Par Bernard Lugan.
Après la Centrafrique et le Mali, la France a été « priée » de « quitter » le Burkina Faso. Le cœur même de son « pré-carré » africain se disloquant inexorablement – le Niger sera la prochaine étape -, le temps de désigner les responsables de ce naufrage est venu.
D’autant plus qu’au Sahel, et cela à la différence du Rwanda, les responsables français ne peuvent pas invoquer la méconnaissance du terrain ou le « complot anglo-saxon ». Mais comme il leur faut trouver des causes extérieures à leurs échecs, ici, c’est la présence russe qui leur permet de tenter de s’exonérer de leurs colossales erreurs politiques et sociétales. La Russie n’a eu qu’à compter les coups…
1. Politiquement, la France s’est constamment montrée incapable de s’élever au-dessus de ses a-priori démocratico-philosophiques, s’auto-embourbant dans des postulats philosophiques se voulant universels. Au nom des « nuées » du « vivre ensemble » et de la « bonne gouvernance », elle s’est obstinée à proposer le dialogue et le partage du pouvoir à des populations en rivalité depuis la nuit des temps.
2. Les comportements sociétaux de ses « élites » ont définitivement fait perdre à la France tout prestige et toute considération. En Afrique, les familles sont encore formées de l’union d’hommes et de femmes, le sexe ne s’y choisit pas à la carte selon les pulsions hormonales du moment, les LGBT y sont considérés comme des « étrangetés », et le mariage pour tous y est vu comme une monstruosité.
Dans ce numéro spécial* consacré à la question du Sahel, il est montré que l’échec de la France est politique. En dépit de multiples victoires tactiques remportées par les militaires, à aucun moment, les décideurs politiques français n’ont en effet eu une vision stratégique cohérente. Ignorant superbement l’histoire et les réalités ethniques, ils ont oublié les sages recommandations faites en 1953 par le Gouverneur de l’AOF : « Moins d’élections et plus d’ethnographie, et tout le monde y trouvera son compte ».
Tout au contraire, ces mêmes responsables français n’ont pas cessé de vouloir imposer des élections, refusant de voir qu’à l’intérieur des artificielles frontières nées de la colonisation, puis de la décolonisation, l’ethno-mathématique électorale donne automatiquement le pouvoir aux plus nombreux, c’est-à-dire aux sudistes, ce qui provoque le soulèvement périodique des nordistes… Ils n’ont pas davantage compris que le Sahel est le domaine du temps long où l’affirmation d’une constante islamique radicale est d’abord la surinfection d’une plaie ethno-raciale millénaire. ■
* L’Afrique Réelle n°159 – Mars 2023 – Numéro spécial :Comprendre la question du Sahel
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Nos « élites » s’égarent de multiples façons. Deux parmi les plus belles plumes de JSF le soulignent ici avec talent. Il ne manquerait plus que ces élites emportent notre langue dans leurs errements. Au-delà des mots creux, de mauvaises habitudes -des lourdeurs surtout- s’installent et menacent de s’imposer.
Bernard Lugan, cédant lui aussi à cette vogue, nous parle d’une France « s’auto-embourbant ».
L’image des roues tournant dans le vide et maculant tout autour de soi, comme un hippopotame en colère, est certes parlante mais le pléonasme choque. Notre « se », tel quel ou élidé en « s' », aurait-il cessé de compter s’il ne roule pas en auto, tel un minable piéton ? On a dû s’habituer au redondant »se suicider »; va-t-il falloir, pour se faire comprendre, passer à s’auto-suicider? un peu comme « au jour d’aujourd’hui », tumeur formée sur le simple « hui » (du latin « hoc dies »).
On les entend et les lit de plus en plus souvent les s’auto-accuser, -détruire, -promouvoir, -justifier, etc. ? Quelle façon de s’auto-exprimer ! Ils sont lourds et même ridicules ces voiturages, et peu propices aux commodités de la conversation ! Avant de s’auto-présenter, à une convocation, par exemple, faudra-t-il bientôt s’auto-laver, -raser, -maquiller, -coiffer, -nourrir… s’auto-habiller, enfin, et s’y auto-rendre en bus (ou en auto), sans s’auto-égarer ?. Une chose est sure, on peut déjà s’auto-électrocuter dans sa voiture (ou sur son vélo).
Vous m’avez régalé. Merci.