Par Gérard Leclerc.
« Le débat intellectuel en France : il ne s’agit plus d’échanger des arguments mais de réduire l’adversaire au silence. »
Deux livres viennent de paraître écrits l’un par un collaborateur du Monde, l’autre par une collaboratrice du Figaro qui partent d’un même constat. Le débat intellectuel en France est presque devenu impossible parce qu’il ne s’agit plus d’échanger des arguments mais de réduire l’adversaire au silence. Un retour à la guerre froide ?
Je n’ai pas encore lu le nouvel essai de Jean Birnbaum, qui dirige Le Monde des livres, mais son sujet m’intéresse au plus haut point. Il s’agit de la nuance, plus exactement du « courage de la nuance ». Non, ce n’est pas une abstraction, même s’il est permis de disserter philosophiquement à son propos, comme on disserterait sur l’ordre, le désordre, le progrès, la paix, que sais-je… Non, il s’agit d’une question qui nous plonge en pleine actualité : « Au-delà même de Twitter ou de Facebook, écrit Jean Birnbaum, le champ intellectuel ou politique se confond avec un champ de bataille où tous les coups sont permis Partout de féroces prêcheurs préfèrent attiser les haines, plutôt qu’éclairer les esprits. » Je ne puis qu’approuver le constat, en attendant de m’instruire sur les remèdes propres à reciviliser le champ intellectuel.
La cessation de parution de la revue Le Débat correspondait tout à fait à ce constat. Le Débat, ce titre était significatif d’une volonté de discussion entre gens de bonne compagnie. Si Pierre Nora et Marcel Gauchet ont jeté l’éponge, c’est qu’ils n’étaient plus en mesure, comme en 1980, de réunir des gens de bonne compagnie capables d’échanger sereinement des arguments. Faut-il dire que le combat a remplacé le débat ? Peut-être, à ceci près qu’un combat peut être loyal et laisser place à un affrontement ordonné. Or, il ne s’agit plus de cela, dès lors qu’il faut réduire l’adversaire au silence. C’est aussi le constat opéré par Eugénie Bastié qui publie un essai intitulé La guerre des idées. L’embellie d’il y a a quarante ans s’est dissipée.
J’avais moi-même fait allusion au retour du climat intellectuel de l’après-guerre, alors que le communisme n’envisageait l’espace de la réflexion que sur le mode d’une lutte inexpiable. Nous y sommes retournés. ■
» La nuance seule fiance… »
Le problème de fond est cependant que nous devons constater , malheureusement , que nous sommes de moins en moins d’accord sur les choses essentielles comme le respect de la vie ou des biens etc …Nous manquons de plus en plus de bien commun . Et il est très difficile de retrouver puisque domine l’individualisme qui est la négation du commun .
pardon : » de le retrouver » .