Le thème, la tonalité, le fond de cet entretien sont assez inhabituels dans les colonnes du Monde. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas matière à discussion dans le propos de Jean-Christian Petitfils. Nous ne risquerons pas à en discuter nous-mêmes ici, laissant le soin à nos lecteurs ou contributeurs historiens de débattre, s’il y a lieu. Catherine a tout de même raison de déclarer que ce texte est « à lire, absolument ».
A l’occasion de la sortie de la collection « La Grande Histoire des rois de France », éditée par « Le Monde », à partir du mercredi 23 août, l’historien et politologue spécialiste de l’Ancien Régime revient sur quatorze siècle d’histoire du pouvoir en France. Et souligne la contribution que chaque monarque et ses conseillers ont apporté dans ce qui fait aujourd’hui les institutions de notre pays.
A la faveur de la publication de la collection du Monde « La Grande Histoire des rois de France », à partir du mercredi 23 août, l’historien et politologue Jean-Christian Petitfils, spécialiste des Bourbons et auteur, en 2021, d’une biographie d’Henri IV, explore les héritages de l’Ancien Régime et les rouages d’un pouvoir inscrit dans une continuité historique, toujours lisible de nos jours.
Comment expliquez-vous l’intérêt, voire la fascination, que portent les Français aux rois de France, malgré l’épisode sanglant et régicide de la Révolution ?
Si l’histoire contemporaine attire leur attention, avec bien entendu un tropisme particulier pour les deux guerres mondiales, ils se passionnent également pour l’histoire des rois, moins par nostalgie de l’ancienne royauté que par attrait pour son héritage historique et pour la « longue durée » chère à l’historien Fernand Braudel. Leur ressenti d’un déclin du pays nourrit sans doute aussi leur nostalgie de ses grandeurs passées (on connaît la fameuse phrase de Talleyrand : « Qui n’a pas vécu dans les années voisines de 1780 n’a pas connu le plaisir de vivre »).
Ils savent que la France ne commence pas à la révolution de 1789 et à la Déclaration des droits de l’homme. Soucieux de retrouver leurs racines et leur fierté nationale, ou, s’ils sont devenus français plus récemment, de s’enraciner dans l’histoire de leur pays, ils ont besoin d’en comprendre sa lente formation pour mieux percevoir les données du monde actuel. L’histoire, en effet, ne se répète jamais à l’identique. Toutefois, comment nier que l’expérience historique fournit la plupart des clés de compréhension du présent ?
De Clovis à Charlemagne, de Saint Louis à François Ier ou d’Henri IV à Louis XVI, quels sont les rois qui, selon vous, ont le plus durablement marqué le destin de la France et de l’Etat ?
Pour moi, il est clair que les Mérovingiens et les premiers Carolingiens n’appartiennent pas à la lignée des rois de France, même si Clovis et Charlemagne ont joué un rôle capital dans la construction de l’imaginaire monarchique (le premier par son baptême chrétien, le second par son couronnement). La Francia occidentalis, d’où est sortie la France actuelle, naît en 843 au traité de Verdun, sur les ruines de l’empire carolingien, pas avant.
Si l’on veut dresser la liste des grands rois qui ont marqué le destin de la France, il faut d’abord écarter tout jugement moral sur leur personne. Certains sont des saints, d’autres des cyniques ou même de fichus coquins. Mais tous ont plus ou moins œuvré, en bons Capétiens, pour accroître le territoire national, juguler la féodalité ou ses résurgences, renforcer l’autorité monarchique, affirmer l’indépendance de leur royaume par rapport à l’autorité temporelle du pape ou aux prétentions dominatrices de l’empereur romain germanique. Je citerai Louis VI le Gros, Philippe Auguste, Louis IX (Saint Louis), Philippe le Bel, Louis XI, Henri IV, Louis XIII, Louis XIV… Je mets de côté François Ier, grand bâtisseur et mécène remarquable, souvent porté aux nues, mais piètre politique.
