Par Stéphane Blanchonnet.
Nul n’ignore à l’AF, le jugement élogieux porté par Proust en 1920 sur L’Action Française quotidienne, l’ancêtre de notre Bien commun : « Ne pouvant plus lire qu’un journal, je lis, au lieu de ceux d’autrefois, L’Action française […] dans quel autre journal le portique est-il décoré à fresque par Saint-Simon lui-même, j’entends par Léon Daudet ? Plus loin, verticale, unique en son cristal infrangible, me conduit infailliblement à travers le désert de la politique extérieure, la colonne lumineuse de Bainville. Que Maurras, qui semble détenir aujourd’hui le record de la hauteur, donne sur Lamartine une indication géniale, et c’est pour nous mieux qu’une promenade en avion, une cure d’altitude mentale. » (Contre Sainte-Beuve, Pastiches et Mélanges, Essais et articles, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1971).
Je voudrais aujourd’hui inverser les rôles et inviter nos lecteurs à prendre chaque jour leur cure d’altitude mentale à la lecture des différents tomes d’À la Recherche du temps perdu. Quel plus sublime moyen en effet pour un Français du XXIème de retrouver la France d’avant le « Grand remplacement », la France d’avant la « Grande déculturation » et, par-dessus tout, la langue française dans la perfection de sa forme, avant la débâcle orthographique et la barbarie inclusive ? L’œuvre de Proust nous apparaît de plus en plus comme une arche immense sur laquelle tous les trésors de la francité ont été déposés en prévision d’un déluge imminent. Tous les usages, populaires ou mondains, toutes les hiérarchies, sociales ou culturelles, tous les raffinements, de la langue, du cœur ou de l’art, qui firent le fond de la civilisation française pendant des siècles, ont trouvé asile dans les milliers de pages de cette cathédrale de mots.
La référence aux concepts de Renaud Camus, à la « Grande déculturation » en particulier, dans le paragraphe précédent n’a bien sûr rien d’accidentel. Proust, par la méticulosité de son verbe, par la finesse de ses jugements moraux et esthétiques, par l’enracinement de son œuvre dans la France éternelle, incarne précisément ce qui se perd aujourd’hui sous l’effet conjugué de l’effondrement du niveau scolaire et de l’effacement de tous les repères historiques et de toutes les transmissions. Parce que l’œuvre de Proust est comme le symbole, — le résumé —, de ce que signifiait, dans l’ancien régime du sens, la « culture », elle constitue le meilleur antidote à la cancel culture. ■
Stéphane Blanchonnet
Action française
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Mille fois d’accord avec Stéphane ; depuis mes 18 ans, je lis et relis « La recherche » tous les dix ans ; dans quatre ans, ce sera donc ma deptième lecture ; et j’y trouve toujours de nouvelles merveilles…