dites d’extrême gauche. Et sans doute convient-il de considérer avec soin ce que les situationnistes appelaient déjà en 1968 « la misère en milieu étudiant ». De là à penser à une sorte de geste prophétique, analogue au sacrifice de Jan Palach, ce jeune homme de 21 ans qui s’était immolé par le feu le 19 janvier 1969 sur la place Wenceslas à Prague afin de protester contre l’invasion de son pays par l’armée soviétique, il y a une sérieuse marge.
Quelles que soient les graves difficultés de notre pays, la France de 2019 n’est pas la Tchécoslovaquie de 1969. Et il y a danger à inviter la jeunesse à des positions extrémistes qui, pour le coup, ont une saveur totalitaire et non pas libératrice. Sans doute, la mouvance d’extrême gauche, qui prétend combattre la menace fasciste contemporaine est ultra-minoritaire, mais on peut craindre une sorte de contagion plus pathologique qu’idéologique. Empêcher Sylviane Agacinski de s’exprimer à Bordeaux sur la procréation médicalement assistée en la traitant d’homophobe, déchirer à Lille les livres de François Hollande qualifié de fasciste, tenter de brûler un bâtiment à Caen, autant de signaux alarmants d’une mentalité à propos de laquelle il est permis de s’interroger.
Au-delà de l’explication d’ordre psychologique, n’est-ce pas la situation actuelle de l’université qui est à mettre en cause ? Marcel Gauchet, en tout cas, prend l’affaire très au sérieux. Oui, l’université tend à devenir une ZAD, semblable à Notre-Dame des Landes, une réserve pour militants extrémistes. Ainsi « une minorité militante, explique le philosophe à Élisabeth Lévy de Causeur, y évolue comme un poisson dans l’eau et arrive rapidement à rafler tous les leviers de commande ». Un tel constat ne peut manquer d’impressionner, car il s’ajoute au malaise général, générateur des violences auxquelles on a assisté samedi. ■
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 21 novembre 2019.
L’université française (et qui n’a plus d’université que le nom) massifiée depuis les années 70 est devenue, comme chacun le sait et je parle un peu d’expérience, un gigantesque parking social pour jeunes adultes, que l’on empêche ainsi d’arriver trop rapidement sur le marché du travail où justement … il n’y a plus de travail. On leur accord au rabais, du moins dans les facultés des Lettres (c’est dans ces facultés que s’entassent les jeunes gauchistes dont parle l’article) des diplômes, qui eux aussi n’ont plus de diplômes universitaires que le nom et on fabrique des déclassés aigris, on ne compte plus le nombre de diplômés en sociologie ou en psychologie ou en sciences du langage qui seront heureux de trouver des emplois de manutentionnaires ou de caissières de supermarché. C’est dans ce prolétariat de demi-intellectuels ou de semi-illettrés diplômés que se recrutent les militants gauchistes, diversitaires, décoloniaux etc. Ce prolétariat ressemble furieusement à cette intelligentsia russe de la seconde moitié du dix-neuvième siècle dans laquelle sont nés ces courants extrémistes et terroristes qui ont déstabilisé l’empire.
Le Bachelier , de Jules Vallès , auteur certes mal- pensant , décrivait bien , il y -a plus de cent ans un certain type d’ intellectuel nourri de Grec et de Latin ( maintenant la nourriture a changé : ce sont les Mathématiques , la maîtrise du globich présentés comme le passeport pour la réussite sociale ) , intellectuels transformés en sous- prolétaires . Au delà des cas individuels , n’ y aurait il encore un problème de la jeunesse vouée aux études ? l’on voit des étudiants impécunieux végéter , employés de M.. Donald voire étudiantes servant dans des bars , seins dénudés , dans des pays » libéraux et libérés » avec études payantes . Certains y songent pour la France . L ‘Etat devrait se faire payer pour le capital intellectuel investi et l’ étudiant emprunter pour rembourser ensuite ; A ce compte , il faudrait aussi revenir à la faible taxation de la Belle Epoque .