Philippe Conrad met régulièrement en ligne, sur les réseaux sociaux, de brèves notes toujours particulièrement intéressantes en matière d’Histoire et d’édition. Il évoque ici la mort de Jacques Bainville en reprenant un texte concis survolant la vie et l’œuvre de Bainville. Nos lecteurs liront cette note avec intérêt.
Jacques Pierre Bainville, journaliste, historien et académicien français vient au monde le 9 février 1879 à Vincennes et meurt le 9 février 1936 à Paris.[Illustration : François Léger, représentant alors les étudiants d’Action Française, remet à Bainville son épée d’académicien).
Lorsqu’il en arriva à l’épisode de Jeanne d’Arc, dans la rédaction de son Histoire de France, il écrivit : « D’un consentement universel, il n’est dans aucun temps, dans aucun pays, aussi pure héroïne, récit plus merveilleux. Nul ne pourra l’entendre que ses yeux ne se remplissent de larmes… «
Après ses études secondaires, un voyage en Allemagne donne à Bainville l’occasion de découvrir la puissance de l’Empire allemand. Il se demande si la République française est suffisamment forte pour faire face à un si redoutable voisin. Peu après son retour, il entre en relation avec Charles Maurras dont il devient le disciple et l’ami. Il débute alors dans le journalisme à la Gazette de France et publie Louis II de Bavière (1900). Tout en continuant à s’intéresser aux affaires allemandes (Bismarck et la France paraît en 1907), il assume la responsabilité de diverses rubriques de presse.
Lorsque L’Action française devient un quotidien en 1908, Charles Maurras lui confie le secteur de la politique étrangère, que Bainville détiendra jusqu’à sa mort. Pendant la guerre, il donne, sur le thème de l’ennemi héréditaire, un exposé cursif des relations franco-allemandes, Histoire de deux peuples (1915), puis, en 1916, il est chargé d’une mission officielle en Russie d’où il rentre très pessimiste. Peu après, il évoque avec ironie les engouements germanophiles de certains milieux intellectuels et politiques français du XIXe siècle dans l’Histoire de trois générations (1918), qui demeure un de ses meilleurs livres.
La paix revenue, il déplore le maintien de l’unité allemande dans Les Conséquences politiques de la paix (1920) et marque les points de la carte sur lesquels ne manquera pas de s’exercer la poussée germanique qui fera sauter l’œuvre des traités.
En 1924 paraît l’Histoire de France qui connaît un énorme succès de librairie.
Bainville a désormais acquis l’audience d’un vaste public. Il est, depuis 1920, directeur de la Revue universelle et écrit régulièrement, non seulement dans L’Action française, mais dans Le Petit Parisien, La Liberté, Candide, etc. Il publie Jaco et Lori (1927), Napoléon (1931) et, en 1935, La Troisième République. Il est élu la même année à l’Académie française.
Historien politique, Bainville … cherche à éclairer les faits d’une lumière qui permette de mieux comprendre leur enchaînement. Observateur de son temps, il excelle à déceler les conséquences prévisibles du jeu des puissances et des illusions des hommes sans jamais faire mystère de ses options fondamentales.
Les recueils de ses articles publiés après sa mort se lisent toujours avec intérêt : La Russie et la barrière de l’Est (1937), L’Angleterre et l’Empire britannique (1938), L’Allemagne (2 vol., 1939-1940). ■
François LÉGER
((Atteint d’un cancer qui ne lui laissait guère d’espoir, Jacques Bainville fut élu à l’Académie française par 20 voix, le 28 mars 1935, au fauteuil de Raymond Poincaré.
Il fut reçu quelques semaines avant sa mort par Maurice Donnay, le 7 novembre 1935.)