Par Philippe Mesnard.
Nous vivons des moments passionnants. Le système va-t-il exploser ou se maintenir, évoluer ou revenir à son équilibre dément ?
Cette pandémie est unique par tout ce qu’elle met à nu : les vices de la mondialisation, l’aveuglément des élites humanistes, la crispation idéologique de l’Union européenne, l’incurie française, les mensonges de la technocratie, l’égoïsme des politiques, la fragilité de nos économies, la dictature du sentiment… Car à quoi bon nous faire applaudir des médecins et des infirmières qu’on ne peut pas, qu’on ne sait pas, qu’on ne veut pas équiper ? Pourquoi invoquer sans cesse la science comme boussole quand la même science, ailleurs, indique un nord différent ? Pourquoi avoir nié la crise de longues semaines, de long mois, pour reprocher ensuite aux Français leur inconscience ?
Pour justifier que tout change pour que rien ne change. Voilà Macron, encore une fois, capable de nous expliquer qu’il est l’homme providentiel quand il est clair que lui, ses ministres et leurs conseils ont précipité la France dans une telle ornière qu’on n’imagine pas comment en sortir. Les administrations sont incapables de réagir, elles découragent les bonnes volontés privées qui se manifestent, n’imaginent rien de mieux que d’expédier à la campagne les chômeurs, mettent en place des consignes contradictoires et tatillonnes, qu’une police applique, selon les cas, avec une sévère idiotie (cette femme verbalisée pour être allée abreuver ses chevaux en pleine campagne, sous prétexte que ce n’était pas vital !… pour ne citer que ce cas) ou un laxisme nonpareil, comme à Saint-Denis, où les journalistes suisses du Temps décrivent un territoire qui n’est pas régi par les même règles.
Macron chef de guerre !
Mais on nous assure qu’il y aura un avant et un après et que cet après ressemblera de très près à l’avant : l’État sera plus féroce, les services publics seront encore mieux déréglés, l’Union européenne sera encore plus forte, la France sera encore plus affaiblie, et tout cela est supposé nous assurer que tout est géré à merveille, la merveilleuse Sibeth expliquant imperturbablement que tout est sous contrôle, mieux, que personne n’aurait su mieux faire, à aucun moment. On aurait dû retrouver le sens des frontières, celui de la souveraineté nationale, celui du bien commun, on aurait dû retrouver le sens commun, mais non ! Le président et ses troupes s’agitent dans un univers parallèle où la justice leur garantit qu’ils sont intouchables, où le régime leur promet l’impunité, où l’opposition politique est paralysée par le souvenir de ses insuffisances et incompétences passées, où l’Union européenne est l’horizon du salut. JSF
Et Macron s’agite ! Il explique aux Français qu’ils sont en guerre, qu’il est un chef de guerre, qu’il a la stature des illustres qui ont su se dresser face à l’adversité, qu’on va voir ce qu’on va voir, qu’il prépare une « nouvelle initiative importante » avec Trump ! (en gros, les structures déjà en place vont continuer à se réunir…) et qu’il va adresser à l’Europe un de ses sermons qu’elle a appris à goûter si fort – et qui ne produisent jamais aucun effet. L’Europe n’en peut plus de Macron et de la France, de ce pays qui prétend donner des leçons scientifiques et n’est pas capable de comprendre rapidement que fermer ses frontières, dépister les malades et équiper les autres de masques étaient des solutions si évidentes que tous les pays les appliquaient au fur et à mesure que l’épidémie enflait. L’Europe contemple avec effarement ce jeune coq dressé sur son pays confiné dont il achève de ruiner l’économie pour pouvoir prétendre n’être responsable d’aucun mort.
L’Europe contemple avec inquiétude ce chef d’État qui n’aime ni son pays ni ses compatriotes, qui leur en veut de présenter, depuis bientôt deux ans, le spectacle de leur indiscipline, contrepoint de sa propre incapacité à réformer. L’Europe politique se demande si Macron mesure le caractère aberrant de son ambition européenne, lui qui n’est pas capable d’administrer son pays et n’a toujours pas compris que les Allemands mènent une politique allemande – Merkel a rejeté les “coronabonds” de Macron –, même et surtout à Bruxelles, que les Anglais mènent une politique anglaise, et les Hongrois une politique hongroise, et les Suédois une politique suédoise. Macron n’en a cure. Il avance démasqué, ivre de lui-même et de ses chimères. Qu’importe la France. ■