PAR MATHIEU BOCK-CÔTÉ.
Cette tribune est parue dans Le Figaro d’aujourd’hui 5 juin. Cette inquisition nou dit Le Figaro en préambule vient d’atteindre son sommet aux États-Unis avec l’université Princeton qui s’en prend au « racisme systémique » en abolissant, dans son département d’études classiques, l’obligation de maîtriser, et d’étudier, le grec et le latin.
Derrière cette guerre contre les discriminations se cache en fait une guerre contre la culture. Les études classiques doivent y passer et le grec et le latin être sacrifiés
Plus rien ne résiste au concept de «racisme systémique». Ses promoteurs parviennent à trouver sa trace dans les moindres replis de l’organisation sociale. Toutes les institutions, même les plus improbables, sont appelées à s’y soumettre et à s’en reconnaître coupables, à travers un rituel public où chacun raconte le moment de sa prise de conscience et annonce un grand programme pour s’arracher à sa logique et à la structure sociale dans laquelle il serait encastré.
Ainsi, ces derniers jours, on apprenait que l’Association des diététistes du Canada s’accusait de «racisme systémique» et annonçait vouloir réviser sa pratique professionnelle à la lumière de l’antiracisme révolutionnaire de Ibram X. Kendi. Les recommandations alimentaires des diététistes n’étant pas adaptées aux populations nouvelles s’étant installées au Canada au fil des dernières années, elles seraient donc discriminatoires et systémiquement racistes. Il fallait y penser.
Quelques jours plus tard, Justin Trudeau, le premier ministre canadien, a annoncé un programme de prêts réservé aux entrepreneurs noirs, en faisant ici de la discrimination raciale un principe explicite, revendiqué, sous le signe du progrès et de l’inclusion. Autrement dit, selon la couleur de votre peau, vous aurez plus ou moins de chance de bénéficier des prêts gouvernementaux. C’est seulement ainsi que sera vaincu le «racisme systémique» apparemment inscrit dans la structure même de la fédération canadienne.
On se rappellera aussi qu’en mai, la ville de Hamilton, en Ontario, a décidé, dans la lutte contre le Covid-19, de prioriser la vaccination des populations «racisées», encore une fois, au nom de la lutte contre le «racisme systémique» pour enfin renverser la «suprématie blanche», qui serait le véritable fondement des sociétés occidentales. Ce narratif, comme on dit aujourd’hui, peut s’appliquer à n’importe quelle situation, comme s’il avait une portée universelle.
Mais cette inquisition vient d’atteindre toutefois un sommet aux États-Unis avec la volonté de l’université Princeton de s’en prendre au «racisme systémique» en abolissant, dans son département d’études classiques, l’obligation de maîtriser, et même d’étudier, le grec et le latin. Cette obligation serait discriminatoire. Traduisons: pour ouvrir grandes les portes des études classiques, il faut désormais réduire drastiquement les exigences qui y étaient associées. L’excellence n’est plus qu’un résidu aristocratique à pulvériser, au nom de la démocratisation du savoir, qui justifie tous les massacres.
Sans surprise, Princeton justifie cette réforme au nom des événements ayant secoué les États-Unis suite à la mort tragique de George Floyd. Encore une fois, cette dernière est traitée à la manière d’une révélation religieuse, dévoilant l’intime nature d’une civilisation qui devrait désormais se repentir pour renaître, lavée enfin de son péché originel colonial. Ceux qui l’évoquent dans des formules psalmodiées ne sont pas loin de transformer son malheur en sacrifice christique pour qu’enfin s’affaisse le «racisme systémique».