Si la dynastie capétienne des Bourbons incarne à la fois l’apogée et la fin de la monarchie d’Ancien Régime, quels en sont les achèvements, les prouesses ou les faiblesses ?
Tous les monarques français d’avant la Révolution ont été à proprement parler des rois « absolus ». « Le roi est empereur en son royaume », affirmait un adage du XIIIe siècle. Il reçoit de Dieu seul sa pleine souveraineté législative. Il ne tient, dira Louis XIV, « son épée que de Dieu ».
A partir du règne d’Henri IV, plus exactement à partir de l’édit de Nantes (1598), on assiste à l’éclosion d’un autre phénomène, celui de « l’absolutisme » proprement dit, qui s’édifie sur les dernières ruines de la féodalité. Ce concept, toutefois, est d’une simplicité trompeuse, qui a conduit la plupart du temps à de graves contresens historiques : on en a fait un synonyme de despotisme, de dictature, voire de tyrannie ou de totalitarisme. En réalité, il correspond à l’effort du pouvoir central, à partir du XVIIe siècle, non plus simplement de coiffer la société plurielle, foisonnante et anarchique issue du Moyen Age, mais de la transformer, de l’unifier, de construire un appareil d’Etat, dans le cadre de la souveraineté moderne.
Pour éviter toute ambiguïté, certains historiens ont eu raison de lui préférer le terme de « monarchie administrative ». Dans ce travail titanesque, le pouvoir royal s’est heurté à la résistance des corps sociaux, Eglise, noblesses d’épée ou de robe, institutions locales, parlements régionaux, assemblées d’états, corporations. Ce système absolutiste n’était pas spécifique à la France (on le retrouve dans l’Angleterre des Stuarts ou dans l’Espagne des Bourbons au XVIIIe siècle). Sa grande faiblesse a été, en tout cas en France, l’absence de toute représentation des peuples. Les états généraux, organe créé au XIVe siècle, mais largement obsolète du fait de l’évolution sociologique de la société, ne furent pas réunis de 1614 à 1789.
Pourquoi avoir consacré aux rois Bourbons de l’Ancien Régime l’essentiel de votre œuvre ? Qu’avez-vous découvert par votre étude et votre recherche approfondie ?
En raison de ma formation d’historien et de politiste, j’ai voulu faire ce qu’Emmanuel Le Roy Ladurie appelle « la science politique de l’Ancien Régime ». Il s’agissait de comprendre comment ont fonctionné les rapports sociaux et leurs turbulences dans ces sociétés institutionnellement inégalitaires. On découvre, par exemple, que, sous l’Ancien Régime, au cœur de la structure sociopolitique du royaume, les mécanismes de fidélités, de clientèles, les liens d’homme à homme, dérivés de l’ordre féodal, occupent une place prépondérante, en l’absence d’une bureaucratie moderne s’étendant sur l’ensemble du territoire.
J’ai montré dans ma biographie de Louis XIV comment le roi, qui ne disposait pour ainsi dire d’aucun relais dans la société, mais qui refusait de dépendre d’un premier ministre omnipotent, s’est d’abord appuyé sur deux clans, les Colbert d’un côté, les Le Tellier-Louvois de l’autre, disposant eux-mêmes de vastes et tentaculaires réseaux de créatures. Elargissant ainsi son espace politique, il gouverna par arbitrage jusqu’à la mort du dernier grand vizir, Louvois, en 1691, date à laquelle, ayant ramené à lui toutes les clientèles et les fidélités, et attiré la haute noblesse à Versailles, il devint enfin son propre premier ministre.
Comme tout bon Capétien, il a joué sur des registres contradictoires, rassemblant en père de famille affectionné les groupes sociaux, tout en veillant à maintenir un minimum de tensions et à couper les ailes des puissants. Diviser pour régner était la condition de sa survie. Le désordre pouvait lui nuire, mais l’entente trop parfaite de ses sujets risquait de lui faire perdre la maîtrise de la situation, particulièrement au sein de la noblesse. Il lui revenait donc de maintenir, voire d’entretenir, la rivalité des coteries, de jouer des susceptibilités de rang et de prestige. A lui de régler, par la distribution des « grâces », les anoblissements ou les créations d’offices, l’émulation des familles et des individus.
