PAR RÉMI HUGUES.
Article en 6 parties, publiées à dater du dimanche 28 mai puis les jours suivants. Jusqu’à aujourd’hui, où s’achève cette série.
La conquête électorale en ligne de mire
Le mouvement frériste est favorable à un mouvement perpétuel d’immigration de populations du Sud en Europe afin d’y accroître le nombre de musulmans, religion d’une part substantielle de ces populations. En parallèle ils instaurent des partis politiques dans chaque pays, qui se présentent à un maximum d’élections.
Dans son essai Baudoin Long met en évidence que la Confrérie « s’est ralliée depuis longtemps à l’idée que les urnes sont un meilleur moyen pour arriver au pouvoir que la violence ou la révolution.
Néanmoins, pendant la transition, les Frères musulmans montrent qu’ils n’acceptent de la démocratie que son fonctionnement institutionnel réduit à l’élection. Parvenus au pouvoir, ils répliquent à l’échelle du pays le centralisme autoritaire qui régit leur organisation. »[1]
Ils comptent ainsi prendre le pouvoir par les urnes pour ensuite instaurer un État islamique, une théocratie musulmane ; dans les années 1990, alors qu’il est maire d’Istanbul, Erdogan « soutient à un […] journaliste que ‟la démocratie n’est pas un but absolu mais un moyen”, […] il assimile la démocratie à un tramway que l’on peut quitter à l’arrêt désiré. »[2]
Ils ne sont pas des démocrates de conviction, mais des démocrates de situation, d’opportunité. Le caractère sournois de leur agenda est aisément discernable, car çà et là ont pu sourdre des indications de leur double discours, parmi lesquelles deux ont été mentionnées plus haut.
Ne sous-estimons pas leur puissance : des institutions telles que la Ligue islamique mondiale, le Conseil suprême international des mosquées et la Banque islamique de développement sont sous leur coupe. Certes l’abondante liasse des pétro-dollars saoudiens s’est tarie[3] et la Confrérie est désormais totalement discréditée dans sa matrice égyptienne.
Toutefois son histoire est celle d’un mouvement qui a su miraculeusement se relever. Réduits quasiment à néant sous Nasser, à l’heure du nationalisme arabe triomphant, les Frères musulmans ont su faire preuve de résilience et ont connu avec l’arrivée du XXIe siècle leur moment de gloire. Ce fut le successeur de Nasser, Anouar el-Sadate, proche des Américains, qui « réintroduisit les Frères musulmans et leurs sympathisants dans la vie politique et laissa libre cours à leur influence »[4], qui a atteint son apogée lors des Printemps arabes.
Reste aux patriotes vigilants soucieux de contenir leur avancée, si ce n’est annihiler leur puissance, de ne s’allier, que ce soit sur le plan domestique ou international, qu’avec leurs ennemis. ■ (Fin de cette série).
[1]Baudoin Long, op. cit., p. 145.
[2]Ahmet Insel, op. cit., p. 170.
[3]Youssef Hindi, op. cit.
[4]Corm, op. cit., p. 30.
Publié le 17.12.2022 – Actualisé le 02.06.2023
À lire de Rémi Hugues Mai 68 contre lui-même (Cliquer sur l’image)
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C’est bien mené tout ça, mais inquiétant pour notre pauvre Europe, devenu si fragile