Par Édouard Balladur.
Cette tribune est publiée dans Le Figaro de ce matin. Elle révèle que l’ampleur que prend le déclassement de la France dans la plupart des grands domaines fait monter l’inquiétude des gens encore censés, fussent-ils d’esprit modéré ou libéral, comme l’est Edouard Balladur. Les plus anciens de nos lecteurs se souviennent sans-doute qu’avec Pierre Juillet et Marie-France Garraud, Edouard Balladur a pratiquement gouverné la France au long de la maladie de Georges Pompidou, puis, à nouveau, cette fois-ci comme Premier ministre, durant celle, longue et cruelle, de François Mitterrand. Marie-France Garraud qui ne manquait pas de méchanceté l’appelait Ballamou. Il n’était pas, en effet, un foudre de guerre mais il avait quelques principes simples et le sens de l’État. À 94 ans cet homme constant ne peut pas être suspecté de visées politiques. Il s’alarme simplement pour la survie de la France et propose quelques solutions qui n’ont rien de bien révolutionnaire, qui sont simples à exprimer mais sans doute pourtant difficiles à mettre en œuvre dans le régime politique français tel qu’il est aujourd’hui. Edouard Balladur appelle ainsi à une sorte de sursaut national à sa manière, sursaut qui, sans-doute, contribuerait à « enrayer (…au moins partiellement…) – le déclin du pays ». C’est au moins « un signe des temps » à prendre en compte.
TRIBUNE – L’ancien premier ministre publie une note, pour Fondapol, intitulée « L’Europe et notre souveraineté », dans laquelle il déplore que, sous couvert d’État de droit, l’Union européenne se soit arrogé de nombreuses compétences nationales. Il propose de soumettre aux Français plusieurs référendums pour leur permettre de recouvrer leur souveraineté et ainsi d’enrayer le déclin du pays.
« Si la France veut survivre, l’Europe doit être réorganisée et la France doit demeurer responsable de son propre destin
Il faut assurer la supériorité de la Constitution française sur toute autre règle de droit, nationale ou internationale »
La création d’une Europe organisée est la grande initiative du siècle précédent. Mais, depuis trente ans, le monde a changé au détriment de l’Europe. La France a changé davantage encore et paraît atteinte dans ses forces vitales. L’Europe peut-elle contribuer à son redressement? Rien n’est moins sûr. Des progrès ont été recherchés, mais dans un désordre qui a permis à la technostructure européenne d’accroître encore son pouvoir.
En 2008, le traité de Lisbonne a accentué les travers de la construction européenne.
Depuis, la France a pris l’initiative de proposer un nouvel élargissement et fait des propositions regroupées sous le vocable de la souveraineté de l’Europe. Qui s’y retrouve? Il est temps de sortir du désordre, de poser quelques principes simples.
– Il faut sortir de l’ambiguïté, la France doit demeurer souveraine dans certains domaines essentiels. L’Union n’est pas une organisation fédérale et ne doit pas le devenir.
– Il est indispensable que soit rédigé, pour préciser les compétences de chacun, un code européen s’imposant à tous afin de mettre fin aux équivoques dont est coutumière la Commission européenne, tout comme, dans un autre registre, le Parlement.
– Il importe de revoir dans un sens plus équitable, tenant mieux compte des réalités, la répartition entre les membres de l’Union des postes à la Commission, au Parlement, ainsi que les voix attribuées à chacun au sein du Conseil européen.
– Cette modification faite, il faudra veiller à ce que chacun des organes de l’Union respecte ses compétences. En tout cas, la France doit, dans les domaines diplomatique et militaire, conserver son indépendance.
– Il y a lieu de préciser également la compétence et le rôle des juges nationaux et supranationaux au regard du pouvoir politique et gouvernemental.
– Avant tout élargissement, définir clairement la construction de l’Europe en cercles à compétences et à compositions variables, en faire un principe de base.
Aussi longtemps que toutes ces conditions préalables n’auront pas été remplies, il faudra suspendre tout élargissement de l’Europe.
Dans le même temps, la France doit sortir du déclin qui la menace. La lutte contre les déficits, l’endettement, l’insécurité, et pour l’amélioration de la compétitivité, du système éducatif, hospitalier, pour la régulation effective de l’immigration, demeurent des compétences nationales.
Il faut assurer la supériorité de la Constitution française sur toute autre règle de droit, nationale ou internationale. Actuellement, sous couvert d’État de droit, l’Union européenne s’empare de la «compétence de sa compétence», qu’elle estime devoir définir elle-même en toute indépendance. Jusqu’à présent, les trois cours suprêmes françaises, Conseil constitutionnel, Cour de cassation et Conseil d’État, ont peu ou prou laissé faire.