Parallèlement, le pouvoir royal, poussé comme tout pouvoir par une tendance hégémonique, a cherché à rogner les môles de résistance, à écarter les rivaux potentiels, bref, à affaiblir les familles aristocratiques trop puissantes, à empêcher l’ascension de certains grands trop en vue. La monarchie absolue, a dit l’historien François Furet, n’a cessé « de tisser une dialectique de subversion à l’intérieur du corps social »
Cependant, contrairement à Tocqueville, qui, à mon avis, a surestimé la centralisation « louisquatorzienne » et négligé la vigueur des forces centrifuges des dernières décennies de l’Ancien Régime, la monarchie n’a nullement réalisé l’Etat fort auquel elle aspirait.
En réalité, au XVIIIe siècle, le pouvoir royal meurt, non d’un excès de puissance, mais de faiblesse extrême, embarrassé par ses contradictions internes, étouffé par la gigantesque réaction aristocratique qui surgit dès la mort de Louis XIV et par la coalition égoïste des corps et des ordres sous le règne suivant, arc-boutés sur la défense de leurs privilèges fiscaux.
Que nous enseignent aujourd’hui les aspirations de Richelieu ou de Mazarin, les réformes de Colbert, Louvois ou encore les conseils de Talleyrand ?
Assurément, ces hommes n’ont pas été sans défauts. Les cardinaux-ministres ont accumulé des fortunes considérables (le tiers du budget annuel de l’Etat pour Mazarin !). Il est vrai qu’ils devaient se montrer plus riches et plus puissants que les princes et les grands pour mieux contrecarrer leurs actions.
On reproche beaucoup aujourd’hui à Colbert, et à bon droit, la rédaction du redoutable code noir (ordonnance sur la condition des esclaves aux Antilles, qui a de fait contribué au développement de la traite occidentale). On a rendu, non sans raison, Louvois, secrétaire d’Etat à la guerre de Louis XIV, responsable du sac du Palatinat, en 1688, durant la guerre contre le Saint Empire germanique, qui a entraîné la coalition des princes allemands contre la France.
Quant à Talleyrand, grand metteur en scène du silence en politique, on l’a accusé d’être, comme le dit Emmanuel de Waresquiel, « le traître de toutes les causes ». Mais tous ont été de talentueux et remarquables serviteurs de l’Etat, même le sinueux « diable boiteux », qui a toujours gardé une cohérence intellectuelle sans être véritablement homme à système, comme le pensait Metternich, chancelier de l’empire d’Autriche.
La place et le rôle des reines dans l’histoire de France sont-ils une exception française ?
Certainement. Cela tient à la fameuse loi salique, tirée du code juridique des Francs saliens, réutilisée de façon biaisée par certains légistes du XIVe siècle à dessein d’écarter les femmes de la succession au trône et de réserver celle-ci aux mâles par ordre de primogéniture. « Les lys ne tissent ni ne filent », disait-on en s’appuyant de façon outrageusement extensive sur une phrase du Christ dans l’Evangile de saint Matthieu. En d’autres termes, la monarchie des lys ne pouvait échoir à celles dont l’activité principale était de tisser et de filer !
Cela dit, lors des périodes de régence, correspondant à la minorité de leur fils aîné (jusqu’à l’âge de 13 ans), plusieurs reines ont joué un rôle politique non négligeable : l’énergique Blanche de Castille, mère de Louis IX (Saint Louis), qui exerça également la régence pendant la septième croisade, la très contestable Isabeau de Bavière pendant la folie de Charles VI, l’habile et autoritaire Catherine de Médicis, que les historiens récents ont largement débarrassée de sa sulfureuse réputation, Marie de Médicis, mère de Louis XIII, dont l’action reste frappée par nombre de maladresses, enfin la très remarquable Anne d’Autriche, tout espagnole au début de son mariage avec Louis XIII, qui surprit par ses capacités politiques et qui, au dire même de son fils Louis XIV, « méritait d’être mise au rang de nos plus grands rois ».
