Ce soir [hier, mercredi] hommage de la nation à Samuel Paty. Le choix de la Sorbonne est judicieux et l’Élysée s’en est fort bien expliqué. La mission de l’éducation nationale doit ainsi être mise en valeur dans le sens le plus positif, si l’on veut vraiment combattre l’adversaire.
C’est, bien sûr, une excellente idée que d’avoir voulu organiser l’hommage de la nation à Samuel Paty dans la cour d’honneur de la Sorbonne. On peut retenir la communiqué de l’Élysée, qui précise que ce choix a été opéré en accord avec la famille du défunt : « Temple de la connaissance, lieu historique de l’enseignement universitaire français, foyer du génie français, la Sorbonne à travers les siècles a toujours su être une tribune pour l’expression des libertés et des idées, un lieu qui aujourd’hui revêt une dimension symbolique forte. » Comment mieux exprimer le message ? Habituellement, les hommages de la nation se déroulent dans la cour des Invalides, mais la qualité d’enseignant de Samuel Paty devait être honorée dans le lieu symbolique de l’intelligence française. Tant de souvenirs sont attachés à la Sorbonne sur la montagne Sainte-Geneviève, et il est bon que l’on ne limite pas l’évocation aux seules Lumières du XVIIIe siècle. C’est toute le richesse de la pensée, depuis Albert le Grand et Thomas d’Aquin, qui présidera à cette démarche qui suscite une unanimité nationale.
On a beaucoup insisté, comme je le remarquais hier, sur la démarche critique de l’enseignement. Dimension qui doit être prise aussi dans son ampleur positive. L’intelligence, selon la meilleure tradition, n’est pas seulement orientée vers la négativité du jugement, mais elle l’est aussi vers l’étonnement, voire l’admiration face au monde, au mystère de notre condition. Le pire serait de paraître défaitiste, voire nihiliste devant l’adversaire. Je me suis rappelé à ce propos du terrible petit livre de Philippe Muray [1], écrit après la tragédie du 11 septembre 2001 : « Chers djihadistes, nous vous battrons. Et nous vaincrons. Bien évidemment. Parce que nous sommes les plus morts. » À nous de montrer qu’il n’en est rien, et que pour l’avenir il est encore la foi. ■
[1] Philippe Muray, Chers djihadistes…, Mille et une nuits, 2002.
J’apprécie toujours ce qu’écrit Gérard Leclerc; cependant, ici, je suis un peu déçu. La célébration pour honorer l’enseignant décapité, dans cet endroit ô combien symbolique, Gérard Leclerc le souligne à juste raison, offrait cependant un aspect à souligner. Parfaitement organisée avec une noble simplicité solennelle, elle manifestait une absence absolue de toute transcendance, image de notre société contemporaine sécularisée, laïcisée, « athéisée ». Dans la transmission télévisée, même la croix qui surplombe le dôme de la Sorbonne n’était pas filmée…L’athéisme pratique est la norme; on ne fait plus de discours pour en vanter la nécessité rationnelle mais c’est un fait généralisé. Or, « l’homme ne vit pas seulement de pain mais de toute Parole qui sort de la bouche de Dieu ». (Dt) Cette « famine » -là va faire crier bientôt la société entière de désespérance, sous quelle forme? Je ne sais pas. « On ira, titubant d’une mer à l’autre, errant du Nord à l’Est, pour chercher la Parole de Dieu et on ne la trouvera pas » (Am. 8,12). Il faut même lire ce qui précède: c’est notre situation actuelle. Mais bien sûr « les valeurs de la République » apaisent notre faim, n’est-ce pas?
D’accord Hughes Noël