Par Gérard Pol.
Nous nous étions promis de ne plus rien écrire sur les agressions et attentats qui ponctuent désormais nos jours et nos nuits.
Nous ne sommes pas une chaîne d’information en continu. Les lecteurs de JSF prennent connaissance de ces événements en même temps que nous. Ils en savent autant que nous sur ce qui est factuel. Ces violences sont devenues si ordinaires, banales, duplicables à l’infini, que l’on se demande pourquoi en parler encore, qu’en dire de plus… Comme des procédés déployés par les médias mainstream pour en rendre compte, ce qu’ils font avec une prudence de Sioux à la langue aussi fourchue que celle des reptiles les moins engageants. Les identités ne sont dévoilées que lorsqu’il est devenu impossible de les taire, les pires assassins pris sur le fait ne sont que des présumés coupables ; leurs voisins interrogés face aux caméras les décrivent comme personnes discrètes, polies et d’un commerce agréable ; la psychiatrie est aussi systématiquement appelée à la rescousse comme circonstance déresponsabilisante. Etc. Qu’importe que les Français aient peu à peu appris à discerner ces procédés artificieux, qu’importe qu’ils ne soient plus dupes, qu’importe leur dégoût : le cirque continue.
Mais qu’en dit le Chef de l’État ? Qu’en disent ses ministres ? Qu’en dit le personnel politique ? Et, désormais a contrario, qu’en disent les institutions qui sont les piliers protecteurs de la nation et de l’État aujourd’hui encore républicain ? Qu’en disent les Français dans leur immense majorité ? Par-delà les clivages droite-gauche, peut-être provisoirement, mais en tout cas à ce jour bel et bien dépassés. Dans cette distorsion de plus en plus nette entre le régime en place et la nation, réside à l’évidence le fait nouveau, grandissant, peut-être décisif.
Qu’avons-nous dit, nous-mêmes de longue date sur ce sujet somme toute mortel ? Qu’en organisant, pour toutes sortes de raisons dont certaines peu avouables, une immigration de masse, en optant pour le multiculturalisme, pour le multi-ethnisme à grande échelle, en faisant le pari d’une coexistence pacifique entre deux civilisations sur un même sol national, historiquement constitué depuis vingt siècles, nous ne couperions pas à une violence endémique, en partie comparable à celle jamais éteinte qui caractérise la société américaine. Nous y sommes en plein.
Nous avons dit aussi qu’en sapant ou même en niant les fondamentaux organiques et culturels de notre pays, en niant nos racines, en proclamant notre identité dénuée de substance propre, en acceptant notre mutation de gallo-romains en galloricains mondialisés, celle-là-même que Régis Debray a caractérisée pour la déplorer, en méprisant notre Histoire, en détruisant notre système éducatif et l’unité des familles – à mettre au passé – nous devenions incapables d’accueillir quiconque, a fortiori si ce devait être en quantités considérables, devenues au fil des années incontrôlables. Et inassimilables.
Qu’en dit le Chef de l’État ? Il pérore à Kigali, abaissant la France sans satisfaire personne. Il pérore dans Zadig où il étale un narcissisme immature navrant : son amour pour sa grand-mère, pour les Pyrénées, Amiens, Paris, les gilets jaunes – symboles de la réactivité française et des vieilles jacqueries toujours renaissantes… Et puis la Seine-Saint-Denis dont il fait l’éloge pour Zadig : c’est le département le plus jeune de France, il a deux aéroports et le Stade de France ; il est celui qui compte le plus grand nombre de start-up, il ne lui manque que la mer pour être une Californie* et à sa population immigrée il redit : « vous êtes une chance pour la France ». Et ainsi, quand, après chaque agression, Emmanuel Macron, serrant les poings et adoptant le ton mezzo voce du prêche, affirme : « nous ne cèderons rien », l’on voit bien qu’il faut en entendre le sens dual : nous ne cèderons rien, certes, au terrorisme, mais, en même temps, nous ne cèderons rien de notre politique d’immigration inclusive et massive. C’est ce que pense Emmanuel Macron, et donc ses ministres, ses fonctionnaires, et les médias mainstream.
Seulement, les dits médias ne sont plus seuls, des brèches se sont ouvertes dans leur Système naguère clos (CNews, bien-sûr, mais aussi Sud Radio, TVLibertés, les réseaux sociaux) et leur audience est devenue considérable. Une réaction intellectuelle puissante s’est constituée. Le délitement du pays est si violent, les campagnes antifrançaises de minorités groupusculaires sont si exagérées, elles ont franchi tant de bornes, les violences sont devenues si courantes, si radicales du côté des minorités ethniques activistes, leur jonction avec certains milieux intellectuels pétris d’arrogance, de sectarisme et d’esprit totalitaire apparaît si insupportable, que les mises en garde des militaires, la fronde des policiers, pilier indispensable du régime, la riposte des médias et des intellectuels non-inféodés, ont violemment secoué l’ensemble du système politique français, créant l’événement, la polémique, l’état de tension que l’on sait. Et l’opinion leur a donné raison, les Français – à 60 – 70 ou 80% selon les cas – les ont approuvés.
Qu’Emmanuel Macron – s’il se représente – soit ou non réélu l’an prochain, le Système est dans une impasse. Sa perpétuation devient problématique et le serait sans-doute davantage encore si l’actuel Chef de l’Etat était reconduit. Il n’est donc pas illégitime de lui demander s’il croit que, dans la situation actuelle, le régime est ou non appelé à durer longtemps. Les Français, eux, à l’évidence, sont en attente d’autre chose. ■
* Le Chef de l’État affectionne ce genre de formule. De l’administration Hollande – dont il faisait pourtant partie – on se souvient peut-être qu’il avait dit en se raillant : « C’est Cuba moins le soleil. »
Publié le 29 mai 2019 – Actualisé le 5 juillet 2023