PAR RÉMI HUGUES.
Les résultats du 1er tour des élections législatives du dimanche 17 juin 2022 ont vu la majorité présidentielle et la coalition menée par Jean-Luc Mélenchon arriver en tête, à égalité.
Il n’y a pas une différence de nature entre Ensemble ! et la Nupes, mais une différence de degré. Ces deux coalitions sont les deux faces d’une même pièce[1], respectivement l’aile modérée et l’aile radicale du Vieux Parti républicain, qui régulièrement change de mue afin d’apparaître toujours comme le phénix des hôtes de ces bois.
L’UMPS a disparu, voici maintenant Ensemble !-Nupes comme nouvelle dyade partisane du régime républicain, qui telle une péripatéticienne, use et abuse et de l’art du maquillage et de la chirurgie plastique pour qu’aux yeux des Français elle semble éternellement pimpante. Seule la forme a changé, l’essence reste la même : l’UMPS a brûlé, s’est volatilisé, avant de renaître de ses cendres, sous une dénomination inédite.
Les élections législatives ont un mode de scrutin dit majoritaire qui favorise le Pays légal. Alors que le clivage libéral / souverainiste est prédominant dans le système politique français, cela ne se reflète pas dans la composition de l’Assemblée nationale qui se dessine. Ensemble !, avec peut-être comme force d’appoint LR face à la Nupes, c’est finalement un retour au classique clivage gauche-droite, mais circonscrit au palais Bourbon.
Cette évolution, qui traduirait un sinistrisme, ne concerne pas la tendance générale au dextrisme qui affecte notre vie politique depuis le XXIe siècle. Ce n’est pas la France qui a voté dimanche dernier, mais une petite moitié de celle-ci seulement, qui est clairement plus à gauche que la population française dans son ensemble : les plus diplômés, les plus âgés, les plus aisés.
Le Rassemblement national ne peut que revendiquer le titre d’opposant secondaire, tel un spectateur à Roland-Garros qui, dans un mouvement incessant, tourne sa tête de droite à gauche son groupe assistera aux échanges de balles entre Ensemble ! et la Nupes. Ces deux forces politiques partagent la même cancel culture, – ou « wokisme » – et s’écharpent surtout sur les questions socio-économiques, comme l’âge de départ à la retraite ou le montant des indemnités que Pôle emploi doit verser aux chômeurs.
Telle est la grande ruse de Mélenchon et des siens : se prétendre « anticapitalistes », « antisystème », mais ne proposer en rien une refonte du système, qui est le règne de l’usure. Dans « Dictateur et Roi », texte de 1903, Charles Maurras indiqua quelle est la priorité en matière économique :
« Questions économiques. — L’usure sera poursuivie.
Réprouvant toute philanthropie hypocrite, on défendra le peuple laborieux contre les agitateurs et les démagogues aussi bien que contre les agioteurs. Les abus du capitalisme, étant le prétexte de l’agitation révolutionnaire, seront observés avec vigilance. L’industrie nationale, le travail national seront protégés contre le travail et l’industrie de l’étranger, mais aussi contre les spéculateurs cosmopolites établis au milieu de nous. Un peuple sain et fort élimine de lui-même ces parasites. La « bonne politique » lui rétablira ses finances. L’administration, arrachée enfin au contrôle révolutionnaire du Parlement et à la somnolente routine des bureaux, pourra devenir un auxiliaire utile.
Responsables de ces administrations devant la Couronne, les divers ministres seront pressés d’y introduire les réformes souhaitées du public. Une police financière sera constituée sur le type de la police politique, non pour ralentir les transactions, mais pour épargner aux citoyens ces ruines subites dont le pays entier subit le contrecoup. La propriété sera défendue et encouragée sous toutes ses formes, depuis le simple livret de caisse d’épargne, organe élémentaire de la défense personnelle, jusqu’à la propriété territoriale, qui forme la base physique de la patrie. »[2]
Il s’agit de comprendre l’usure sera poursuivie, au sens de prohibée, comme on dit d’une personne fautive qu’elle est poursuivie par la justice. L’Action française d’aujourd’hui se doit d’être cohérente. Prôner la fin du prêt à intérêt et condamner l’action du lobby LGBTQI+ sur la législation et les mœurs, c’est combattre exactement le même ennemi. Rappelez-vous que Goldman Sachs avait, pour redorer son image ternie par la crise des subprimes, décidé de s’engager en faveur des droits des homosexuels[3].
Cette cause « gay », représentée par un arc-en-ciel, a pour égérie Lady Gaga, cette pop star qui assume tout à fait être une political activist[4] et non une vedette de la chanson. Soutien du camp démocrate et anti-Trump zélée, elle a chanté l’hymne God Bless America lors de la cérémonie d’investiture du président Joe Biden, une colombe accrochée au niveau du cœur.
Il reste, parmi les symboles associés au Déluge et à Noé, le rameau d’olivier : vous le trouverez sur le seau officiel des États-Unis, tenu par les serres droites de l’aigle impérial.
La France est devenue après-guerre une entité vassalisée des États-Unis, nos hommes politiques sont donc réduits au rôle de laquais de l’Uncle Sam et de son agenda mondialiste, qui dissimule sous le vocable de « Progrès » la subversion de l’ordre traditionnel.
