PAR RÉMI HUGUES.
C’est une piste de réforme qu’envisage Rémi Hugues, lui-même enseignant. Le sujet s’impose comme l’une des urgences pour notre société. Nos lecteurs en débattront s’ils le souhaitent.
CRÉER UNE VOIE ACADÉMIQUE ET UNE VOIE ENTREPRENEURIALE À PARTIR DE LA 4e
RENDRE LA SCOLARITÉ OBLIGATOIRE JUSQU’À 18 ANS
UTILISER LES MISSIONS LOCALES POUR ASSURER UN SUIVI INDIVIDUALISÉ POUR LES ÉLÈVES EN SITUATION D’ÉCHEC SCOLAIRE (DÉCROCHEURS OU EXCLUS)
En janvier 2023 le ministre de l’Éducation Pap Ndiaye a annoncé des mesures pour réformer le collège, qu’il qualifie d’ « homme malade » du système scolaire français. Sauf que les mesures qu’il propose sont cosmétiques : les élèves de sixième vont bénéficier d’une heure hebdomadaire en français ou en mathématiques au détriment de la technologie. C’est tout…
Partant du constat que font la majorité des enseignants, à savoir que les classes de 4e et de 3e sont les plus difficiles, la mission du « nouveau collège » serait au préalable d’opérer une distinc-tion entre les jeunes doués pour les abstractions (a priori une minorité) et ceux doués pour les choses concrètes (a priori la majorité) durant les deux premières années (6e et 5e).
Partant du principe que nos élites considèrent que ce qui fonctionne le mieux pour leurs enfants est le système des C.P.G.E. (classes prépa’ aux grandes écoles), il s’agit de s’en inspirer pour l’ensemble des jeunes adolescents français, en choisissant comme mode principal d’évalu-ation, en plus du classique devoir sur table, les « khôlles » (examens oraux).
Celles-ci devraient un jouer un rôle majeur dans le processus de sélection des élèves doués pour les abstractions, qui sont voués à intégrer, pour les deux années restantes du collège, la « voie académique », qui débouche au lycée sur la voie générale, avec en vue des études supérieures longues, ou la voie technologique, avec en vue des études supérieures courtes.
Le niveau d’exigence pour cette voie académique doit être relevé, c’est-à-dire peu ou prou similaire à celui qui existait dans les années 1980.
Mais le cœur de cette piste de réforme porte sur les jeunes en proie à l’échec scolaire et à l’illettrisme. Le collège peut les valoriser en leur proposant comme perspective d’être un jour chefs d’entreprise. Ceux dont les résultats sont insuffisants pour intégrer la voie académique passent les deux dernières années du collège à suivre un cursus appelé « voie entrepreneuriale ». À cet âge-là il est trop tôt pour former à un métier précis : il est préférable de suivre une formation adaptée, basée sur des activités en petits groupes destinés à leur apprendre à lire, écrire, compter, avec en plus des ateliers ludo-éducatifs (certains jeux sur ordinateur sont exploitables comme matériau pédagogique efficient), du sport et surtout des stages professionnels. Il s’agit de se concentrer sur les disciplines fondamentales : français, mathématiques, anglais LV1 (ou autre langue selon les régions, comme allemand dans l’est ou espagnol dans le sud-ouest).
Les meilleurs élèves de voie entrepreneuriale pourraient intégrer la voie technologique au lycée (filières sciences et technologies de l’industrie et du développement durable (STI2D) ou sciences et technologies du design et des arts appliqués (STD2A) ou sciences et technologies du management et de la gestion (STMG) ou sciences et technologies de la santé et du social (ST2S) sciences et technologies de laboratoire (STL) ou sciences et techniques du théâtre, de la musique et de la danse (S2TMD), ou sciences et technologies de l’hôtellerie et de la restauration (STHR) ou sciences et technologies de l’agronomie et du vivant (STAV).
Les autres auraient le choix entre un baccalauréat professionnel spécialisé et un baccalauréat professionnel entrepreneurial, les deux se faisant en trois années. Ceux qui, âgés de 18 ans et plus, ne parviendraient pas à l’obtenir, pourraient bénéficier d’un accompagnement individualisé d’une année en mission locale, parallèlement à une activité professionnelle effectuée au minimum à mi-temps.
Les élèves de la voie entrepreneuriale du collège recevraient une rémunération égale à 20 % du SMIC horaire brut en 4e et à 25 % du SMIC horaire brut en 3e. Ils devraient alterner entre périodes à l’école et périodes en entreprise ou administration, le tout devant être égal au volume horaire actuel de scolarisation d’un élève de 4e et 3e. ■
À lire de Rémi Hugues Mai 68 contre lui-même (Cliquer sur l’image)
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Créer un nouveau collège ? Oui, d’accord. Ca passe par la suppression du Capes (et de l’agrégation aussi).