Par Jean-Christophe Buisson*
À -force d’être employés à tort et à.travers,
certains mots perdent leur sens. C’était -vrai
du «fascisme », c’est entrain de le devenir pour le « totalitarisme », terme justement né en 1923, juste après l’arrivée de Mussolini au pouvoir, sous la plume d’un journaliste italien dénonçant le système électoral inventé par le Duce pour s’assurer une majorité absolue au Parlement. Le chef fasciste qualifiera ensuite lui-même fièrement son régime de «totalitaire». « Tout pour l’État rien hors de l’État, rien contre l’État » : ce slogan, le communisme en fera aussi son miel, s’appuyant pareillement sur un parti unique assurant le monopole d’une idéologie diffusée par tous les canaux possibles, le contrôle de tous les moyens de production des biens matériels et une terreur de masse.
Or, qu’a-t-on entendu ces jours derniers ? Des historiens autoproclamés (et penchant nettement à gauche) s’insurgeant contre l’excellent documentaire sur le Paris haussmannien présenté sur France 2 par Stéphane Bern et Lorànt Deutsch *, au prétexte qu’ils se seraient « extasiés » devant le « totalitarisme » (sic) du second Empire. L’accusation est grotesque. D’abord en raison de son anachronisme spectaculaire et de l’absence, sous Napoléon III (1852-1870), par définition, des éléments constitutifs du totalitarisme. Ensuite parce que rien n’est caché dans ce documentaire de deux heures sur les tares que notre époque peut trouver au régime impérial : «p leins pouvoirs », « misère épouvantable », « drames humains », «priorité à un Paris sécuritaire », etc. Mais rien non plus n’est occulté de ses bienfaits. Par exemple, la démocratisation des loisirs, la verdisation de la capitale (80 000 arbres plantés, 2 000 hectares d’espaces verts créés), le développement de la pratique du vélo, etc. Et si c’était cela, au fond, qui gênait : 3 millions de téléspectateurs découvrant que le second Empire avait été pionnier dans des initiatives que la gauche revendique comme siennes et originales… un siècle et demi plus tard ? ■
* « Laissez-vous guider. La folle aventure du Paris haussmannien », disponible en replay sur le site France.tv
* Source : Figaro magazine, 9.05.2020.
Jean Christophe Buisson est écrivain et directeur adjoint du Figaro Magazine. Il présente l’émission hebdomadaire Historiquement show4 et l’émission bimestrielle L’Histoire immédiate où il reçoit pendant plus d’une heure une grande figure intellectuelle française (Régis Debray, Pierre Manent, Jean-Pierre Le Goff, Marcel Gauchet, etc.). Il est également chroniqueur dans l’émission AcTualiTy sur France 2. Son dernier livre, 1917, l’année qui a changé le monde, est paru aux éditions Perrin.
Chers amis,
JC Buisson a parfaitement analysé et résumé la situation de notre époque : raccourcis et inculture, réécriture de l’Histoire et leçons de morale. Bref, sans Haussmann, sans Napoleon III comme sans les autres grands Hommes de l’Histoire de notre pays, Paris et la France ne seraient pas ce qu’elles sont aujourd’hui !!!!