Par Michel MICHEL.
Le royalisme est divisé en de multiples courants, chapelles et sensibilités ; c’est le lot commun aux mouvements qui ne sont pas stabilisés par le risque de perdre postes, prébendes et autres avantages matériels.
Au PS, à l’UMP, où chaque placard cache un cadavre on aurait bien plus de raisons de se haïr. Mais on risque aussi de perdre gros. Pour nous qui possédons si peu, une scission ne coûte pas cher…
A l’époque de l’OAS, on s’adonnait à un jeu pervers : dès que des partisans de l’Algérie Française étaient rassemblé à trois ou plus, quelqu’un demandait : « qui est la barbouze ? » Cela n’améliorait pas les relations humaines, on s’en doute…Le jeu de « ma façon à moi d’être royaliste » est presque aussi pervers : « Es-tu royaliste ou monarchiste ? Royaliste de droite ou de gauche ? Partisan d’une monarchie féodale ou absolue ? Monarchien ou émigré ? Avec les gardes du Cardinal ou les mousquetaires du Roi ? ». Quelles belles disputes byzantines en perspective ! (Pour ma part je serais plutôt théocrate tribaliste…)
Et de « mon royalisme à moi », on passe vite à « mon roi à moi », (ce qui est la négation du royalisme), c’est-à-dire au « Moi-roi » (comme on dit « l’enfant-roi » pour dire qu’il est gâté).
Ces spéculations sont improductives et démobilisatrices : l’univers des motivations est indéfini, sans fin…Lorsque deux âmes élues auront l’illusion d’avoir tant en commun, elles arriveront vite à trouver un point de vue qui les divise, d’autant plus irrémédiablement qu’elles auront fait de leur subjectivité le critère de leur union.
D’ailleurs, – sauf en de brèves périodes d’hégémonie d’une doctrine comme celle que l’Action Française était parvenu à imposer partiellement à certains moments de son histoire -, pourquoi les royalistes seraient-ils moins divisés que les républicains ? Les tendances centrifuges des tribus gauloises ne datent pas de 1789, et c’est une des raisons qui justifient la nécessité de la monarchie en France.
Au contraire, l’action implique une confrontation avec les résistances du réel ; elle constitue une ascèse dans laquelle s’évanouissent bien des faux problèmes. Le matériau éprouve la volonté et dissipe les velléités. La psychanalyse se fonde sur une intuition juste quand elle explique la construction de la personne par l’interaction du principe de plaisir et du principe de réalité. Les aspirations qui ne se confrontent pas avec le monde nécrosent.
C’est le projet commun qui fédère. Surtout, comme l’a bien établi Carl Schmitt, quand l’action s’exerce sur un terrain où l’on a besoin d’alliés pour vaincre des adversaires. Les troupes se soudent dans le combat (surtout s’il est victorieux) et se délitent à Capoue.
Les royalistes sont restés trop longtemps hors du champ politique, ils n’ont plus que des adversaires abstraits : les travers de leurs comportements s’expliquent en grande partie par cette situation planante.
Grosso modo, depuis les combats pour l’Algérie Française où ils avaient pris une part importante, si l’on excepte les affrontements avec les gauchistes dans les années 70 qui n’ont surtout touché que la frange étudiante et parisienne de l’AF, les royalistes étaient hors jeu, réduits à des activités commémoratives. C’est-à-dire qu’ils n’existaient qu’à leurs propres yeux ; plus souvent en affrontements avec d’autres royalistes qu’aux prises avec un terrain extérieur.
Depuis quelques années la montée du souverainisme et les révoltes populistes leur permettent de sortir de cette situation. Les royalistes de toutes nuances, qui auparavant étaient incapables de s’entendre sur le terrain des chapelles fleurdelysées, lorsqu’ils s’engagent dans ce combat, s’y croisent en bonne connivence face aux courants jacobins, marxistes ou libéraux. La cause de l’indépendance nationale est centrale pour l’avenir de notre pays et laisse présager des affrontements entre le pays réel et le pays légal que ce dernier aura du mal à digérer. Serons nous en mesure de profiter de cette lame de fond ? J’enrage, devant cette occasion historique qui se présente à nous, de constater que des royalistes préfèrent se contempler le nombril dans leurs cénacles.
Je ne veux pas dire pour autant qu’il faille négliger la question des motivations.
Dans les années 70, la Nouvelle Action Française (devenue depuis la NAR) avait perdu l’essentiel de ses militants en prenant son public à rebrousse poils. Loin des discours utopistes sur la Royauté préfigurant la descente de la Jérusalem céleste, on y présentait la monarchie comme un léger réglage qui améliorerait le fonctionnement institutionnel de la Ve république sans changer grand-chose au « consensus » plat du politiquement correct.
Cette position n’aurait pas été absurde la veille d’un coup d’état royaliste pour rassurer l’opinion, isoler les opposants et faciliter les ralliements de dernière heure ; mais dans l’état groupusculaire où nous nous trouvions, elle décourageait l’élan de ceux qui avaient besoin de fonder leur engagement – aux résultats lointains et aléatoires – sur des convictions qui dépassent de simples considérations de droit constitutionnel.
