Par Michel MICHEL.
Michel MICHEL prend part ici au débat tenu dans nos colonnes après que nous avons publié, hier, l’article de Frédéric Rouvillois Mort d’Elizabeth II : « La souveraine qui, parce qu’elle échappait aux hasards de l’élection, était celle de tous ». Il introduit dans ce débat des idées nuancées et fermes, d’une grande clarté.
« Ce que la France pourrait faire pour récolter les bénéfices politiques d’une Reine sans rétablir la monarchie » titre le quotidien Atlantico.
L’article ne répond pas à la prétention de son titre… La seule façon n’est-elle pas de restaurer la Royauté en France ?
Néanmoins la distinction faite dans l’article entre « dignité » et « efficacité » est intéressante.
Certes, la monarchie française et ses lois fondamentales ne correspondent pas au système britannique. Comme l’expliquait Joseph de Maistre, c’est l’Histoire propre à chaque peuple qui lui donne sa « constitution ».
Néanmoins, même réduite à sa fonction symbolique, la royauté contribue à incarner la continuité et l’unité du pays, elle permet enfin de limiter les intérêts particuliers et les ambitions partisanes en les décourageant de pouvoir investir le sommet de la hiérarchie.
L’absence de Roi héréditaire en France contribue à entretenir le climat de guerre civile qui caractérise la politique française depuis qu’elle s’est coupée de « l’Ancien Régime ».
Ce sont ces fonctions que « le monarque républicain » ne parviendra jamais à remplir. ■
Maître de conférence en sociologie
Dernier ouvrage paru …
Cliquer sur l’image.
Sur la question de notre position envers les monarchies dites « royautés-symbole, nous conseillons d’écouter Pierre BOUTANG :
Il nous faudrait un Prince bien plus dynamique.
J’ai été extrêmement intéressé par l’article de Jean-Éric Schoettl, Conseiller d’État, ancien secrétaire général du conseil constitutionnel qui pose avec finesse un bon nombre de questions et marque notamment la question de l’absence, en France, de toute référence qui puisse dépasser les actions gouvernementales, forcément conjoncturelles et sinueuses.
Mais Schoettl, à la fin de son raisonnement, bute contre une évidence ; en coupant la tête à son Roi, acte symbolique d’une puissance inouïe, la France s’est privée de la permanence. Emmanuel Macron avait dit à peu près la même chose.
Toute la question est de savoir si ce fil peut être renoué.
~ Le Comte de Chambord affirmait : {ma personne n’est rien, mon principe est tout } c’est un très bon dialogue d’un futur Roi ! que le Comte de Paris doit prendre comme exemple pour mettre fin à la république anti-Français ;
§ Message d’un: *Royaliste-Lozérien*.
C’est précisément ce qui a tué la restauration en 1871. Comme l’avait dit Fabrice Bouthillon, il eût fallu dire : « Mon principe n’est rien, ma personne est tout ».
Le Comte de Chambord avait raison, son principe est tout. Il ne voulait pas s ‘imposer, mais rallier. Le problème, c’est qu’il devait aussi l’incarner, et à ce moment et les royalistes devaient l’aider à franchir rapidement ce seuil et à sauter le pas pour être reconnu. L’ont-ils vraiment fait ? Ou n’ont-ils pas préféré s’installer dans le système, qui les a dévorés tout crus quelque temps après ?
Le Comte de Chambord avait projeté, suite à la polémique sur le drapeau blanc, de se montrer à la chambre accompagné de Mac-Mahon. Celui-ci par loyauté au système a refusé de lui mettre le pied à l’étrier. Il a manqué un fin manœuvrier comme Talleyrand pour saisir cette occasion après le désastre. Les responsabilités sont donc partagées.
