Le franc-parler québécois fait en quelque sorte exploser, dans ce débat de 2018, les codes du 12/14 de France Inter où officie Ali Baddou, l’ex-jeune franco-marocain dont l’importante famille regorge de ministres ou de conseillers des souverains chérifiens, l’un de ses grands-pères ayant été directeur du protocole du roi Mohamed V. Nous lisons sur Wikipédia qu’Ali Baddou a été élève du Lycée Henri-IV, comme Mazarine Pingeot dont il a été d’ailleurs quelques années le compagnon. Il a été reçu à l’agrégation de philosophie à 23 ans, a enseigné à Science Po où il a eu pour étudiant le jeune Emmanuel Macron, , a collaboré avec Jack Lang au sein du cabinet du ministre de l’Éducation nationale dont il a été conseiller technique, chargé des discours et des questions de discrimination. Bref tout un monde ! Un petit monde qui n’est pas celui du Français normal et qui n’a guère changé lorsqu’Ali Baddou est devenu animateur de radio et de télévision aux côtés de Patrick Cohen, Nicolas Demorand ou Léa Salamé, issue, elle aussi, d’une puissante famille, franco-libanaise cette fois, et compagne du très socialiste et très humanitaire Raphaël Glucksmann, le fils du nouveau philosophe, bien connu jadis. Petit détail pour l’anecdote : Ali Baddou a bénéficié dans ses jeunes années d’un trafic de fraude au permis de conduire, consistant tout bêtement à payer pour l’obtenir sans avoir à le passer. Il a, certes, regretté la chose. Fut-elle la seule du genre ? Allah est grand, il le sait.
A ce débat (de 2018) sur France Inter, participaient Natacha Polony, dont la pensée est devenue complexe c’est à dire, – en l’espèce – tortueuse, l’expression difficultueuse et l’enchaînement des phrases alambiqué (Marianne oblige ?) et Gilles Finchelstein du think-tank Terra Nova.
Tout un monde, donc, face auquel Mathieu Bock-Côté, le sociologue québécois – et non pas canadien – que nos lecteurs connaissent fort bien, puisque nous avons suivi – bien avant qu’il soit devenu très connu – ses écrits, ses déclarations bouillonnantes et sa pensée d’une redoutable puissance intellectuelle. Il faut et il suffit de l’écouter ici, dans ce débat houleux qu’il a largement dominé malgré les ruses de Sioux d’Ali Baddou pour tenter de le prendre en défaut.
Un grand moment d’affrontement dialectique où Mathieu Bock-Côté est, une fois de plus, très proche de notre école de pensée. ■
Son dernier livre
La Révolution racialiste et autres virus idéologiques, de Mathieu Bock-Côté, Presses de la Cité, 240 p., 20 €.
Je n’adhère pas complètement à votre portrait de N. Polony. Elle incline, certes, comme j’ai pu le relever ailleurs, vers les phrases à rallonges (qui consistent souvent à s’écouter parler, entr’autres visées) mais elle dit quelque chose. En face, le représentant de Terra Nova, comme on peut s’y attendre, s’efforce de dominer – neutraliser – le débat en pontifiant outrageusement dans le creux désincarné. Ali Badou me semble plus en retrait (son travail étant assuré par le précédent). M. Bock-Côté est impeccable. Espérons qu’il y ait des auditeurs conscients et attentifs. Espérons aussi que l’artillerie médiatique (et sondagière) anti-électorale s’enraye. Ce qui ne changera pas de sitôt, c’est le détournement de l’expression populaire tel que porté à son extrême par les modifications constitutionnelles de M. Chirac.
Indulgence pour Natacha Polony ? Oui et non. Elle a incarné un esprit de liberté de penser, de parler vrai qu’elle a un peu abandonné au profit d’un intellectualisme plus consensuel et un peu mou. En gros : dommage parce que « pourrait mieux faire ». Plus simple et plus vrai. Comme son mari, d’ailleurs, Périco-Legasse qui est super.
Le gars de Terra Nova, passons. On est d’accord. Ali Baddou, idem.
MBC, c’est un don du ciel du Québec.