Archive d’une émission de 1962 (5’13). La première remarque qu’on peut se faire, c’est sur la tranquille liberté de ton, d’esprit et de parole de Léopold Sédar Senghor qui fut le premier président de la république du Sénégal. Les mots et les réalités qu’ils désignent ne l’effraient nullement, il n’en recherche aucun travestissement, il ne craint pas de nommer les choses, au sens d’Albert Camus : négritude, nègre, nationalisme, race, enracinement, font partie de son vocabulaire courant. Péroncel-Hugoz qui fut son ami nous a souvent dit que Senghor recommandait d’en maintenir l’usage : « Dites nègre » ! L’inverse du discours macronien, alambiqué et faux. Le contraire radical de la vague woke d’aujourd’hui. Et, même s’il croit à cette civilisation de l’universel où entrerait le monde actuel, sa référence bien plus profonde, au nationalisme barrésien, non celui du moi, mais celui d’un nous collectif, son goût pour l’enracinement lorrain qu’il rapproche du sien en terre africaine, forcent l’assentiment et le respect. Il n’hésite même pas à affirmer que la civilisation européenne, et, singulièrement française, est nécessaire à l’accomplissement d’une civilisation africaine. Emmanuel Macron gagnerait beaucoup, au moment où la France doit repenser sa politique en Afrique, à consulter les paroles et les écrits de ce sage franco-africain que fut Senghor. Nous aussi, d’ailleurs y gagnons beaucoup.
1. Signalons à ceux que le sujet intéresse, qu’il y a dans Hôtes de passage d’André Malraux, de passionnantes discussions avec Senghor.
2. Nous avons eu connaissance de cette vidéo sur la page Facebook de Stéphane Blanchonnet. Merci à lui.