C’est bien et honnête d’impliquer aussi les royalistes dans les échecs comme dans la recherche et la tâche de réunir les conditions de la victoire. Les royalistes ont tendance à s’exonérer de ces responsabilités et à s’en décharger intégralement sur le Prince. Sont-ils assez sérieux, assez compétents, assez organisés, assez formés, assez nombreux, assez actifs et dévoués, assez généreux. ? Sont-ils pris au sérieux, respectés ? Peuvent-ils peser ? Servir efficacement la Cause et le Prince ? Ils n’ont pas tellement tendance à se poser ces questions. La critique du prince est plus commode. Henri a raison je trouve de nous rappeler qu’en tous domaines et circonstances les responsabilités doivent au moins être partagées.
Vous avez raison, les responsabilités sont partagées. Les royalistes peuvent avoir tendance à s’exonérer de leurs torts en les mettant sur le dos du Prince ; mais ils peuvent aussi avoir tendance à oublier les torts de ce dernier par idéalisation ; ce travers est très répandu chez les Blancs d’Espagne ce me semble. Or en l’occurrence, ceux du comte de Chambord sont éclatants. Que lui importait le drapeau tricolore (qui d’ailleurs pouvait être interprété en un sens qui fût favorable à la royauté) ? On dit que c’était un prétexte et qu’il ne voulait pas d’une monarchie soumise au parlementarisme ; mais face à un semblable choix, Louis XVIII rentra en France avant d’imposer ses conditions. Plût à Dieu que Chambord eût agi comme son grand-oncle !
Si ces vieilles affaires intéressent encore, je signale le livre d’Emmanuel Beau de Loménie » qui fut d’AF puis s’en éloigna. Le livre s’appelle « La Restauration manquée » ; j’ai fait un brillant exposé en 2ème année de Sciences Po (Grenoble) sur le drapeau blanc et tutti quanti.
J’avais utilisé plusieurs ouvrages mais la plupart indiquaient que les querelles entre Légitimistes et Orléanistes (qui n’étaient donc pas encore devenus légitimes !) étaient, sous l’apparente conciliation, beaucoup trop vives pour permettre un accès apaisé d’Henri V au Pouvoir.
Grégoire Legrand, encore une fois je n’idéalise aucun Prince , ni prétendant, ni Roi. Et je pense que le Comte de Chambord avait raison sur le fond mais qu’il a parlé trop vite, et avait peut-être peur inconsciement de monter à cheval. . Les royalistes en le désavouant de facto sont rentrés dans le jeu de leurs ennemis, donner raison à ses adversaires est une grande constante de la droite, il fallait désamorcer la polémique- lait nourricier des républiacains- et revenir à la charge, oubliant un temps le drapeau blanc, mais non l’amour (réciproque ) de ce Prince pour les Français . A mon avis le Comte de Chambord y aurait été prêt, il fallait un peu le tirer par la manche, l’aider à trouver sa vocation et sa voie, et non le rejeter comme l’a fait Mac-Mac Mahon, qui a brillamment rétabli …la république. les Monarchistes ont joué avec les poisons de la république. Echec et mat..Pauvres de nous. . Ensuite nous sommes allés en chantant à la guerre de revanche républicaine, comme si la revanche était une politique. Elle fut mal préparée et sans vision de la paix et d’un équilibre européen, . Ce fut une défaite de l’esprit. ( A ce propos on pourrait lire Jean de Viguerie sur le patriotisme …. républicain, et dans un tout autre domaine René Girard, sur » la montée aux extrêmes) « .Une restauration nous aurait protégé, Chambord et son sucesseur, de cette course à l’abîme qui a failli emporter l’Europe. Il n’est jamais trop tard pour relever ce défi.
Je suis entièrement d’accord avec vous sur le fait que les responsabilités soient partagées dans la restauration manquée (nombre d’orléanistes étaient bien contents que Chambord imposât le drapeau blanc, la dernière biographie du premier comte de Paris le rappelle). Idem pour la première guerre mondiale, pour le rôle protecteur de la monarchie restaurée si restauration il y avait eu, etc. Ceci dit, je pense aussi que Chambord n’avait pas l’esprit politique qui avait tant servi son grand-oncle, Louis XVIII. S’il l’avait eu, il ne se serait pas réfugié derrière le drapeau blanc.
De toute façon, tout ceci est fini, il nous reste à préparer l’avenir. Et vous avez raison, il n’est jamais trop tard.