Par Gérard POL.
Le départ de Jean-Paul Delevoye lundi dernier ne nous apprend rien sur les limites de la transparence et même sur ses fruits empoisonnés et ne nous apprend rien non plus sur les privautés que les hommes de pouvoir s’autorisent en matière d’intérêts malgré les lois qu’ils ont eux-mêmes mises en place sous les diverses pressions du régime d’opinion.
Les Français ne se font aucune illusion sur la loyauté de ces hommes en matière de transparence aussi bien que sur les différents types de corruption auxquels nombre d’entre eux n’ont jamais cessé de s’abandonner. Que ce soit pour financer leurs partis exsangues, après l’abolition des dévouements de jadis, ou, pis, que ce soit pour gonfler leur portefeuille personnel.
Ce que la démission de Jean-Paul Delevoye ne nous apprend pas mais tout de même nous confirme, c’est la vanité de la prétention d’Emmanuel Macron à avoir inauguré une ère politique nouvelle digne de la postmodernité -fantasmée par lui – et c’est aussi l’extrême légèreté de ses choix en matière de collaborateurs.
De la démission forcée de François Bayrou et Marielle de Sarnez presque aussitôt après qu’ils furent devenus ministres, à celle de Jean-Paul Delevoye, en passant par les départs fracassants de Nicolas Hulot ou Gérard Colomb, l’affaire des homards de Rugy, les soupçons de carambouille qui devraient disqualifier Richard Ferrand, etc. démissions, départs, scandales, affaires, ont été incessants. À l’acte I du quinquennat aussi bien qu’à l’acte II qui démarre. Des « actes », en effet, comme on dit au théâtre… Sans compter l’affaire Benalla qui a gâté la vie politique pendant des mois. Pour pas grand-chose, en fait. C’était l’histoire, de peu d’importance, d’un jeune second couteau de la sécurité présidentielle dont la tête avait enflé, s’était grisée de sa proximité avec le cercle étroit qui occupe le sommet de notre État. Sa faute ?Avoir usurpé le rôle de la police et frappé des manifestants de l’ultra-gauche … Des casseurs avérés. Dans le fond … Seul Jacques Trémolet de Villers a osé dire qu’il n’y avait pas là de quoi fouetter un chat. Les friands de ragots vulgaires s’en sont délectés … Passons.
Le cas Delevoye confirme donc le peu de discernement, de bon-sens, de compétence, d’Emmanuel Macron pour choisir des collaborateurs ou mieux, des serviteurs de l’État de quelque hauteur et qui soient des hommes d’honneur. Macron n’a-t-il pas de moyens pour en trouver ? Est-il si seul ? C’est possible. Ou bien n’y en a-t-il plus en France, notamment dans la haute fonction publique ? Nous ne le croyons pas.
Cet ensemble de rappels et de considérations rapides mettent en cause, bien-sûr, les institutions qui corrompent les hommes.
Mais il y a aussi, circonstance aggravante, le cas spécifique d’Emmanuel Macron, homme jeune, surgi, à la Balzac ou à la France, des recoins de la banque et de la haute fonction publique, par ailleurs exceptionnellement doué, indubitablement intelligent, grand travailleur, charismatique, charmeur, cultivé, maniant un français châtié, mais dépourvu de sagesse, d’expérience, d’épaisseur politiques et même, probablement, d’idées politiques tout court.
On se souvient que selon Barrès, les poètes tiennent aux générations diverses des discours divers. Mais ce sont ces dernières qui en modulent la musique et le sens, suivant les sensibilités fluctuantes au fil des époques. Macron n’est pas poète et n’a pas encore de dimension intergénérationnelle. Ce n’est pas aux générations mais aux catégories diverses qu’il tient des discours divers … En Algérie, il tient aux autorités de ce pays, et par la même occasion à la communauté votante des musulmans de France, un discours dénonciateur du génocide colonialiste et il ose affirmer qu’il n’y a pas de culture française, ce qui, conséquemment, dispense les migrants africains du Nord ou d’ailleurs, de s’assimiler ou de s’intégrer à la France . Ce n’est pas, en revanche, ce genre de discours qu’il prononcera dans la cour des Invalides lorsqu’il rend hommage à nos soldats tués au loin, face à leurs familles, devant nos armées, nos militaires. Ou bien lorsque sur les plages du débarquement, ou tel haut-lieu de la Résistance, il exalte le patriotisme français et ses héros … Il fait assaut de lucidité et flatte le courant qui s’oppose à l’impérialisme américain lorsqu’il déclare l’OTAN en état de mort cérébrale, mais n’en a, à ce jour, tiré aucune conséquence, il croit couper l’herbe sous les pieds du populisme souverainiste lorsqu’il constate que l’Europe est au bord du gouffre … Mais il rassurera aussitôt le camp européiste en confirmant la poursuite de sa politique européenne. Il aura des mots émouvants et justes au soir de l’incendie de Notre-Dame, célébrant l’âme immémoriale de la France chrétienne, comme il l’avait fait en allant au Puy du Fou ou à Orléans. Mais il se prêtera à la mascarade des trans et LGBT reçus comme chez eux à l’Elysée, puis il autorisera la PMA. De quoi passer la brosse aux minorités, à la diversité, après avoir donné du grain à moudre aux conservateurs. Des discours divers !
