Emmanuel Macron est en visite pour trois jours dans la deuxième ville du pays, dans le cadre de son plan « Marseille en grand »
Par Jean-Paul Brighelli.
Commentaire – Cet article est paru dans Causeur hier 27 juin. Brighelli, ce sont toujours de libres réflexions ponctuées d’humour, de paradoxes et d’ironie, et qui font mouche. Rien de ces ingrédients ne manque à ce tableau où se mêlent l’histoire, la politicailleerie locale, le pittoresque marseillais, la littérature aussi, puisque l’affaire Pagnol y est évoquée, et, enfin, in cauda venenum, la geste mmacronnienne dans la deuxième et peut-être la plus ancienne ville de France où il a pris l’habitude de donner l’un de ses shows préférés et où il a installé son laboratoire d’élection pour l’élaboration de la France de demain, inclusive, multiculturelle, multiethnique, diversitaire (LGBT…) et tout ce qui s’ensuit. Plus Trudeau que jamais, Macron se survit. Mais qu’en sera-t-il de la France ?
Installé aux premières loges pour assister au déferlement du barnum présidentiel sur la cité phocéenne où il habite, Jean-Paul Brighelli rend compte, avec l’objectivité qu’on lui connaît, des bonnes intentions d’Emmanuel Macron dans cette ville dont aucune subvention n’étanchera la faillite.
Les rois de passage à Marseille, depuis le rattachement de la Provence au royaume (1481), promettaient de respecter les « chapitres de paix » qui constituaient le droit public de la ville.
Je sirotais mon premier café du matin au Bar de la Marine, ce lundi, quand une demi-douzaine de voitures maquillées de noir, vitres opaques et sirènes hurlantes, ont remonté le quai de Rive-Neuve à toute allure. Direction sans doute la Villa Valmer, au-dessus de la Corniche, qui sert de résidence ordinaire au président de la République lorsqu’il installe ses pénates à Marseille. « Tiens, a dit le tôlier, Sa Majesté est de passage. »
Protocole marseillais
Les rois de passage à Marseille, depuis le rattachement de la Provence au royaume (1481), promettaient de respecter les « chapitres de paix » qui constituaient le droit public de la ville. Comme l’a raconté jadis La Marseillaise, « le souverain s’arrêtait à la porte Réale et jurait de respecter les « privilèges, franchises et libertés de la ville de Marseille ». Les clefs de la ville lui étaient alors remises. » Quand il vint, après Marignan, admirer le rhinocéros provisoirement exilé sur l’île d’If, François Ier respecta ce protocole.
En 1660, se souvenant que la ville n’avait pas pris son parti pendant la Fronde, Louis XIV, qui avait un caractère vif et rancunier, refusa de passer par la porte : il fit détruire un pan des murailles, afin que son cheval, en entrant, foule aux pieds les libertés de la ville. Il avait auparavant dispersé dans la ville près de 7000 hommes (1 pour moins de 3 habitants), et frappé les Marseillais d’une taxe exceptionnelle de 150 000 livres. Et Sa Majesté Très Chrétienne refusa les clefs que symboliquement lui tendait le viguier de la ville, Monsieur de Pilles.
C’est peu après qu’il fit construire les deux forts, Saint-Jean et Saint-Nicolas, qui bouclent le Vieux-Port, et dont les canons sont tournés vers la ville. C’est depuis cette époque que les fans de l’OM détestent ceux du PSG.
Macron n’en est pas là, même si les forces de l’ordre ont été déployées largement.
Échanges
Le programme du président est essentiellement consacré à des rencontres avec les habitants des cités perdues des quartiers Nord, les Campanules dans le 11ème, la Busserine dans le 14ème, une école du 16ème, puis Benza, dans le 10ème. Visites entrecoupées de déplacements aux Baumettes (la prison locale) pour y rencontrer les gardiens, à l’Evêché (la grande maison poulaga de la cité phocéenne) pour y discuter avec les policiers, et à l’hôpital militaire Lavéran, dans le 13ème, pour parler santé. Le président « échangera avec des associations et des mères de famille », écrit La Provence. Curieux usage contemporain de ce verbe, utilisé de façon absolue. En français, on échange quelque chose avec quelqu’un. « Président de la République échangerait logement spacieux, 55, rue du Faubourg Saint-Honoré, contre trois-pièces exigu dans immeuble délabré à La Castellane. » Ça aurait de la gueule.
Mais il rentrera tranquillement à Valmer, avec vue imprenable sur la rade et les îles du Frioul. À deux pas de chez Peron, l’un des meilleurs restaurants de la ville, où il a ses habitudes.
Pour se remettre d’un emploi du temps si chargé, Macron prononcera ce mardi un discours sur la Méditerranée au fort Saint-Jean (celui dont les canons — voir plus haut), visitera la reconstitution de la Grotte Cosquer (après sa visite au Mont Saint-Michel, il renoue le fil avec la plus haute histoire de France, hier lui et l’Archange, aujourd’hui lui et le rhinocéros laineux), et finira la journée dans une garden-party organisée au MUCEM. Si c’est l’équipe du Môle-Passedat (le restaurant du musée) qui l’organise, ça ne devrait pas être sale…
Benoît Payan, otage de Macron et de l’extrême gauche !
Macron vient à Marseille, « laboratoire » de sa nouvelle France, avec des cadeaux et des subventions plein les mains. Il vient y jouer au maire, avec un panel de ministres à sa suite : Garde des Sceaux, Éducation nationale (pour combien de temps ?), Culture, Santé, Transports, Ville et logement. Il tiendra d’ailleurs à Marseille le traditionnel Conseil des ministres, mercredi. De quoi éclipser Benoît Payan, édile de hasard, furieux de cette tornade macronienne qui va passer plusieurs fois sous ses fenêtres. Un maire arrivé là par désistement — sans doute préparé d’avance — de la tête de liste EELV, Michèle Rubirola. Un maire socialiste qui est pratiquement l’otage complaisant de sa majorité crypto-gauchiste, celle qui vient d’évincer l’héritier Pagnol du château de la Buzine, consacré à la célébration de l’écrivain, pour y installer un éventail d’« associations » amies, pompes à subventions. Macron tranchera-t-il, se demande le Huffington Post… Ce serait une bonne idée.
On peut s’interroger sur ce terme de « laboratoire ». Parce qu’enfin, dans sa voiture blindée aux vitres teintées, le président passera à côté de l’islamisation rampante, des 100 000 clandestins arrivés d’Afrique noire, des voiles portés par une musulmane sur deux, des abayas qui s’infiltrent à l’école, et de la pauvreté sidérante de la deuxième ville de France. Les Marseillais ne lui savent aucun gré de sa sollicitude, ils ont massivement voté contre lui aux présidentielles, et renvoyé certains de ses députés élus en 2017 à leurs chères études. Mais peu lui chaut : après lui le déluge — et après Louis XIV, Louis XV.
Ou Louis XVI ? ■