Mais derrière cette guerre contre les discriminations se cache en fait une guerre contre la culture. En dissociant les études classiques des langues anciennes, comme s’il s’agissait de vieilles béquilles ou de colifichets discriminatoires, c’est aux sources mêmes de la civilisation occidentale qu’on s’en prend. C’est ce qu’avait reconnu Dan-el Padilla Peralta, qui enseigne l’histoire antique à Princeton et qui soutenait, il y a quelques mois, dans le New York Times qu’il fallait en finir avec son champ d’études pour en finir avec la «suprématie blanche» – à tout le moins, il fallait l’affranchir pour de bon de la «blanchité». Autrement, on détruira la civilisation occidentale en détruisant ses fondements, ce qui, techniquement, n’est pas si mal vu. 1492 ne suffit plus: il faut toujours remonter plus loin pour retrouver le péché originel de la civilisation maudite.
Allan Bloom l’avait noté parmi les premiers, ce sont les institutions censées conserver la culture et la garder vivante qui aujourd’hui, l’annihilent et l’empoisonnent. L’héritage qui devait être enrichi y est répudié, presque maudit, déconstruit par des militants qui n’ont comme culture que leur idéologie. C’est une authentique névrose raciale qui s’empare des sociétés occidentales, désormais traversée par le désir de s’anéantir, comme si leur disparition pouvait rédimer l’humanité, et lui permettre d’enfin de se délivrer du mal, associé à la figure luciférienne de l’homme blanc. Si les études classiques doivent y passer et le grec et le latin sacrifiés, c’est pour effacer jusqu’à ses premières traces, pour recouvrir ses origines du mythe d’une grande noirceur, qui le condamnera à jamais. ■
Mathieu Bock-Côté
Mathieu Bock-Côté est docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et chroniqueur au Journal de Montréal et à Radio-Canada. Ses travaux portent principalement sur le multiculturalisme, les mutations de la démocratie contemporaine et la question nationale québécoise. Il est l’auteur d’Exercices politiques (éd. VLB, 2013), de Fin de cycle: aux origines du malaise politique québécois (éd. Boréal, 2012) et de La dénationalisation tranquille (éd. Boréal, 2007). Ses derniers livres : Le multiculturalisme comme religion politique, aux éditions du Cerf [2016] – le Le Nouveau Régime (Boréal, 2017) – Et La Révolution racialiste et autres virus idéologiques, Presses de la Cité, avril 2021, 240 p., 20 €.
Sélection photos © JSF
Les prétendues élites des sociétés occidentales sont animées par une véritable pulsion de mort. Nous allons voir la montée en Europe (puisque celle-ci importe avec enthousiasme les pathologies intellectuelles en provenance des USA) d’un nouveau racisme, totalement décomplexé, qui va s’en prendre au blancs. À la fin des années soixante, la gauchiste américaine Susan Sontag disait déjà dans un article retentissant que la race blanche était « le cancer de l’humanité ». Propos ultra-minoritaire à l’époque mais qui aujourd’hui fait florès dans les milieux racisés et gauchistes. Aux USA, ces intellectuels politiquement corrects considèrent qu’une caissière blanche à Walmart payée 1200 $ par mois bénéficie d’un « privilège blanc » alors qu’une grande bourgeoise noire, avocate ou travaillant dans les médias comme la richissime Oprah Winfrey est une « dominée ». C’est à vous faire regretter la vieille idéologie marxiste de la lutte des classes. Les USA nous ont certes envoyé leurs GI’s pour nous libérer en 44 mais depuis ils nous envoient surtout leurs miasmes, la sous-culture adolescente du rock, l’idéologie du flower power et ses modèles de comportements jeunes totalement avachis, le consumérisme débridé, et aujourd’hui, cette peste du politiquement correct, et pire encore l’idéologie de la cancel culture. Une nouvelle barbarie est à nos portes.
Pour Princeton , c’est très simple : il suffit aux étudiants de ne pas s’ y inscrire entraînant une perte de rentrée financière pour cette université qui n’a qu’ à « couler » .
