La qualité des analyses de Marion Maréchal ne nous rendra pas pour autant partisans du système des partis et ne nous fera pas succomber aux illusions qu’ils suscitent ; nous ne sommes guère favorables non plus à la stratégie d’union des droites qui a le grave défaut de perpétuer la division artificielle des Français en deux blocs ennemis telle que la Révolution l’a établie ; enfin, la référence au « conservatisme », dans la société telle qu’elle est aujourd’hui, nous paraît tout à fait contestable.
Reste cette réaction, imparfaite mais réelle ,en Europe, qui grandit aujourd’hui et manifeste une volonté courageuse de survie, évidemment positive.
Marion Maréchal a fait connaître cette émission en ces termes :
« Samedi 1er octobre, j’étais dans l’émission « Face à Bock-Côté » sur CNEWS pour échanger sur l’actualité :
– Le réveil identitaire et conservateur en Europe à travers les victoires des coalitions de droite en Suède et en Italie,
– Les francocides,
– L’avenir de Reconquête !
Quelques extraits :
« Si la France avait joué son rôle et respecté sa tradition diplomatique, nous aurions eu le choix entre la guerre ou la paix. Aujourd’hui, nous n’avons plus ce choix. Voulons-nous un chaos révolutionnaire dans un pays qui possède l’arme nucléaire ? »
« L’idée du francocide, c’est de mettre un mot sur un phénomène de société. Une insécurité endémique principalement issue de l’immigration ou de nationalité étrangère, à l’encontre de Français. Nous voulons imposer ce terme dans le débat public. »
« 30% des femmes en âge de procréer en France ne veulent pas d’enfants pour des raisons écologiques ou professionnelles. Il faut sortir du paradigme de gauche car cela a des conséquences concrètes sur notre avenir et notre peuple ! » «
Avec Reconquête!, nous allons mener un combat culturel, civilisationnel car l’identité d’une nation ne porte pas seulement sur la question migratoire ou de l’islam, c’est aussi notre rapport au monde, nos valeurs et limites éthiques. »
Je partage pleinement l’analyse et les commentaires de JSF : l’union des droites me parait moins intéressante qu’une stratégie de type populiste.
Pour répondre à la mention de la dimension regrettable des Français partagé en «deux blocs ennemis» et que la logique des partis entretien cela, je crois que, de la même façon qu’il est dit : «la référence au “conservatisme”, dans la société telle qu’elle est aujourd’hui, nous paraît tout à fait contestable», il y a tout d’abord lieu d’envisager les «partis» en fonction de sa modernité et par contraste avec celle de l’Ancien régime…
Alors, il n’y avait évidemment «ni droite ni gauche», comme il n’y avait aucun «royaliste» mais, seulement, des Sujets de Sa Majesté, du «Très chrétien franc Royaume de France». Il ne faut pas envisager la question soulevée par les factions selon un point de vue «politique», au sens actuel du terme, pour cette raison que le rapport Roi/Sujets, Royaume/Peuple, etc., n’est en rien superposable à quoi que ce soit de la vie sociale actuelle. La Révolution est survenue… Pour ce qui le permit, on m’accordera, dans le menu propos que je tâche de tenir ici, la latitude de faire l’impasse sur les «factions» qui y ont présidé, au nombre desquelles, s’il vous plaît, il y a lieu de savoir compter celle infiniment «coupable» et, sans doute, assez peu «responsable», de la franc-maçonnerie «spéculative». Celle-ci n’était ni factieuse, ni politique, parce qu’elle relevait d’une idéologie doctrinalement «révolutionnaire», par la nature de sa réelle origine, toute récente alors (1717, pour aller vite), fondée sous les auspices protestants et anticatholiques des pasteurs Anderson et Désaguliers. Le propre de ce que l’on appelle «la Secte» dans les milieux infréquentables, est d’avoir commencé par tenter de détruire toutes les pièces anciennes de la maçonnerie opérative (ce qui correspond à ce que l’anglais désigne en tant que “Old Charges” traduit plus ou moins exactement, paraît-il, par “Anciens Devoirs”). Sans pouvoir développer davantage, je veux ainsi poser que la Révolution fonde sa doctrine et , par conséquent, la «politique» subséquente, sur l’élimination aussi complète que possible de l’Ancien et la promotion de toutes les parodies NOUVELLES et autres «évolutions» possibles, susceptibles d’agir comme des «filtres [philtres] d’oubli».
