PAR RÉMI HUGUES.
Article en 7 parties, publiées du lundi 27 février au dimanche 5 mars 2023. Étude ayant fait l’objet d’une conférence du Café d’actualité d’Aix-en-Provence qu’anime Antoine de Crémiers. (23.02.2023).
Le 14 octobre 2021, lors d’une réunion du comité monétaire et financier du Fonds monétaire international (FMI), Christine Lagarde déclarait ceci : « Nous continuons de considérer cette poussée comme étant largement provoquée par des facteurs temporaires. L’impact de ces facteurs sur les taux annuels d’évolution des prix devrait s’atténuer dans le courant de l’an prochain, modérant ainsi l’inflation annuelle. »[1]
Citons en outre ce papier du 20 mars 2022 de Manon Malhère du Figaro : « Alors que certains redoutent un retour massif et durable de l’inflation, le ministre de l’Économie parle, lui, d’un phénomène temporaire. “Je ne crois pas à un choc inflationniste de plusieurs années dans l’Union européenne”, a indiqué Bruno Le Maire, sur le plateau du Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI, dimanche »[2] 16 octobre 2022.
Or ces prédictions d’une inflation provisoire se sont avérées inexactes. Elle se poursuit, elle s’accélère même.
« La grande distribution parle déjà d’un mois de “mars rouge”. […] [L]a hausse des prix à la consommation […] pourrait s’accélérer à compter du 1er mars. Des négociations annuelles menées en ce moment entre les industriels et la grande distribution, qui s’achèvent le 28 février, vont déterminer de futures hausses à prévoir pour les Français pouvant aller jusqu’à 40 % sur de nombreux articles. » Voici ce qu’on pouvait lire dans un article du Point du 11 février 2023. Comme on peut le constater, le phénomène actuel d’inflation n’est en aucun cas provisoire. Et ce n’est ni la reprise post-Covid ni la guerre en Ukraine qui en sont les causes principales, mais la politique monétaire de la Banque centrale européenne (B.C.E.), qui depuis des années mène une politique de planche à billets qu’elle nomme quantitative easing, soit en français « assouplissement quantitatif ».
Cela a eu pour conséquence l’irruption d’une situation aberrante : les taux d’intérêt négatifs, laquelle situation a cessé avec l’apparition d’une inflation galopante, à partir de 2021, qui a obligé Christine Lagarde d’augmenter de façon importante les taux d’intérêt directeurs, ce qui par ailleurs freine la croissance économique, qui est par voie de conséquence complètement atone dans la zone euro aujourd’hui.
La réalité des taux d’intérêt négatifs est le signe majeur qui annonce la fin à venir du capitalisme. L’abolition de l’usure est la mesure prioritaire à prendre pour remédier aux problèmes économiques actuels. Et cela reviendrait à mettre un terme au système capitaliste.
Le principe du prêt à intérêt, ou usure, Aristote le dénonçait déjà dans le livre I des Politiques. Thomas d’Aquin développa cette condamnation dans sa Somme théologique :
« Recevoir un intérêt ou une usure pour de l’argent prêté est une chose injuste de soi, car en faisant cela on vend une chose qui n’existe même pas ; d’où résulte évidemment cette sorte d’inégalité qui est opposée à la justice. Pour rendre cette proposition évidente, remarquons d’abord qu’il est des choses dont l’usage entraîne leur destruction ; ainsi le vin que nous buvons, le blé que nous mangeons se consomment ou se détruisent par l’usage. Pour de telles choses on ne doit pas séparer l’usage de la chose elle-même ; du moment où la chose est cédée, on en cède aussi l’usage. (…) Il est des choses, au contraire, qui ne sont pas du tout destinées à être consumées ou détruites par l’usage ; l’usage d’une maison consiste à l’habiter et non à la détruire. Pour ces sortes de choses on peut traiter séparément de l’usage et de la chose elle-même ; ainsi l’on peut vendre une maison en s’en réservant l’usage pour quelque temps, et, réciproquement, céder l’usage d’une maison, en s’en réservant la propriété. Voilà pourquoi on est en droit de faire payer l’usage d’une maison et de demander en outre qu’elle soit convenablement entretenue, comme cela se pratique dans les baux et les locations. Mais la monnaie a été principalement inventée (…) pour faciliter les échanges. D’où il suit que l’usage propre et principal de l’argent monnayé consiste en ce qu’il soit dépensé et consumé en servant aux commutations ordinaires. Il est donc illicite en soi de retirer un intérêt pour l’usage de l’argent prêté, ce en quoi consiste l’usure proprement dite. Et de même qu’on est tenu de restituer toute autre chose injustement acquise, de même on est tenu de restituer l’argent qui est le fruit de l’usure. » ■ (À suivre).
[1]https://investir.lesechos.fr/marches-indices/economie-politique/lagarde-bce-juge-toujours-la-poussee-inflationniste-largement-temporaire-1811319
[2]https://www.lefigaro.fr/economie/bruno-le-maire-je-ne-crois-pas-a-un-choc-inflationniste-20220320
À lire de Rémi Hugues Mai 68 contre lui-même (Cliquer sur l’image)
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