Par Front Populaire, La Rédaction.
Article intéressant, concis et vigoureux comme en général ceux signés par la Rédaction de Front Populaire (publié le 7 septembre). L’analyse des propos de François Lenglet par la rédaction de Front Populaire mérite d’être connue. L’ensemble va à rebours de ce que la doxa mainstream s’efforce de faire entrer dans le crâne du citoyen français. Mais ça n’a plus rien d’automatiquement acquis.
ARTICLE. Malgré les sanctions internationales, la Russie ne s’effondre toujours pas. Il y a de quoi s’interroger : et si, finalement, les sanctions ne pénalisaient que ceux qui les décrètent ?
Ce jour-là, le journaliste Yves Calvi a eu bien du mal à cacher sa stupéfaction… et son dépit. Le 31 août, l’éditorialiste François Lenglet signe un édito cinglant : « La Russie n’a jamais gagné autant d’argent avec ses exportations de pétrole et de gaz », conclut l’économiste, qui livre son analyse des sanctions économiques décidées par l’Europe vis-à-vis de la Russie. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il n’a guère été tendre vis-à-vis de l’Ouest.
Depuis les sanctions, « le pays [la Russie] est noyé sous des flots d’argent depuis l’invasion de l’Ukraine », a estimé François Lenglet. Si la Russie vend « 7,4 millions de barils par jour », soit « 600.000 de moins seulement qu’avant la guerre », elle « a fait monter les prix en déchaînant la spéculation des marchés. Des volumes inférieurs à des prix beaucoup plus élevés ». Conclusion sans appel : « Les sanctions, que nous payons cher avec l’inflation, n’ont servi qu’à remplir les coffres de Poutine à des niveaux impensables ».
L’éditorialiste star de la radio et du petit écran – bref, des médias de grande audience – n’est pas le seul à s’interroger. Outre des économistes reconnus comme Jacques Sapir (que nous avions interrogé à ce sujet), d’autres personnalités médiatiques commencent à s’interroger sur les résultats des sanctions. Le 1er septembre, dans l’émission « Apolline Matin » sur RMC, le journaliste Nicolas Poincaré rappelle que les sanctions « [devaient] mettre l’économie russe à genoux », que cela devait « gêner Vladimir Poutine au point de le forcer à mettre fin à la guerre ». Le journaliste conclut : « c’était ce qui était annoncé et rien de tout cela ne s’est produit, pour l’instant ». Et de rappeller toutefois que « l’inflation explose en Russie et atteint 15% ce mois-ci » et que « le FMI prévoit un recul de 6% en 2022 ».
Bruxelles patine
Si même des médias grand public s’y mettent, c’est qu’il y a de quoi s’interroger. Les sanctions présentent un coût plus que conséquent pour l’Europe. Avec l’augmenttion du coût des energies fossiles, des pays dépendant du gaz russe connaissent une inflation record. C’est notamment le cas de l’Estonie (25,2% d’augmentation sur douze mois, données en date du 31 août). Les Pays Bas sont à 13,6% d’augmentation et le pays qui « souffre” le moins, à savoir la France – grâce au bouclier tarifaire et à son mix énergétique moins dépendant du fossile –, atteint tout de même les 5,8% d’augmentation. Mourir pour des idées, d’accord, mais de mort lente… et encore faudrait-il qu’il y ait un intêrét à défendre ces idées.
Dans ce contexte tendu, la Commission européenne tente tant bien que mal de déminer le terrain. Ce 5 septembre, Bruxelles a publié un argumentaire visant à convaincre les européens de l’efficacité des mesures qu’elle a décrétées. Elle affirme ainsi que « les sanctions sur les importations de semi-conducteurs, par exemple, ont un impact direct sur les entreprises russes qui produisent de l’électroménager, des ordinateurs, des avions, des voitures ou des équipements militaires », ou encore que « le secteur automobile est un autre secteur qui ressent fortement les effets des sanctions » et que « les quelques voitures que les constructeurs russes produisent encore ne seront pas équipées d’airbags ou de boîtes de vitesses automatiques. »
Mais si ces analyses, prises isolément, sont vraies, elles semblent plutôt relever de l’épiphénomène. Compensent-elles les effets du blocus (officieux) des Russes sur leurs énergies fossiles, naguère exportées aux quatre coins du continent européen ? Sur ce point, la Commission livre une bien étrange analyse ; cet embargo pétrolier « progressif et les efforts pour s’affranchir des importations de gaz russe libèrent l’Europe de sa dépendance énergétique structurelle vis-à-vis de la Russie ». Grâce à cet embargo, « la Commission européenne a proposé le 20 juillet de baisser de 15% la consommation de gaz en Europe d’ici au printemps 2023 ».
Et Bruxelles de conclure : « Nous libérer de cette dépendance nous permet de poursuivre des actions fortes face aux agressions de Moscou ». Manifestement sans grand succès pour le moment. ■