Emmanuel Macron avoue son échec à convaincre Français et syndicats du bien-fondé de sa réforme, celle des retraites, et néglige le fait qu’à la fois sa politique et sa personne, sont massivement rejetés par les deux tiers du peuple français parce que ni l’une ni l’autre ne correspondent à ses aspirations profondes – on dirait aujourd’hui existentielles – superbement niées, ignorées, contredites et, en vérité, combattues par le Système. Régime oligarchique qu’Emmanuel Macron était chargé – notamment par les oligarques détenteurs de la véritable puissance d’aujourd’hui, finance et médias – de sauver et de prolonger après l’expérience de désolante médiocrité du quinquennat de François Hollande. Lequel avait d’ailleurs suscité plus de pitié que de haine. Le contraire, au fond, de la réaction des Français à l’égard de son arrogant et alors juvénile successeur.
Le Figaro, dans son éditorial de ce matin, titre sans grande originalité mais évidemment avec raison, qu’Emmanuel Macron, hier, malgré un ton autoritaire et sûr de soi, a fait chou blanc. Mais que pouvait-il faire d’autre ? A quoi eût-il servi de changer de Premier Ministre ? Dans le vide sidéral qui l’environne, quel Castex aurait pu trouver le Chef de l’État pour succéder à Borne ? Et quel en eût été l’effet, sinon le ridicule ? Retirer le projet serait un suicide. Dissoudre reviendrait à organiser la faillite parlementaire de son camp, à renforcer sans-doute assez substantiellement celui de Marine Le Pen, à installer une nouvelle Assemblée probablement, elle aussi, introuvable. Reste à flatter le parti de l’ordre qui pourrait aisément s’enfler si les violences des radicaux d’ultragauche s’étendaient par trop : Emmanuel Macron l’a fait comme de juste. Et les syndicats de police affirment que les Forces de l’Ordre ont pour consigne de ne pas arrêter inconsidérément les radicaux Black-Bloc, comme le faisait déjà Castaner au temps des Gilets Jaunes.
Restent, alors, les jeux politiciens, l’ouverture, comme jadis, sous la IVe, et, puisque les partis traditionnels sont à l’état gazeux, ou, comme l’écrit José d’Arrigo, sont à l’agonie, Elisabeth Borne a la confiance du Président mais, en vérité, juste le temps de réussir – ou non – le maximum de débauchages individuels à gauche comme à droite selon les besoins et les possibilités. Emmanuel Macron croit-il, dans la situation de discrédit général qui frappe la classe politique, que les vieilles recettes de l‘ouverture suffiront à combler le fossé qui se creuse immensément entre le Pays et le Système ?
C’est, bien sûr, l’extrême fragilité de ce dernier qui est le fait majeur. Les Institutions de la Ve République, sans-doute les meilleures qui pouvaient être mises en place dans un cadre républicain, ont marqué leurs limites. Progressivement déconstruites dans ce qu’elles avaient de plus efficace, elles sont désormais retombées dans les errements, les compromissions et les abandons de la plus extrême gravité, de ce que De Gaulle appelait le Système.
Ainsi donc, comme l’a écrit Louis-Joseph Delanglade dans son éditorial du dernier lundi : « Macron joue avec le feu ». Et comme au temps des Gilets Jaunes, on se dit que son Pouvoir ne tient plus guère qu’à un fil : le loyalisme policier. Ce n’est une situation ni confortable ni durable.
Vivement un changement de regime la visite du roi Charles III peut-être une source d’inspiration