Par Jacques Léger.
L’un de nos amis marseillais qui a bien voulu nous confier en exclusivité le fruit de ses recherches sur l’épopée de la duchesse de Berry, mère du duc de Bordeaux, futur Henri V, plus connu sous son titre de courtoisie de Comte de Chambord. Une suite en 12 épisodes, du 25 avril au 7 mai – sauf dimanches.
Sa présence en France était maintenant connue de tous, en particulier du ministre de l’Intérieur, Montalivet, qui enrageait. Jamais peut-être la Duchesse ne fut plus populaire en France. Elle rejoignait dans l’imaginaire Mandrin, Cartouche, Guignol, tous ces petits qui se jouaient de l’autorité. Elle était plus menaçante pour le régime dans sa cachette qu’à la tête de ses maigres troupes.
La situation perdurant, on changea le ministre de l’Intérieur. Le nouveau venu, alors peu connu, Adolphe Thiers (ci-contre), était un homme déterminé et sans scrupules (ce qu’il confirmera en 1871). Il donna carte blanche à ses limiers pour obtenir des renseignements. En particulier, au commissaire Joly, vieille connaissance de la Duchesse (il avait été chargé de sa sécurité à Marseille avant son mariage, et il avait interrogé Louvel). Joly vint à nouveau à bout de sa mission, mais dans des conditions qui ont beaucoup blessé ce qu’on n’appelait pas encore l’opinion publique.
Il accepta de payer une trahison. Le traître, c’était Simon-Hyacinthe Deutz, « l’enfant de lumière » du Pape. Le prix, considérable : 500 000 francs or.
L’arrestation de la Duchesse fut à l’image de toute sa vie : héroï-comique.
Deutz, après avoir rencontré à Nantes plusieurs soutiens de la Duchesse, insista pour lui remettre personnellement deux lettres, du roi du Portugal et d’un banquier. Il fut reçu le 30 octobre à 18 heures. Peu après son départ, la duchesse et les autres occupants de la maison passèrent à table. 8 personnes au total (les demoiselles de Guigny, les sœurs Kersabiec, la baronne de Charrette, Mesnard et l’avocat Guibourg).
Alors qu’ils venaient de terminer le potage, un bruit éveilla l’attention de Guibourg. Il alla à la fenêtre et se retourna vivement :
– Sauvez-vous, Madame, sauvez-vous !
Un millier de soldats cernaient la maison et le quartier.
Il n’était plus temps de partir. Il fallait recourir à une cachette ménagée dans la maison depuis l’époque révolutionnaire : un minuscule réduit situé derrière la plaque de la cheminée de la pièce mansardée, au dernier étage, qui constituait la chambre de Marie-Caroline. En compagnie de Stylite de Kersabiec, de Mesnard et de Guibourg, elle se glissa dans la cachette au moment où le commissaire Joly entrait dans la maison.
Il constata sans peine qu’un couvert de 8 convives était dressé alors que 4 personnes seulement étaient prétendument présentes. Il ordonna une perquisition en règle. On abattit les cloisons suspectes, on enleva les lames des planchers, mais sans rien trouver. La nuit venant, Joly installa des sentinelles dans chaque pièce et renvoya au lendemain la suite des opérations.
Bien qu’étroitement serrés les uns contre les autres, les 4 captifs souffraient du froid. Les deux gendarmes aussi. Mais eux avaient le recours de la cheminée ; Trouvant une pile de journaux, ils allumèrent un feu. La fumée pénétrant dans le réduit, Mesnard parvint à ôter sans bruit quelques tuiles du toit. Mais la chaleur de la plaque finit par mettre le feu à la robe de Caroline, ce qui les contraignit à la reddition, au petit matin.
Marie-Caroline fut mise en détention au château de Nantes, où elle ne resta que quelques jours. Qu’en faire ? Louis-Philippe craignait autant de la faire juger que de la remettre en liberté. Il choisit une sorte de lettre de cachet : un internement, relativement confortable, sans jugement. Le 11 novembre, elle montait sur un brick pour être conduite à la citadelle de Blaye, en Gironde, avec Stylite de Kersabiec et avec Mesnard, mais non Guibourg. (Suite et fin demain samedi) ■
© JSF Peut être repris à condition de citer la source
Bonjour. J’ai lu l’histoire très intéressante sur la Duchesse De Berry, je me réjouis d’avoir une large bague en or, sur laquelle est gravée « Madame, votre fils est mon roi ».
Un commissaire priseur m’a informé que cet anneau avait appartenu à la Duchesse.
Pourquoi ne pas en faire don à une organisation du camp national ?