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Par Gérard POL
Cette énième visite du maréchal Al Sissi à Paris (7 décembre 2020) s’est faite dans un contexte renouvelé par le néo-expansionnisme ottoman en Méditerranée, toujours plus agressif, spécialement envers la France, et par nos engagements intérieurs et extérieurs contre la menace multiforme du terrorisme islamique. Malgré les habituels aboyeurs Emmanuel Macron a fait savoir que la coopération franco-égyptienne ne pouvait dépendre de la question des Droits de l’Homme… Retour sur une visite précédente (novembre 2017) et sur quelques constantes égyptiennes. GP
Article publié le 1er novembre 2017 – Réactualisé le 11 janvier 2019 et le 9 décembre 2020
Le maréchal Sissi qui a sauvé l’Egypte d’une dictature islamique et se trouve être notre allié contre le terrorisme, a quitté Paris après trois jours de critiques médiatiques incessantes, universelles, fatigantes par leur uniformité, leur répétitivité et finalement leur sottise. Une autre dictature en quelque sorte qui ne dit pas son nom et dont pour l’heure personne ne nous a sauvés.
Les reproches faits à Sissi arrivant à Paris et à Macron l’y recevant, sont parfaitement habituels, d’une désolante uniformité, et dans un langage mécanisé : il a renversé un président démocratiquement élu, ce qui est inadmissible, fût-il un féroce islamiste, a rétabli une dictature militaire, viole les droits de l’homme, muselle et pourchasse l’opposition, emprisonne et torture, etc. Bref un « dictateur implacable » avec qui la France ne devrait pas parler. Ou auquel, au moins, elle devrait incontinent faire la morale. Et, de fait, celle des ONG et des journalistes.
Sissi a répondu aux cris des opposants qu’il a quant à lui à gouverner un peuple de cent millions d’âmes dans une région troublée et un contexte difficile. Il a rappelé en prime que la démocratie de type européo-américain n’est pas nécessairement exportable partout. En tout cas pas en Egypte.
Emmanuel Macron a déclaré de son côté qu’il n’aime pas que d’autres chefs d’Etat lui fassent la leçon et n’en donne pas non plus aux autres, ajoutant même – puisse-t-il s’en souvenir en toutes circonstances – qu’il croit à la souveraineté des nations. Saluons !
A l’époque où fut déclenché le psychodrame des prétendus printemps arabes, amplement suscités, orchestrés et entretenus de l’étranger, espoir rebattu des idéologues européens, lorsqu’en Egypte Moubarak eut été renversé au nom de ce même printemps, nous savions ici qu’il n’existe en Egypte que deux pouvoirs, deux forces organisées : l’armée et les frères musulmans, à quoi ne répond, selon l’expression ancienne de Nasser lui-même, que « l’apathie profonde » du peuple égyptien. Une démocratie à l’occidentale n’y tiendrait pas longtemps. A Paris, pourtant, on ne laissait pas d’en rêver et même d’y travailler. Nous pensions, nous, qu’il n’y aurait pas place en Egypte pour des partis, des élus, encore moins pour un régime de type démocratique à l’européenne. Ce serait l’armée ou les frères musulmans. Ce sera de fait, d’abord ces derniers, sous la présidence Morsi, qui jugea Moubarak et à travers lui le régime militaire antérieur provisoirement déchu, puis ce sera l’armée, reprenant heureusement la main, après que Morsi eut commencé d’installer en Egypte une dictature islamique. On oublie sa férocité aujourd’hui à Paris.
Des deux forces organisées existant en Egypte, l’armée, depuis la chute du roi Farouk en 1952, et même avant, était et reste la plus puissante. C’est elle qui avait mis fin à la monarchie par le coup d’Etat audacieux d’un groupe de jeunes officiers, nationalistes arabes, parmi lesquels Gamal Abdel Nasser. Ils avaient mis fin, en même temps, à la présence anglaise, objet de toute leur hostilité. Et c’est depuis lors l’armée qui a toujours gouverné l’Egypte. Après le départ de Farouk, le général Néguib, avait assuré un interrègne d’où Nasser émergea assez vite. Après la mort de ce dernier et l’échec de sa politique panarabe, l’Egypte n’a jamais cessé d’être gouvernée par l’armée : Anouar el Sadate, Hosni Moubarak étaient des militaires comme l’est Al Sissi.
L’armée égyptienne est d’abord nationaliste. Ses membres sont très généralement musulmans, mais politiquement d’esprit laïque, dans la tradition nasserienne. Ils ont les islamistes, a fortiori s’ils sont terroristes, en détestation. Ils les combattent en effet implacablement.
L’actuel régime du président Sissi est de ce simple fait objectivement allié de la France. Qu’il ait pour elle une certaine sympathie, qu’il lui confie d’importants contrats ne vient s’ajouter que par surcroît.
Sont-ce là des raisons pour l’insulter et lui faire orgueilleusement la leçon lorsqu’il est notre hôte ? [Les deux photos ci-dessus du 7.12.2020]
On ne dira jamais assez le mal que les ONG, la caste médiatique, et certains trublions intrigants tel BHL, font à la France. ■
En deux mots, réflexion sur l’actualité
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