Quels parallèles peut-on tracer entre monarchie et république ?
La rupture introduite par la Révolution est immense. Dans l’histoire de France, il y eut sans aucun doute plusieurs crises de légitimité, mais une seule et unique crise affectant la souveraineté, celle de 1789. Les 17 et 20 juin de cette année-là, en effet, devant la carence du pouvoir royal à proposer un plan de redressement financier, les Etats généraux se proclamèrent Assemblée nationale et accaparèrent la plénitude de la souveraineté jusque-là exercée par le roi seul, y compris le pouvoir constituant. C’était un coup d’Etat au regard du droit et des institutions monarchiques.
A partir de cet événement fondateur, qui voit un immense déplacement de pouvoir, c’est l’Ancien Régime tout entier, non seulement la société d’ordres, mais aussi l’édifice séculaire du mystère capétien, auréolé du sacre de Reims, qui est mis à bas. On passe d’une représentation de la nation à l’ancienne à celle d’une nation moderne, fondée sur un corps politique unifié, englobant l’ensemble des citoyens. La rupture fut accentuée, naturellement, sous la « deuxième Révolution » – celle du 10 août 1792 –, par le procès et la décapitation de Louis XVI.
Et, pourtant, il y a bien une certaine continuité culturelle entre la France monarchique et la France républicaine. Une large partie de la symbolique monarchique a été préservée ou reconstituée autour de l’Etat républicain, particulièrement sous la Ve République. Quant à la continuité politique, elle est encore plus flagrante dans l’œuvre d’unification et de centralisation de la République au XIXe siècle, conduite avec plus d’énergie encore, et même de brutalité, du fait de la table rase réalisée par la Révolution, qui avait détruit tous les anciens corps intermédiaires hérités du Moyen Age. Charles Péguy avait raison de le dire : « La République une et indivisible, c’est notre royaume de France ! »
Aujourd’hui, les monarques qui subsistent en Europe ne gouvernent pas. Est-ce la condition sine qua non à leur survie et au maintien d’une cohésion, voire d’une continuité au sein de leur peuple que les gouvernements ne peuvent incarner ?
Vous avez raison, si l’on met à part l’Etat du Vatican, qui du point de vue constitutionnel est une monarchie absolue, élective et de droit divin, les monarchies européennes – Belgique, Danemark, Espagne, Norvège, Pays-Bas, Royaume-Uni, Suède… – sont des monarchies constitutionnelles et démocratiques dont les souverains exercent un pouvoir de représentation et un rôle politique strictement encadré. Leur roi ou leur reine incarne à la fois leur pays dans sa continuité historique et, en même temps, est issu de familles dépositaires des plus antiques traditions nationales. C’est un avantage certain par rapport à la république.
L’engouement extraordinaire des Français pour le récent couronnement de Charles III au Royaume-Uni, qui a mis en valeur la puissance de la symbolique royale, est là pour en témoigner. Ce n’est pas pour autant qu’ils seraient prêts à accepter l’instauration d’une monarchie constitutionnelle. Celle-ci, on le sait, a échoué de peu en octobre 1873, lorsque le comte de Chambord a refusé de reconnaître le drapeau tricolore, au nom de ses convictions contre-révolutionnaires. L’instauration de la Ve République, dotée d’un pouvoir exécutif fort, en a fermé la porte sans doute définitivement. Même s’ils sont aujourd’hui assez critiques à l’égard des actuelles institutions et de leurs dérives, les Français tiennent en grande majorité à cette « monarchie républicaine » voulue par le général de Gaulle, qui leur permet d’élire directement le président de la République.
Pour vous, qui avez publié les biographies des rois Bourbons de l’Ancien Régime, quel semble être le moyen, à l’instar de la collection « La Grande Histoire des rois de France » du « Monde », pour entrer dans l’histoire des rois, saisir les enjeux qui déterminent leur action et en questionner l’héritage ?