Ainsi de Macron, ce qui est clair comme de l’eau de roche, tant il fait penser à Giton dans le Satyricon de Pétrone, un Giton dont les Encolpe et Ascylte seraient les États-Unis et le Royaume-Uni. Ainsi de Mélenchon également, ce qui est plus surprenant. Malgré ses airs d’anti-américain, Mélenchon ne peut masquer son parcours lié à la puissance yankee : jeune, il fit ses classes à l’Organisation communiste internationaliste (OCI), branche du trotskisme appelée lambertisme infiltrée par la CIA via l’agent Irving Brown[5]. Plus âgé il intégra, le 27 mars 2000, un gouvernement qui venait de mener des frappes d’envergure sur la Serbie dans le cadre d’une opération de l’OTAN, gouvernement dont le chef – Lionel Jospin – avait d’ailleurs lui aussi été militant dans ce groupuscule trotskiste.
L’essayiste Martin Peltier appelle le déploiement du mondialisme la « révolution arc-en-ciel »[6]. Ce qui amène à considérer que les mondialistes sont des « noachiens », qu’ils propagent une culture anti-traditionnelle, au sens d’antinomiste, et, en vertu du principe hérité de la scolastique selon lequel ce qui caractérise le Mal est une privatio boni (une absence de bien, absence et donc néant, non-être), ils créent une parodie du système de représentations lié à l’épopée de Noé pour rendre substantielle et attractive leur anti-culture.
René Guénon avait montré que ce processus écrasant, ce véritable rouleau compresseur, cette impitoyable entreprise de démolition s’interrompra un jour brutalement, à la manière d’une inversion du magnétisme des pôles de la terre : « le triomphe apparent de la ‟contre-tradition” ne sera que passager, et que c’est au moment même où il semblera le plus complet qu’elle sera détruite par l’action d’influences spirituelles qui interviendront alors pour préparer immédiatement le ‟redressement” final »[7].
Ce Grand redressement, les « noachiens » le craignent. Leur Pouvoir repose sur un équilibre, qui, comme tout équilibre, est précaire, provisoire. ■
[1]Cela me semble plus exact que ce que j’avais écrit pour la Fondation pour l’innovation politique il y a juste un peu plus de dix ans, le 9 mai 2012 dans un article intitulé « Le Front national, avant-garde de la ‟nouvelle classe ouvrière” ? », où je présentais Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon comme deux pendants d’une même force, le socialisme : « : « Les aspirations, en revanche, des ouvriers en matière économique sont assez homogènes, caractérisées par un haut degré d’antilibéralisme. Hostiles à l’égard de la mondialisation, de l’Union européenne et du libre-échange, ils partagent le désir d’un État fort, qui protège des délocalisations et augmente le pouvoir d’achat, par exemple par l’instauration du protectionnisme. Dans ce domaine précis, les idées directrices d’un Jean-Luc Mélenchon et de Marine Le Pen sont assez proches, au fond ils proposent deux visions différentes du socialisme, l’un multiculturel et européen pour le premier, ethnocentré et nationaliste pour la seconde. Se plaçant résolument dans une logique souverainiste, ils constituent les deux pendants d’une même force. »
[2]Charles Maurras, Enquête sur la monarchie, Belle-de-Mai Éditions, Marseille, 2022, pp. 665-666.
[3]À titre d’exemple, cet article en anglais : https://money.cnn.com/2013/06/26/news/companies-same-sex/index.html
[4]https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1041698/lady-gaga-fierte-lgbt
[5]« LCR, LO, PCI : Solidarnosc Connection » in Le Bolchevik, décembre 1985, n° 59, p. 7. Revue accessible en ligne, cliquer ICI.
[6]Pour se procurer le livre : cliquer ICI.
[7]René Guénon, Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps, Paris, Gallimard, 1972, p. 256.
À lire de Rémi Hugues Mai 68 contre lui-même (Cliquer sur l’image)
© JSF – Peut être repris à condition de citer la source
Cher Remi Hugues, attention aux glissements de sens : il est sans doute vrai que dans le souci de conserver l’unicité de la religion juive, quelques rabbins ont du concéder que le noachisme était la religion des goyim (les goys) celle des non-juifs.
Cela permettait de contester que la religion catholique soit la religion universelle. Face à cette stratégie intellectuelle, dans une intention polémique, certains ont assimilé le terme de noachien au complot « mondialiste ».
Cela m’apparaît dangereux car la foi en une révélation faite à Noé est tout-à-fait légitime ; dans une perspective traditionnelle, le noachisme m’apparaît comme une figure préchrétienne du catholicisme, au même titre que la révélation faite à Moïse. L’Eglise étant le « novus Israël ».
Refuser les « machins » comme l’ONU, l’OTAN ou l’Union européenne, c’est refuser de rebâtir quelque tour de Babel, ce n’est pas refuser l’universalisme d’une humanité issue des mêmes pères (Adam puis Noé). Avant les caricatures qui en ont fait un terme péjoratif, souvenons-nous de la belle étymologie du mot « COSMOPOLIS ».
Souvenons-nous aussi de l’expression de Maurras sur « le catholicisme, la seule internationale qui tienne ».
Bref il ne faut pas réduire un vrai grand mythe à ses caricatures subversives.
De même, il ne faut pas réduire ce que dit St. Paul « quand le péché s’accroit, croît aussi ce qui sauve » avec le séditieux « antinomisme » (transgresser toute loi pour accélérer la venue du Messie). Comme dans les trois tentations du Christ, le diable ne ment pas, il subvertit une vérité partielle.
Rien compris. Qu’est-ce que c’est que ces fameux « Noachiens » ? Voilà la première fois que j’en entends parler.
Article fort obscur, au demeurant.