Ces militants de la cancel culture, pour reprendre cette horrible expression médiatique sont les représentants de cette dictature de la petite bourgeoisie progressiste dont Patrick Buisson, dans son dernier ouvrage, la fin d’un monde, a brillamment reconstitué la genèse. Hostile au début d’idées, réclamant la censure des propos qui lui déplaisent, persuadée de détenir le monopole du Vrai, du Bien et du Juste, maniant la menace de procès au lieu d’arguments, elle détient une hégémonie de fait par l’intermédiaire de tout un réseau d’intellectuels, de demi-intellectuels d’une cléricature médiatique dont les journalistes des deux torchons de référence le Monde et Libération sont les plus parfaits représentants. Michel Onfray dans son ouvrage la nef des fous a pointé quelques manifestations de ce progressisme halluciné, comme lorsque Libération fait l’éloge de la zoophilie et de la coprophilie comme signes de progressisme. Je n’invente rien, il est facile de vérifier, Onfray donne la référence des articles. Comme le fait remarquer Patrick Buisson, il est triste de voir l’Église, depuis Vatican II rejoindre ce camp du progressisme, position qui a d’ailleurs hâté la déchristianisation de notre société, Buisson le montre avec pertinence. Courtisanerie à l’égard de l’islam, culte du Migrant élevé à la hauteur d’une nouvelle divinité, droitsdelhommisme c’est la nouvelle vulgate de ce qui fut jadis la papauté. Nous assistons bien à la fin d’un monde, dont la petite bourgeoisie progressiste est impatiente d’effacer les dernières traces. Bienvenue dans le monde merveilleux de l’individualisme hédoniste, du consumérisme hébété, de promotion des pathologies sexuelles. Nous entrons dans un monde qui est l’écho du Bas Empire.
@ Jean de Maistre
Cher Monsieur et Ami,
Disons simplement simplement les choses : nous sommes très heureux de vous retrouver ici ce matin ; de vous lire, de prendre connaissance des deux remarquables commentaires – ils le sont toujours – que vous avez postés il y a quelques quarts d’heure.
Merci donc. Ne nous manquez pas !
Eh ! bien, nous allons dans le mur
Je ne reconnais plus mon pays, je ne reconnais plus notre culture !
Cette » culture » américaine est un poison, attention danger de mort.
Un grand merci à Matthieu Bock-Côté pour la richesse et la pertinence de ses travaux courageux ! Il appartient à ces intellectuels lanceurs d’alerte tellement précieux .
Les nations européennes n’ont non seulement pas à rougir d’être les héritières d’une magnifique culture gréco-latine , mais doivent bien au contraire la glorifier envers et contre tout
Cette cancel culture , outre le fait qu’elle soit une insulte à l’intelligence la plus élémentaire , est une immonde escroquerie , visant à piétiner la civilisation occidentale via une entreprise de rééducation culturelle initiée par le monde anglo-saxon , dont nous sommes nombreux à nous sentir décidément de plus en plus éloignés .
Là aussi , il importe que nous sortions de la léthargie pour résister de toutes les façons à cette idéologie aussi malfaisante que dégradante et méprisable .
Cordialement
Un autre exemple de ce progressisme halluciné. Ci-après, un extrait d’un article du Figaro de ce jour. D’un côté on nous bassine avec l’idéologie du vivre ensemble, mais en même temps (le fameux en même temps macédonien) on ne cesse de catégoriser les personnes en suggérant qu’on ne peut vivre qu’avec ceux qui vous sont semblables, dans un face à face narcissique.
» La polémique des réunions en non-mixité rebondit au rayon cycles. Vendredi 4 juin, Aurélien Véron, élu d’opposition au Conseil de Paris découvre dans l’agenda «QueFaire.Paris», administré et géré par la municipalité, l’existence de l’atelier vélo «No’Mec Anique». Cette permanence nocturne, organisée une fois par mois dans le 11e arrondissement par l’association La Cycklette, se déroule «en mixité choisie (femmes, personnes trans, personnes non binaires), pour faire de la mécanique dans un espace libéré des rapports de domination genrés.» »
Il faut dire qu’au conseil municipal ce Paris il y a cette lesbienne fanatique appartenant à la secte EELV et qui affirme refuser de lire des ouvrages écrits par des hommes, d’écouter de la musique composée par des hommes etc.