Faut-il croire Marcel Gauchet lorsqu’il conclut que la politique d’Emmanuel Macron, c’est son ambition et, parfois son caprice. C’est l’exercice de Pouvoir et pas davantage ? Ce sont les apparences et, à ce jour, la réalité.
Malraux raconte qu’après une longue nuit de négociation, ponctuée de moult libations, à Moscou, en 1944, De Gaulle avait vu Staline demeuré presque seul poser ses mains puissantes sur une mappemonde et qu’il avait murmuré : « C’est petit le monde ». Macron n’est pas Staline, loin s’en faut. Mais la France est petite pour lui comme le monde l’était pour Staline. L’exercice du Pouvoir dont veut Macron doit donc presque nécessairement prendre la forme d’un leadership international et pour commencer, européen. Telle serait son ambition et donc sa politique – pour lui, confondues. Nombreux sont les observateurs lucides à proposer cette analyse. Dont Marcel Gauchet.
Macron semble ne pas savoir qu’avant d’exercer un leadership international, voire seulement européen, il convient de mettre de l’ordre chez soi, ce qui nous ramène aux affaires qui émaillent et salissent son quinquennat. Sans compter les colères sociales non satisfaites et surtout le défaut de consentement populaire à sa politique aussi bien qu’à sa personne. Il semble ne pas savoir non plus, s’il veut d’un leadership international pour la France et non pas seulement pour lui-même, qu’un pays ne pèse qu’à raison de sa puissance.
Avant de rêver à un leadership international, franco-macronien, faudrait-il encore, que la France soit mobilisée pour d’abord refaire de la force. Dans bien des domaines où elle a perdu pied, s’est délitée. Il ne semble pas que ce soit pour l’heure le souci premier du Chef de l’Etat. ■
© JSF – Peut être repris à condition de citer la source
Intelligent, grand travailleur,charismatique, charmeur, cultivé et beau parleur, mais dépourvu d’épaisseur et d’idées politiques, dites vous;
Depuis de Gaulle nous avons eu des présidents qui étaient issus de partis politiques, qui avaient appris à manier les foules. On s’y était habitué, le peuple et ces présidents étaient arrivé à une entente plus ou moins cordiale.
Cette fois, personne ne comprend, sauf que nous avons un étudiant attardé qui impose avec ses petites colères, ses désirs de pacha du monde. Jeune et beau ne suffit pas pour diriger la France. On ne peut pas avoir la belle gueule de Delon et prétendre imposer ses désirs à tout un peuple.
Un homme intelligent prendrait en compte qu’il a été élu par un très, trop, faible pourcentage d’électeurs et que ces électeurs ne sont pas les gilets jaunes. Nous basculons de la théocratie au théocentrisme. Si on ajoute le fait d’être allé en Algérie cracher sur les tombes des appelés morts pour rien, il ne mérite pas de poursuivre son mandat et le non projet des retraites montre son incapacité a produire du concret. Faut il rappeler qu’il a augmenté ses ministres de soixante dix pour cent, ( un smic) et il cherche a prendre l’argent des retraites des travailleurs de base ,du jamais vu.
Quant les Français en finiront d’être aveugles et individualistes , quant ils auront compris que nous vivons comme dans tous les pays du monde en théocratie et non en démocratie, la présence d’un roi et sa famille, à la tête de la France, leur paraîtra normale.
Merci pour cette analyse documentée dont la conclusion est accablante.
Une correction toutefois : L’intelligence est la faculté du reel. Vous avez montré que Macron en était dépourvu. Il a en revanche de grandes « facultés intellectuelles », ce qui n’est pas du tout pareil.