La France a une longue histoire, construite patiemment, mais pas toujours méthodiquement, par des générations d’hommes et de femmes, à la sueur de leur travail ou par leur sang versé. Elle est porteuse de traditions anciennes, spirituelles en particulier (« la fille aînée de l’Eglise »), qu’on ne saurait oublier, mais aussi d’un projet ouvert, généreux, universaliste, assimilateur. C’est l’aventure de cette lente construction de l’Etat, d’un Etat de justice au service du bien commun, au-dessus des ambitions individuelles, des factions et des féodalités de tous ordres, qu’il faut s’efforcer de lire à travers les biographies de nos rois, leurs réussites exceptionnelles mais également, il faut le reconnaître, leurs erreurs et leurs échecs tragiques. C’est cette continuité historique de la nation qui me paraît le plus remarquable. « Vieille France, écrivait Charles de Gaulle, meurtrie de guerres et de révolutions, allant et venant de la grandeur au déclin, mais redressée de siècle en siècle par le génie du renouveau. » ■
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On en traduit que pour être roi, il faut être élu par le peuple. Donc être descendant des rois de France ne donne pas l’onction, surtout quant le peuple s’éloigne d’une église qui s’est éteinte depuis la révolution et que ce peuple retrouve ses ancestrales croyances celtiques sur tout le continent Européen et Méditerranéen.
Le Triskel, récupéré un moment par la trilogie chrétienne, couvre tout le continent Européen et l’Afrique du Nord, nous y retrouvons le passé, le présent et le futur. Mais pour ce faire il faut nécessairement un peuple qui désire prendre sa responsabilité de vie commune!
L’histoire actuelle traduit l’image d’un peuple de brebis dociles au système actuel de la cinquième république qui autorise quelques parvenus irresponsables à prendre les rennes du pouvoir et bien qu’issus du peuple ils en oublient le peuple et la Nation !
Le peuple apprend le passé, il vit le présent et cherche dans le futur garder la liberté gagnée, dans le calme d’une vie moderne et facile, alors il est inquiet de ce qui ce passe , de ce qu’il va devoir subir. L’organisation sociale est en décrépitude, il pressent les impôts et les taxes à venir; Il mesure que l’organisation du mode change radicalement , il est perdu, il descend socialement tous les mois.
Alors, président ou roi, république ou royaume, le peuple de France a besoin de cohésion. et de savoir ou il va et avec qui, dans ce monde qui vacille!
La grande propagande républicaine – outil du renversement intellectuel – tient à ce que celle-ci entend ancrer dans une espèce d’«inconscient historique» (mâtiné de Marx et de Jung) qu’il n’y a de France que progressive : à mesure que le centralisme émerge, éclôt, s’étend, l’État français a su s’imposer, fût-ce monstrueusement, avec la Révolution, l’Empire et l’Après-Guerre de 1945.
Il revient donc aux historiens de tous bords de conditionner les mentalités pour que le réflexe «État-Nation» joue et produise le rendement des urnes électorales. D’où la formule du Petitfils de ce «quotidien du soir», formule dénuée de la première vertu intellectuelle : «certains [rois] sont des saints, d’autres des cyniques ou même de fichus coquins» ; moyennant quoi, veut-il faire admettre, tout est ainsi bien. On pense à la satanée sentence du Buonaparte : «J’assume tout, de Clovis au Comité de Salut public.»
En fait, rien n’importe donc, tant que cynisme et coquinerie se sont imposés – en effet, dans le tableau dressé, nul regret de la disparition de la notion de sainteté, pourtant reconnue au passé politique…
Mais, au fond, y a-t-il proprement eu ce qui est ici prétendu, prétendu aux fins de justifier une certaine conception (d’ailleurs, en rien machiavelienne, soit dit en passant) des nécessités de compromis républicains avec le cynisme et la coquinerie, comme si tout cela venait légitimement à la suite de ces «rois qui ont fait la France», dont, au besoin, certains peuvent même être représentés selon leur qualité de métèque – on l’a vu afficher !… Tout cela est intellectuellement odieux, évidemment, et, par conséquent, mensonger.
