Article de France info Auvergne Rhône-Alpes que nous reprenons ici tel quel sans besoin de commentaire. Il se suffit à soi-même.
Un collège de Lyon en grève pour soutenir un professeur, victime d’agression verbale
Un professeur, victime d’une agression verbale de la part d’un parent d’élèves, se voit contraint de changer d’établissement. « Un traitement indigne et scandaleux », estiment ses collègues du collège des Battières à Lyon. Ils ont observé un mouvement de grève afin d’interpeller le Rectorat.
Lundi 9 novembre 2020, aux portes du collège Les Battières dans le 5e arrondissement de Lyon, un professeur est pris à partie par un parent d’élève sur le contenu de ses cours. Face au refus de la famille de toute conciliation, l’enseignant porte plainte pour agression et diffamation. Et depuis, il est en arrêt maladie. Ce lundi 4 janvier 2021, le professeur d’histoire-géo n’est pas revenu dans son établissement. « Il doit partir par la petite porte, en catimini« , « c’est lui, la victime, qui doit changer d’établissement » expliquent, indignés, ses collègues enseignants, en grève pour le soutenir.
L’institution pointée du doigt
La mobilisation s’est organisée très rapidement ce 4 janvier. À 8h, les enseignants se réunissent pour décider des modalités de leur mobilisation. Tous se mettent en grève, aucun cours ne sera assuré au sein du collège. Un rassemblement est également prévu en début d’après-midi devant le Rectorat. Il faut dire que l’autorité académique est directement incriminée pour sa gestion de l’affaire. L’agression verbale intervient une semaine après l’hommage rendu dans tous les établissements scolaires à Samuel Paty, assassiné le 16 octobre 2020 à Conflans-Sainte-Honorine. « On a attendu une réaction du Rectorat, mais il n’y a rien eu. Le 15 novembre, la fille de ce même parent a ramené une arme avec elle, un couteau« . L’élève a été exclue une journée, sans passer devant le conseil de discipline. « Et le Rectorat n’a toujours pas réagi« .
L’institution nous met en avant, nous les professeurs, pour traiter ces questions de laïcité avec les enfants qui sont très complexes. Et à côté de ça, dans le fond, quand il y a des incidents, elle ne nous soutient pas. Si les parents d’élèves commencent à penser qu’ils peuvent s’introduire dans notre enseignement, nous remettre en question profondément, y compris sur des points de programme, on n’est plus en sécurité dans le cadre de nos cours.
La communauté éducative du collège Les Battières affiche sa colère. Leur collègue, victime de l’agression verbale, envisage de partir. « Nous demandons une convocation des parents en bonne et due forme, et pas seulement une simple invitation par le Rectorat. Invitation qui n’a pas été honorée. Et deuxièmement, dans un souci d’apaisement, c’est de déplacer les enfants dans un autre établissement« . Scandalisés, les enseignants estiment que leur collègue est traité de manière indigne.
« Pas de vague dans l’Education nationale »
Pour la communauté éducative du collège lyonnais, l’incident aurait pu être traité bien plus rapidement par le Rectorat. N’aurait pas du prendre une telle ampleur, si l’institution avait réagi.
Il y a une contradiction majeure entre l’hommage national rendu à Samuel Paty, les injonctions que l’on a d’organiser une journée de la laïcité, et l’absence de réaction du Rectorat face à cet événement.
Indignation, sentiment d’insécurité. Les réactions sont vives chez ces enseignants, qui craignent de voir perdurer la problématique soulevée par l’assassinat de Samuel Paty : « le fait qu’un parent d’élève puisse être intrusif quant au contenu de nos cours, on va être obligé de s’auto-censurer« . Et l’annonce du départ de l’enseignant visé par un parent d’élève est d’autant plus mal vécu, que celui-ci « a fait énormément pour des enfants en difficulté« . Il s’était « courageusement » investi dans l’organisation de la journée d’hommage du 2 novembre, un travail reconnu par sa hiérarchie. « 15 jours plus tard, quand il est victime d’une agression, c’est lui qui doit partir par la petite porte, en catimini. C’est scandaleux« .
L’enseignant qui souhaite garder l’anonymat, s’est rendu au Rectorat ce lundi 4 janvier, pour voir les modalités d’accompagnement possibles pour une reconversion. Professeur d’histoire-géographie depuis 17 ans, celui-ci dit « ne plus pouvoir exercer dans ces conditions« . Faute de se sentir soutenu et accompagné par les services des ressources humaines après son agression, il est décidé « à partir ». L’enseignant va terminer l’année scolaire, comme remplaçant dans l’académie de Lyon. Il parle surtout de changer de métier, de devenir cuisinier dans la restauration collective, « afin de nourrir non plus les cerveaux, mais les ventres« .
La grève va se poursuivre mardi 5 janvier au sein du collège. Une délégation d’enseignants des Battières sera reçue en fin d’après-midi au Rectorat. ■