Par Front Populaire, La Rédaction.
Nous n’ajouterons pas de commentaire à cet article de la Rédaction de Front Populaire, paru hier 14 juin. Occasion heureuse et utile de lire ou relire la chronique que Pierre Builly avait consacrée à Bac Nord, il y a quasiment deux ans lors de sa sortie sur les écrans, le 18 août 2021.
ARTICLE. À l’occasion d’un reportage, les équipes de la bien-pensante émission Quotidien se sont rendues dans l’une des cités les plus criminogènes de Marseille à dos de scooter, avec comme guide un rappeur du cru. La réalité n’est pas loin de dépasser la fiction.
« Dès qu’une voiture entre, il faut ouvrir les coffres, voir qui est à l’intérieur et demander ce que la personne vient faire là pour qu’il n’y ait pas de policier caché »
Porte-étendard de la bien-pensance à la télévision, l’émission Quotidien a eu la bonne idée de visiter les quartiers nord de Marseille dans un reportage de plusieurs dizaines de minutes dédié à la cité phocéenne. En bas de la cité des Oliviers A dans le 13e arrondissement, l’un des principaux points de trafic de la ville, le reporter Martin Weill attend sagement les deux hommes grâce auxquels il pourra entrer dans la cité. L’un des deux « garants », un certain rappeur de 22 ans surnommé Hiitch, le fait monter sur sa moto. La voix off décrit alors la scène : « Ici, le casque est en option. Mais ce n’est pas le plus surprenant : nous découvrons une cité barricadée. Le trafic de stups générerait 80 000 euros de chiffre d’affaires par jour. »
À l’image de ce que l’on voit dans Bac Nord, film sorti en 2021 et qui suit la brigade anti-criminalité des quartiers nord de Marseille, plusieurs poubelles et caddies sont mis en travers de la route et des guetteurs sont placés à l’entrée de la cité. L’objectif ? « Contrôler le quartier ». « Dès qu’une voiture entre, il faut ouvrir les coffres, voir qui est à l’intérieur et demander ce que la personne vient faire là pour qu’il n’y ait pas de policier caché », assure le rappeur. « Si la police vient, on renverse les poubelles pour les ralentir. Dès que les CRS viennent dans le quartier, ils enlèvent les barrages, donc on est tout le temps obligés d’innover », poursuit-il. « Il n’y a pas un gros froid entre les habitants et les trafiquants, mais les barrages anti-police, ça dérange un peu les habitants, c’est normal », concède celui qui « s’en est sorti par le rap », selon la voix off.
Quotidien fait ami-ami avec les trafiquants
Les interlocuteurs y ont le visage caché, hormis le rappeur Hiitch. Ils déplorent la vétusté des immeubles : on y apprend que plusieurs ascenseurs sont en panne, obligeant les habitants des étages supérieurs à prendre le seul ascenseur fonctionnel de l’une des tours pour entrer dans les logements des autres immeubles. Autour de l’alimentation électrique de l’ascenseur, les grilles sont cassées. « C’est très dangereux. Dans les coins aisés (de la ville), vous ne verrez pas ça », se lamente le rappeur Hiitch. À la question bien mielleuse du reporter : « Vous vous sentez délaissés ? », le rappeur répond : « Très fortement. »
Que dire de ce reportage où l’équipe de Quotidien semble faire ami-ami avec des hors-la-loi ? Interviewé à l’occasion par Quotidien, l’auteur marseillais Hadrien Bels estime toute honte bue qu’ « on a plus de 40 ans d’abandon dans les quartiers nord, c’est un désastre ». En barricadant les cités pour faire fructifier tout un business, ce sont les délinquants qui organisent leur propre isolement et autarcie. Pour l’un des habitants des Oliviers A, son but ultime est de « sortir du quartier (…) aller avec les riches, de l’autre côté de la ville ».
Vivement critiqué par une partie de la bien-pensance de gauche, considéré comme « démago, raciste et viriliste » par Libération, le film Bac Nord avait visé juste. Et ce n’est plus Quotidien qui pourra dire le contraire. ■
Source