Bon, tout cela pour en arriver à ceci : la division en deux blocs est une réalité produite par le fait de la volonté d’élimination de ce qui est antérieur. La tentative de survie de ce qui répugne à ce «progressisme» établit un pôle «conservateur», et il y a irréductibilité entre les deux. Le problème tient ensuite à ce que, dans les deux blocs primaires, des partis (blocs secondaires) vont se constituer. Néanmoins, la seule distinction qui vaille réellement est celle primaire, entre Révolution et ce qui, par l’entêtement des faits, ne peut être que contre-révolutionnaire. Reste un certain «peuple ; par sa nature, il ne relève évidemment pas de la «logique des partis»… Si «populisme» voulait prendre en considération et élaborer une doctrine qui poserait le peuple comme troisième terme de l’alternative, cela pourrait effectivement être amené à compter, mais je ne crois pas que ce fût sociologiquement possible. Pour que ce puisse le devenir, il faudrait que des «élites» prissent sur le peuple un particulier ascendant susceptible de conférer à celles-ci une imprévue nature capable de les tenir «au-dessus des partis», encore qu’il faudrait alors observer qu’elles seraient situées AU DELÀ, ce qui est la seule convenance, du reste. Ces élites constitueraient alors évidemment une «aristocratie», laquelle, aujourd’hui ne peut être conçue que comme étant effectivement «de droite» et, par conséquent, en vient à faire pencher la partie du peuple susceptible d’y souscrire vers ce même versant et ces «élites» elles-mêmes à la droite la plus extrême. Dans une société bêtement dialectisée comme a su la fonder le «stupide XIXe siècle», vitupéré par Léon Daudet et supérieurement critiqué par René Guénon, seul, ce qui s’oppose à la Révolution (qui en est la plus conceptuellement accessible origine) peut valoir doctrinalement et, en raison de l’abîme socialo-culturelle, selon toute probabilité, également valoir «politiquement». On se rappelle le mot d’ordre soixante-huitard : «Une seule solution : la révolution.» Contre cela il n’y a qu’une contre-solution… Et je renvois à Joseph de Maistre pour apprendre à concevoir de quoi il s’agit plus exactement.
Total, selon moi, nous sommes contraints à une espèce de «logique des blocs», parce que nous vivons la «post-révolution» qui est exactement la continuation de 89, et que tout ce qui n’entre pas dans ce moule existentiel est logiquement versé à droite, car ce que le monde moderne désigne en tant que «droite» est son premier adversaire et le dernier qu’il ne peut que rester.
Ainsi donc, une «union des droites» me semble proposer la seule monnaie frappée au bon coin dont nous pouvons encore avoir l’usage.
Marion est vraiment rafraichissante. David relance le débat sur un point avec Joseph de Maistre. Depuis la césure de la Révolution on nous impose cette distinction, cette logomachie droite gauche. Mais enfin quelle droite ? Celle qui freine, sans pouvoir vraiment freiner, la révolution, ou qui veut ensuite en toucher les dividendes, qui n’a pas finalement de consistance, et qui, comme l’a dit Pierre Boutang en 1956, « commence par donner raison à son adversaire, » cette droite qui s’effiloche, nous avons trop connue en France. Il existe aussi une droite qui s’appuie sur des valeurs impérissables, qui nous font vivre, que même des hommes de gauche sincères peuvent retrouver s’ils s’évadent de leur idéologie progressiste. Tant que le Roi n’est pas de facto de retour pour mettre fin à cet affrontement stérile et nous reconnaitre, pouvons-nous envisager l’union des droites comme acte de Résistance, celle de notre liberté, et non de soumission à terme à ce nihilisme ambiant, à charge ensuite de dépasser nos querelles personnelles ?.