Les Lundis.
Par Louis-Joseph Delanglade*.
Méfions-nous des velléités guerrières du faucon
Il reste encore quelques semaines à tous ceux que l’élection de M. Biden a comblés pour se bercer d’illusions.
En effet, comme le rappelle M. Araud, qui fut ambassadeur de France à Washington de 2014 à 2019, avoir détourné l’élection au profit d’un référendum « moral » contre M. Trump s’est révélé certes habile mais risque bien de gêner la nouvelle administration démocrate (« Good morning America », France Inter*, vendredi 27). Et pas seulement sur la scène intérieure, ajouterons-nous.
L’Amérique serait donc de retour, prête à nous rejouer sa partition quasi messianique de guide des nations. Tout devrait revenir « à la normale », faisant des années Trump une parenthèse historique. Que les relations internationales redeviennent plus policées, plus amiables, bref plus diplomatiques, peut-être. Mais ce n’est que pure forme, ou presque. On commencera, paraît-il, tout de suite, par un retour en fanfare dans l’Accord de Paris sur le Climat, avec à la manoeuvre M. Kerry, dernier secrétaire d’Etat de M. Obama en 2015 lors de la signature dudit accord et désormais, plus pompeusement, « Envoyé présidentiel spécial pour le Climat ». Accord devant lequel il est permis de rester dubitatif, si ce n’est sceptique.
En fait, quel que soit son enthousiasme pour l’international, M. Biden devra faire face à un double handicap : le manque d’intérêt bien connu des citoyens américains pour ce qui se passe ailleurs et surtout l’évolution rapide d’un monde devenu multipolaire, donc moins maîtrisable et plus dangereux. Le dossier brûlant concerne le nucléaire iranien. M. Biden aurait, entre autres velléités, celle de relancer l’accord nucléaire de 2015 avec l’Iran. Cependant, il lui faudra compter avec un petit changement qui a une grande importance, : la constitution d’un axe Tel Aviv – Ryyad contre l’Iran, comme vient de l’illustrer le déplacement du Premier ministre israélien à Naom (Arabie séoudite) et sa déclaration sans ambages à M. Biden selon laquelle il ne faut pas « revenir à l’accord nucléaire de 2015 ». Pour pimenter la chose, on suspecte fortement Israël d’être derrière l’assassinat vendredi 27 à Téhéran de M. Fakhrizadeh, un acteur essentiel du programme nucléaire iranien.
Les moins sectaires de ses adversaires reconnaissent à M. Trump deux mérites en matière de politique étrangère, n’avoir entraîné son pays dans aucun conflit armé et avoir clairement désigné la Chine comme l’ennemi. Ce dernier point l’inscrit malgré tout, certes avec plus de vigueur, dans une continuité certaine avec la présidence de M. Obama et il serait difficile à M. Biden de ne pas continuer à son tour, même avec moins de vigueur.
Sur le premier point en revanche, il est permis d’avoir des doutes, étant donné la personnalité que M. Biden a choisie comme chef de la diplomatie états-unienne. L’heureux élu, M. Blinken, n’est pas un inconnu puisqu’il fut déjà secrétaire d’Etat adjoint en 2015 et 2016. Disons, pour résumer le personnage, que par sa famille (très aisée) et ses études (les meilleures écoles et universités), il représente bien l’establishment démocrate. Ajoutez-y un physique plutôt avantageux, sa parfaite maîtrise du français et même un côté bobo hérité de ses années parisiennes. Bref, tout pour plaire, ou pas.
M. Blinken, c’est aussi un politicien américain qui non seulement a chaudement approuvé les interventions militaires de son pays en Irak et en Libye (avec les conséquences calamiteuses que l’on sait et que nous, Européens, continuons de supporter aujourd’hui) mais encore qui aurait voulu qu’on en fît davantage, par exemple intervenir directement contre M. Assad en Syrie (on a sans doute là évité le pire). C’est à son sujet qu’on a pu entendre dans la bouche de Mme Shalmani l’improbable oxymore de « faucon humanitaire » (LCI, 25 novembre). Faucon, on voit bien pourquoi. Humanitaire, sans doute parce que M. Blinken est forcément pétri de bons sentiments puisqu’il fait partie du « camp du Bien », excellemment croqué par Yvan Rioufol dans Le Figaro (26 novembre).
Méfions-nous des velléités guerrières du faucon, fussent-elles – ou plutôt surtout si elles sont – motivées par un humanitarisme forcément suspect. Cet éventuel retour à une diplomatie fondée sur le mélange des genres ne présage rien de bon. ■
* Certains lecteurs se sont étonnés de nous voir citer de temps à autre des propos tenus à cette antenne. Rappelons ici que cette chaîne publique, et notamment sa « matinale », est la plus écoutée.
* Agrégé de Lettres Modernes.
Retrouvez les Lundis précédents de Louis-Joseph Delanglade.
© JSF – Peut être repris à condition de citer la source
JOE BIDEN sera peut-être pour la grand public, le futur président des Etats Unis, mais en réalité, je pense que ce sera un 3ème mandat OBAMA ou le 1er mandat de K HARRIS. DE e plus sauf la parenthèse médiocre de Georges W BUSH: 2001/2009, ce sont toujours les Démocrates qui ont déclenché les guerres, les Républicains étant plutôt isolationnistes. Enfin il ne sera qu’un tigre de papier pour la Chine , et un adversaire peu dangereux pour la Russie.