JSF reprend les différents entretiens que Patrick Buisson a donnés à la suite de la parution de son dernier livre, tout simplement parce qu’il mène une analyse parfaitement contre-révolutionnaire de la situation actuelle de la France et – au sens conforme à sa Tradition – de l’Occident. Ce sont des analyses particulièrement intéressantes pour notre école de pensée confrontée à la modernité ou postmodernité. (À suivre).
Dans son livre «La Fin d’un monde» (Éd. Albin Michel), Patrick Buisson décrit le processus d’autodestruction entrepris par la société française à partir des années 60. Relativisme moral et culturel, mort du patriarcat, avènement d’une société consumériste obsédée par le plaisir : l’historien n’augure rien de moins qu’un «changement de civilisation».
«C’était mieux avant», lance Patrick Buisson. Pour l’historien et politologue, la pandémie de Covid-19 est une nouvelle étape dans un processus de «décivilisation» entamé dans les années 60 en France. Le point de non-retour est-il atteint?
«Dans vingt ou trente ans, les historiens seront frappés par le sentiment de panique qui s’est emparé de la population» avec l’épidémie de Covid-19, lance Patrick Buisson devant les caméras de Sputnik. La raison de cette «panique» morale et existentielle? «La sortie du religieux» et «la perte du sacré»
Il évoque “l’empire du vide” dû à la disparition du catholicisme suite à Vatican II. L’Eglise eu tord d’abaisser son degré de sacralité…elle s’est banalisée. La fin du Concile a entraîné “le collapsus de la croyance chrétienne”, le recul de la croyance dans l’au-delà, dans la vie éternelle.
Alors que Mai 68 marque la mort symbolique du patriarcat, le concile Vatican II qui se clôt en 1965 est pour lui le coup de grâce d’un «sacré massacré»: l’Église catholique cesse d’incarner cette autorité verticale tournée vers Dieu pour «se rendre au monde» et tenter d’attraper en marche un humanisme édulcoré.
«La modernité s’est retrouvée confrontée à un événement régressif, un épisode quasi moyenâgeux auquel elle ne s’attendait pas. Tout le discours technoscientifique sur le progrès émancipateur a été pris à revers! On s’est retrouvé confronté à un événement face auquel il n’y avait plus de grand pourvoyeur de sens. Nous sommes dans l’empire du vide».
C’est justement notre rapport collectif à la mort qui a le plus évolué au cours des dernières décennies, veut croire Buisson. Alors que le sexe était «le grand tabou du XIXe siècle», il a été remplacé au XXe par celui de la mort, avance-t-il.
«Il n’y a plus d’eschatologie qui donne une signification à la mort: le mort n’a plus de sens si l’on ne croit plus dans l’au-delà chrétien. Étant privée de sens, on l’escamote; ce que le sociologue américain Gorer appelle la “pornographie de la mort”: c’est devenu obscène de mourir. Ce spectacle doit donc être dissimulé».
Ce qui est étonnant, surprenant, c’est de constater que ce sont des laïcs, athées ou catholiques, comme ONFRAY, de VILLIERS, ZEMMOUR, HOUELLEBECQ qui dressent ce désolant tableau d’une nation appelée à être remplacée si elle ne revient pas “aux murs porteurs de notre civilisation”, c’est-à-dire à la religion de nos pères. ■
C’est à l’historien royaliste, Philippe Ariès que nous devons la conception de la mort comme nouvelle pornographie.