Par Aristide Renou.
La carrière politique d’Aurore Bergé pose un problème intéressant. Voilà quelqu’un qui, depuis une bonne quinzaine d’années, saute de parti en parti et de poste en poste avec une aisance déconcertante, comme si de toutes parts on s’arrachait sa compétence et ses qualités. Mais quelle compétence et quelles qualités ? Voilà la question. Car on a beau chercher de côté-là, on peine à voir ce qui a pu la mener jusqu’à la présidence du groupe majoritaire à l’Assemblée Nationale.
Certaines mauvaises langues insinuent qu’Aurore se serait hissée au sommet à l’horizontale, mais cela me parait fort douteux. Non pas que je la pense au-dessus d’un tel procédé, bien loin de là, mais enfin, Aurore Bergé n’a rien d’une beauté fatale et nous vivons dans une société où rien n’est moins difficile à trouver que le genre de chose qu’elle a à offrir. Le temps est bien loin où une femme pouvait acquérir un avantage considérable – bien que temporaire – sur ses concurrentes en acceptant de compter pour rien la pudeur et il est difficile de croire qu’Aurore Berger ait pu monnayer si cher un ragoût d’apparence si insipide.
A moins qu’elle ne soit dépositaire des secrets d’alcôve de quelque courtisane émérite qui rendraient sa compagnie irrésistible une fois les rideaux tirés. Mais si tel est le cas, le moins qu’on puisse dire est qu’elle cache bien son jeu.
J’en étais là de mes réflexions et de ma perplexité lorsque, en l’entendant pérorer ce matin sur France Intox, j’ai eu une sorte de révélation, que je vous partage incontinent : ce n’est pas en dépit de la modestie manifeste de ses dons intellectuels et moraux qu’Aurore Bergé réussit si bien, mais à cause d’elle.
On sous-estime grandement les avantages que la stupidité peut donner dans le débat politique. Être imperméable à la logique et inaccessible à la subtilité vous rend invulnérable aux flèches décochées par vos adversaires, qui passent littéralement au-dessus de votre tête, et vous permet par ailleurs de répéter inlassablement les mêmes éléments de langage sans honte aucune, car vous ne percevez simplement pas leur ineptie ou les contradictions qu’ils contiennent. Il est des esprits qui ressemblent à d’épais murs de terre, dans lesquels les plus forts boulets s’enfoncent sans provoquer aucun dégât. Aurore Bergé est de ceux-là. Aussi doit-elle l’emporter sur ses adversaires dans toutes les réunions, par épuisement, écœurement, découragement. Et son inamovibilité intellectuelle doit être fort rassurante pour ses maitres : en voilà au moins une qui ne se laissera jamais déstabiliser par un bon mot ou un bon argument !
Molotov, le ministre des affaires étrangères de Staline, était surnommé « cul d’acier » par les diplomates du camp adverse pour sa capacité à rester assis plus longtemps que n’importe qui ; caractéristique qui lui permettait bien souvent de conclure les négociations son avantage, lorsque les fondements douloureux des autres négociateurs les poussaient à des concessions propres à mettre enfin un terme à une réunion devenue torture. De même, j’incline à croire que le surnom d’Aurore Bergé doit être « cervelle de plomb » et doit produire à peu près les mêmes effets que le derrière de Molotov.
Je me suis aussi laissé dire qu’elle possédait un avantage fort peu féminin : une vessie à l’élasticité prodigieuse, qui la rendrait aussi insensible au café que la densité de sa cervelle la rend insensible à l’intelligence. Pouvoir boire autant de café que l’on veut sans en être incommodé et pouvoir débiter autant d’âneries que l’on veut sans mourir de honte, voilà assurément la combinaison gagnante, qui permet d’écraser la concurrence aussi bien dans les open space du nouveau monde que dans les couloirs de l’Assemblée Nationale.
Cette femme ira loin, je vous le prédis. Avec d’aussi insignes qualités, comment la présidence de la République pourrait-elle lui échapper ? ■
Précédemment paru sur la riche page Facebook de l’auteur (28 novembre).
Excellent !
Très bonne analyse . Cette donzelle a l’art et la manière de débiter les fadaises de la voix de son maître ( quelque soit le maître du moment ) sans état d’âme et avec une telle conviction que l’on ne peut qu’admirer cet exercice de haut vol