Les valeurs et les motivations sont comme le combustible qui fait tourner le moteur de l’action royaliste. Mais attention à ne pas noyer le moteur…
Les valeurs se vivent. A trop les expliciter, elles se réduisent vite en langue de bois, en rhétorique vaine. Décortiquer les motivations est une activité psychologiquement intéressante mais ça n’a jamais augmenté leur puissance. Il y a même quelque chose d’obscène à vouloir déployer totalement les motivations d’une personne. ■
BRAVO, tout est dit, mais saurons nous tirer la leçon de cet exposé???
Souvent les Royalistes recherchent ce qui les divise et non ce qui les unit
Lumineux, comme toujours…
Cela étant, cela pose , comme toujours, la question léniniste : « Que faire ? ». L’entrisme dans un parti est souvent voué au phagocytage des énergies, du fait des ambitions. La participation à un mouvement un peu tellurique, important, même s’il est minoritaire (Algérie jadis, Manif pour tous naguère) me semble davantage appropriée, mais comporte un grave inconvénient : elle nous rend un peu prisonniers des orientations prises et des militants et sympathisants qui nous ont ralliés pour ce combat spécifique.
Nous avons eu beaucoup de mal à « sortir » du combat pour l’Algérie, ainsi : une prise de distance avec ce combat (ne serait-ce que parce qu’il était perdu) était difficile tant nous comptions dans nos rangs (surtout dans les sections du Sud de la France, évidemment) des militants « Pieds-Noirs » légitimement hypersensibles à tout ce qui aurait remis en cause leur engagement initial.
Je suppose qu’il en a d’ailleurs été de même à toutes les époques, après les combats perdus (légitimes ou non) : Dreyfus, Pétain, CED, etc.
Bonne analyse d’un univers royaliste indéfini et oui devant l’obstacle , les troupes se rassemblent, mais gagnent elles.
Sachons nous servir de notre propre histoire récente, inutile de remonter aux mousquetaires. Si l’OAS née de l’Algérie Française avait été enseignée , diffusée, expliquée , dans tous les foyers de France , peut être , c’est pas sur, mais je pense que l’histoire aurait été autre. Quant on a le pouvoir , c’est facile de jouer avec les sentiments des gens. Quant vous demandez à des parents s’ils veulent que leur fils rentre à la maison, ils votent la fin des combats.
Avant d’envoyer les jeunes royalistes au combat, il est indispensable de savoir expliquer, pour que tous les Français comprennent , acceptent qu’une royauté souveraine leur apportera le bien être. Jusqu’à maintenant le royaliste imagine son royaume, puisqu’il ne sait pas ce que le souverain fera. Il est difficile de prendre parti pour une chose que l’on ne perçoit pas ou mal.
Ce sont les mêmes qui en quarante préféraient, les Nazis et leur fou, aux petits Français, ces derniers n’ayant aucune information politique, ont accepté la suite: l’Algérie. Cette fois ils nous préfère à l’islam pour garder leur fauteuils. D’un coté depuis les années trente, ils ont bétonné l’institution, politique , juridique, policière et militaire; de l’autre les Français sont devenus individualiste , morose, sans gout pour le pouvoir, il suffit de prendre connaissance des votants.
Alors évitons l’erreur de l’Algérie et de toutes nos colonies. Deux dangers nous guettent, l’argent qui s’envole et va nous ruiner et l’islamisation acceptée par nos républicains qui va nous coloniser. Préférons l’enseignement clair et limpide que l’affrontement.
La recherche d’enseigner le royalisme est déjà le moyen de se rassembler. Il n’est pas nécessaire de tout casser et de s’affronter physiquement pour apporter de l’eau au moulin d’un futur royaume de France.
Vous souhaitez un royaume, et vous avez raison, mais encore faut il apporter les réponses adéquates.
Alors il faut désigner physiquement celui qui sera le roi et lui demander son avis.
Nous sommes dans une loi mathématique binaire. Il faut tendre la main à la masse populaire qui le désirent, et convaincre encore plus ceux qui croient encore en la république fille des terroristes de 1790..
Il faut faire émerger les raisons profondes qui pousserons la masse des gens à le vouloir, la vérité écrasant ceux qui doute encore ou qui s’oppose pour raison personnelle et de statut.
Vous voyez le travail a accomplir est immense , il ne suffit plus de paraphraser , il faut souffler et jouer du bignou.
Qui va pouvoir nous dire ce que sera un royaume , précisément, dans le détail. Ce sont des réponses pragmatiques que les gens demandent. Faut il répondre au nom du futur roi, pour l’argent qui s’évapore et l’islam conquérant qui nous interroge..
Les Français veulent des réponses claires et simples , sur le présent , sur l’avenir, dans chaque régions , dans chaque foyer, pour chacun de nous, pour nos enfants. Nous ne sommes pas dupe de l’actuelle politique, mais il faut démontrer que celle d’un royaume permettra nettement d’améliorer la vie de chacun de nous.
Il est évident qu’il y a plusieurs réponses , et parfois pas de réponse, c’est pour ces raisons qu’il faut être uni.
L’autre solution est de s’imposer, et là vous êtes responsables des dégâts. Voyez comment chacun de nous a interprété les Gilets jaunes, comment les gestionnaires ont contourné la revendication en utilisant des casseurs. .
La moutarde monte, il faut avoir raison gardée.