Par Jean-Christophe Buisson*
Un an après l’incendie de Notre-Dame de Paris, un documentaire retrace les destins de ces autres cathédrales de France ressuscitées après leur destruction.
CHÈRE NOTRE-DAME DE PARIS, il y a bientôt un an, vous vous embrasiez et allumiez chez les Français une quadruple flamme de détresse, de désespoir, de colère et d’impuissance. Comme un présage pour les temps à venir ? Qui sait ?
Depuis cette catastrophe, des ouvriers et des compagnons oeuvrent à votre reconstruction avec une ardeur et une foi qui en rappellent d’autres. Dans un admirable et trop court documentaire (26 minutes), diffusé dans le cadre de la vénérable (70 ans !) émission «Le Jour du Seigneur » (Cathédrales ressuscitées, France 2, dimanche 12 avril, 12 h 20), l’historien Mathieu Lours revient devant la caméra de Julien Leloup sur les martyres passés des cathédrales de Reims, Rouen et Nantes.
Durant la Première Guerre mondiale, 300 obus incendiaires furent tirés sur Notre-Dame de Reims, réduisant l’édifice, témoin du baptême de Clovis et du sacre de plus de 30 rois, à un squelette informe. « Détruisez ce temple, je le rebâtirai en trois jours », proclamait le Christ : il en fallut près de sept mille et l’argent de Rockefeller (entre autres) pour remettre celui de Reims debout, non sans de nombreux et notables aménagements (vitraux de Chagall, charpente refaite en béton armé, etc.).
À Rouen, en 1944, ce sont les bombes anglaises et américaines qui firent choir la voûte, la rosace et les cloches (dont la grosse Jeanne d’Arc) de la cathédrale : douze ans plus tard, le président René Coty assistait à la première messe d’après-guerre dans le sanctuaire restauré. Étrangeté architecturale (sa nef datait du XVe siècle, son transept de 1650 et son choeur était resté roman jusqu’au XIXe !), Saint-Pierre-et-Saint-Paul de Nantes vit, elle, sa charpente s’envoler en fumée lors d’un incendie accidentel en 1972. Trois ans plus tard, le lointain successeur de saint Clair, premier évêque de la ville au Ine siècle, pouvait, en chaire, rassurer son assemblée de chair meurtrie dans une église aux murs désormais aussi blancs que les aubes sur la Loire.
Ces trois récits à valeur d’exemples voire de modèles pour Notre-Dame de Paris sonnent juste. Redonnent espoir. Invitent à la résilience. Rappellent que l’histoire est tragique mais qu’il est toujours possible (et nécessaire) de surmonter les drame& Et instillent opportunément l’idée qu’en reconstruisant nos églises, on ne fait pas qu’oeuvre d’architecte. ■
Post-apostrophant : en complément, relire La Cathédrale de J.-K. Huysmans (Le Livre de Poche), où l’on évoque la cathédrale de Chartres,
qui « n’a cessé de passer par la fournaise » (près de dix fois en six siècles…).
* Source : Figaro magazine, dernière livraison.
Jean Christophe Buisson est écrivain et directeur adjoint du Figaro Magazine. Il présente l’émission hebdomadaire Historiquement show4 et l’émission bimestrielle L’Histoire immédiate où il reçoit pendant plus d’une heure une grande figure intellectuelle française (Régis Debray, Pierre Manent, Jean-Pierre Le Goff, Marcel Gauchet, etc.). Il est également chroniqueur dans l’émission AcTualiTy sur France 2. Son dernier livre, 1917, l’année qui a changé le monde, est paru aux éditions Perrin.
Les cathédrales se relèveront toujours tant que notre foi en Christ sera vivante