On dira tout ce qu’on voudra de la dictature exercée de 1965 à 1997 par Joseph-Désiré Sese Seko Mobutu sur l’ancien Congo belge devenu alors le Zaïre mais on ne pourra pas enlever à ce flamboyant chef d’État africain d’avoir été un sincère et authentique défenseur urbi et orbi de la francophonie. Ce n’est pas lui, tel le président Macron, qui aurait parlé publiquement en angloricain …
En outre, le maréchal président avait de l’humour, vertu rarissime parmi les dirigeants du Tiers-monde, faisant par exemple s’esclaffer tout le gratin francophone réuni en sommet à Québec en 1987, en s’exclamant Coram populo : « Dieu merci les Belges ne nous ont pas colonisés en flamand ! … »
Tout au long de son trentennat, je notai également les allusions toujours respectueuses et même parfois admiratives de Mobutu à l’endroit de la dynastie germano-française régnant sur la Belgique depuis 1831, grâce à la monarchie de Juillet. Personnalité à facettes, Mobutu fut aussi un lecteur assidu de Machiavel. (Photo : Mobutu avec le roi Baudouin et la reine Fabiola au Congo, fin juin 1970).
LA NÉCROPOLE CHRÉTIENNE DE RABAT
Autre bon mot carabiné ayant mis de son côté les rieurs (et tous ceux, fort nombreux qu’agaçaient les leçons politiques données à tout vent à cette époque par des Arabes fraichement indépendants …) : « hier les arabes nous vendaient, maintenant ils veulent nous acheter … » allusion diplomatiquement osée si on songe à l’omerta que la tyrannie du politiquement correct a imposée depuis la seconde moitié du XXème siècle sur l’esclavagisme arabo-musulman, étalé sur 1000 ans et autrement dévastateur que les trois siècles de traite européenne durant laquelle au moins les mâles n’étaient pas émasculés …
Parmi les facéties privées de « papa maréchal », signalons son choix drolatique de s’être mis sans le dire bien sûr en ménage avec deux sœurs jumelles de son pays, ce qui lui permettait de conserver une façade monogame … Et lui assurait le soutien des très nombreux chrétiens africains polygames …
Paladin de la langue française, champion de l’humour politique décomplexé, Mobutu eut aussi l’heureuse idée de mettre fin, même si ce ne fut hélas que provisoire, à l’agaçante confusion entre les deux Congos, en appliquant à son pays un vieux vocable afro-portugais : Zaïre, qui rappelle Voltaire par son agréable sonorité ; au reste, ce nom n’était pas une fantaisie mobutienne puisqu’il fut employé tel quel la première fois dans l’Encyclopédie en 1760.
Cher Mobutu, repose en paix en terre marocaine, dans la luxuriante nécropole chrétienne de Rabat où s’est peu à peu instauré de facto sur le tombeau présidentiel une sorte de pèlerinage mémoriel de la part de Zaïrois-Congolais passant par le Royaume chérifien. Sic transit gloria Mundi. Un de ces pèlerins improvisés me disait : « on commence à reconnaitre mezza vocce à Kinshasa que la décennie 1965-1975 a été un âge d’or, hélas révolu, de notre pays. » ■
Longtemps correspondant du Monde dans l’aire arabe, Péroncel-Hugoz a publié plusieurs essais sur l’Islam ; il a travaillé pour l’édition et la presse francophones au Royaume chérifien. Les lecteurs de JSF ont pu lire de nombreux extraits inédits de son Journal du Maroc et ailleurs. De nombreuses autres contributions, toujours passionnantes, dans JSF.
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bonjour
a lire
tres bien
cordialement
Avec la nouvelle vague de piètres politiciens en France, pour ne pas dire des criminels, les amis de la France étaient devenus des ennemis. Maintenant, grâce au courage de la Russie face à l’OTAN, c’est l’Occident, donc la France les ennemis de l’Afrique, sans parler du reste du monde.
Je ne ferai pas l’éloge de Mobutu mais à sa décharge l’ex Congo belge que j’ai visité en 1979 est parvenu trop tôt à l’indépendance sans cadres suffisants et est trop vaste pour être gouverné.