Pour faire échec aux dispositions d’un texte européen de nature législative, il faut, selon la jurisprudence, que soit mis en cause un principe constitutionnel inhérent à l’«identité constitutionnelle» de notre pays. Notion vague et n’offrant pas de garantie véritable.
Doit-on adopter le principe selon lequel le peuple est le seul titulaire d’une souveraineté suprême, dont la volonté, exprimée dans la Constitution adoptée par référendum, l’emporte sur toutes les normes nationales, européennes ou internationales?
Pour redonner aux Français confiance dans leur avenir au sein d’une Europe qui respecte leurs intérêts fondamentaux, ils devraient être appelés à approuver par référendum une politique européenne rénovée. Mais ce serait, déclare-t-on, contraire à la Constitution, en raison du champ limité du référendum.
C’est exact. Aussi faudrait-il au préalable modifier la Constitution pour étendre le champ du référendum. Dans un deuxième temps, l’organisation nouvelle de l’Europe pourrait à son tour être soumise à l’approbation du peuple français. Ainsi serait-elle aussi démocratique qu’il est souhaitable. Tout ceci serait-il trop dangereux pour la sérénité de notre vie publique? Citons de Gaulle, qui lançait, dès le 1er octobre 1948: «Je crois qu’en France la meilleure Cour suprême, c’est le peuple.»
On nous prédit qu’en 2100, par la richesse produite, la France serait la 25e puissance au monde. Quel serait le poids d’une France aussi affaiblie, pourrait-elle prétendre maintenir son indépendance militaire et diplomatique? J’ignore quelle est la qualité de cette prévision. Mais si la France se résignait, qui déciderait à sa place lorsque ses intérêts essentiels, sa vie même seraient en jeu? Il est inconcevable que la France s’en remette à quiconque d’autre qu’à elle-même. Il n’y a pas d’alternative. Si la France veut survivre, l’Europe doit être réorganisée et la France doit demeurer responsable de son propre destin. Ce sera long, difficile, il faut commencer sans tarder. ■
Il ne manque pas d’air le vieux ! Après avoir bien contribué lui et ses amis depuis 40 ans à la situation présente.
Il est bien temps de se préoccuper du destin de la France alors qu’il est coresponsable du désastre actuel. De grâce, ayez un peu de mémoire monsieur, vous qui avez été premier ministre et au gouvernement pendant des années. Vous avez même profité des vacances pour arnaquer les Français du privé pour le décompte de leurs retraites . Faites vous oubliez, et profitez de votre retraite qui doit être bien grâce par rapport à la majorité des Français.
Je voulais dire une retraite bien grasse. Pardonnez moi.
Edouard Balladur représentait, en 1994-95, l’exemple même de ce que les nationalistes détestaient ; c’est pourquoi bon nombre se sont précipités dans les bras de Jacques Chirac, qui avait le verbe haut et l’énergie ostentatoire .
Une fois de plus la République montrait qu’elle aveugle les yeux des patriotes.
Il n’est pas tout à fait impossible que Balladur aurait été un Président moins pire que Chirac…
Mais quel gâchis !
Mieux vaut tard que jamais Monsieur Balladur
Je suis assez de l’avis de Pierre Builly. Et la réaction sage de Claude Armand Montrond me paraît la bonne.
À quoi sert le reproche la rancune le regret à l’égard de ce qui n’a pas été fait dans le passé, surtout adresser à un homme de 94 ans, qui a fini sa course, et ne fait que recommander une politique d’indépendance nationale et de permanence du Pays. Il n’a pas mené une telle politique quand il était aux affaires ? Nous savons ça. On peut le redire, pour l’histoire. Mais ça n’a rien d’un scoop et ça ne sert plus à rien. L’appel de Balladur via Fondapol ne servira peut-être à rien, non plus ? Ce n’est pas sûr.
Depuis giscard a macron,,, combien on pense a l indépendance de la France
Ils ont vide les caisses
Rivarol disait « l’homme passe son temps à raisonner le passé se plaindre du présent et craindre l’avenir »
Rien de nouveau sous le soleil, ceux qui ont tenu les manettes à un moment de leur vie sont bien placés pour savoir ce qu’il ne faut pas faire et avec le recul du temps nous pouvons nous permettre de juger les résultats. Rétablir la confiance et maîtriser les pouvoirs de l’Europe font partie du miracle espéré pour notre survie.