Commentaire – Quand Régis Le Sommier – journaliste des plus experts – répond aux questions de CNEWS, hier en début d’après-midi, l’on ignore comment se conclurait la rébellion de Wagner, si tant est qu’elle soit terminée. Si elle l’a été, hier soir, par le repli de Prigojine et l’accord passé avec Moscou, elle continuera bien sûr de peser au cœur des composantes du Pouvoir russe.
La presse écrite, disons-nous, a somnolé ce weekend d’été, pourtant agité d’images russo-ukrainiennes plutôt inquiétantes, des menaces et des volte-face qu’elles offraient. De sorte que sites et journaux ne présentaient guère de traces de réflexions de fond sur le sujet, au matin de ce dimanche.
Les chaînes d’information en continu, en revanche, qu’elles soient aux ordres stricts de l’alliance euro-étatsunienne, comme LCI en donne un insigne exemple, ou moins obéissantes, comme CNEWS, s’en sont donné à cœur joie, tantôt supputant la fin prochaine de Poutine, qui, d’ailleurs, on l’a oublié, devrait être mort depuis plusieurs mois, si l’on en croyait ce qu’on nous disait alors avec une belle certitude, ou que l’on soupèse les avantages que la mythique et poussive contre-offensive ukrainienne pourrait bien tirer de la toute probable déconfiture russe.
L’on a fini, au fil des heures, par s’étonner que Vladimir Poutine ne soit pas le tout puissant autocrate au Pouvoir sans partage que l’on croyait, ou que l’on disait croire. Il fallait encore constater combien la Russie est fragile, son Etat plus faible qu’il ne le prétend, ses autocrates pas si infaillibles et incontestés que ça. Etc.
Quel est le niveau de culture – historique, géographique et politique – des observateurs qui font part de tels étonnements ? Le Pouvoir a-t-il jamais été sans partage ? Jamais incontesté, sans opposants, sans risque d’être renversé ? Les sociétés politiques ont-elles jamais été parfaitement unies ? N’ont-elles pas été souvent composites ou pluriethniques, et parfois déclinantes ? L’histoire et la géographie russes, des Tsars, jusqu’aux gérontes du Kremlin à l’heure soviétique, et jusqu’à Poutine, Prigojine et autres d’aujourd’hui, répond intégralement à ces questions, en somme naïves.
Pour diverses raisons parmi lesquelles son immensité aux frontières et aux populations mal définies et peu fixées, d’où, aussi, son histoire, le monde russe est peut-être plus que d’autres sujet aux difficultés que nous venons à peine d’esquisser. Quand on observe avec quelque attention le monde occidental et ce qu’il devient, d’Est en Ouest, des deux côtés de l’Atlantique, on se dit pourtant qu’il faut pas mal d’inconscience et de vanité pour pointer avec horreur les faiblesses existant chez les autres. L’actualité de la parabole de la paille et de la poutre n’a jamais été aussi grande.
Cet épisode nous ramène au XVI° siècle, à une époque où les princes pouvaient être mis en danger par une troupe de mercenaires qui arrêtaient le combat ou même changeaient de camp en pleine bataille. Par définition les relations des mercenaires sont contractuelles et toute incartade au contrat justifie des sanctions.
Il est malheureusement peu probable qu’un Gustave Flaubert se manifeste à notre époque mais le rôle de la Biélorussie mérite certainement une analyse plus importante.
Si Poutine a pu se maintenir au pouvoir alors que la Russie a changé de décor officiel c’est mal connaitre le personnage en imaginant qu’il aurait pu être réduit au silence…
Prigogine, encore un bel exemple pour un exercice d’empirisme organisateur sur les coups d’Etats. Profitons-en pour préparer les esprits dans le mouvement-école…