En France, il n’ya pas «des» rois, mais LA Royauté ; non «des territoires» constitutifs par intégrations et/ou au rythme de traités successifs, signés sur des ruines antérieures, à commencer par «les ruines de l’empire carolingien, pas avant», selon ce que l’on veut donner à accroire ici prétendu – pas des «territoires», mais LE Royaume avec ses peuples.
Il y a foule de contresens dans les propos de Petitfils, à commencer par la rocambolesque mention d’une «autorité temporelle du Pape» (!?!?). Cet «histrien» (pour néologiser ironiquement), ou «historion» ne connaîtrait donc même pas la distinction régulière fondamentale entre autorité SPIRITUELLE et POUVOIR temporel ? Allons bon… Mais ainsi, sans doute, peut-il mieux commodément avoir la gaillardise d’emmêler les pinceaux des bobos en manches de chemise, qui n’aspirent qu’au chaleureux climat de ces lieux communs «post-modernes», comme i’s disent.
La confusion est pleinement accomplie lorsque est citée la formule «le roi est empereur en son royaume» (à laquelle, dans de pareilles dispositions cérébrales, on ne saurait absolument plus rien pouvoir comprendre), comme si cet «empire» considéré avait la moindre chose en commun avec les autoritarismes réflexes ici provoqués… L’Empire, au sens où l’entend la formule royale de France, est l’exacte contraire de la conception «totalitaire» que l’on peut en avoir dans les temps de la mondialisation ; l’idée originelle de cette «emperorité» (si l’on ose le néologisme) fut assez pertinemment traduite en français actuel par la formule «les libertés, en bas ; l’autorité, en haut». Tout le contraire de cet «appareil d’État, dans le cadre de la souveraineté moderne», en ces termes portés au pinacle, en guise de résumé modérateur central.
Il est facile de voir ce qui , dans cet article, relève du « politiquement correct ».
Pour ce qui est du « quotidien du soir »
, le Général de Gaulle « parlait de l’immonde ».
cf « C’ était de Gaulle »par Alain Peyrefitte.
Précision : page 497 du Tome I
David a raison de remettre les pendules à l’heure. J.C. . Petitfils historien honnête, mais un peu laborieux, distribue les bons et les mauvais poins, ce n’est pas son rôle, car il doit nous laisser libre. Qu’il prenne exemple sur E de Waresquiel , qui nous laisse à chaque instant de son récit où le destin de la France bascule prendre position, en toute liberté. En outre J.C Petitfils semble étranger à la mystique, au mystère royal , ce qui lui fait endosser des à peu près, comme » la République, notre royaume de France », (la terreur?) ou que « Talleyrand serait traitre à toutes les causes;, et si au contraire il a su rester fidèle à une cause vraiment importante: celle de la civilisation , lui qui a sauvé l’Europe de sa fuite en avant mortelle initiée par cette république et Napoléon, « notre royaume de France », contre sens majeur de Péguy,par ailleurs grand esprit ,mais qui a rêvé ce jour là. Par ailleurs chaque Roi ne fut pas coquin ou saint, chacun à sa mesure fut habité par sa vocation, à travers les embuches , avait le souci de la transcendance et de son pays, et garde son mystère, son aura . Notre fidélité en est le garant , en toute lucidité,en toute liberté.
Beaucoup de bonnes choses dans cet entretien. Il est profondément vrai que tous nos rois avant 1789 étaient des « monarques absolus » ; que la monarchie administrative, si elle s’est déployée en France dans toute sa perfection, n’est pas propre à notre pays (et Petitfils de citer l’Espagne des Bourbons et l’Angleterre des Stuarts, à laquelle j’ajouterai Elizabeth Ière et les despotes éclairés) ; qu’elle a conservé beaucoup de traits féodaux dans son fonctionnement. Si l’on veut pinailler, on devrait dire que nombre de monarchies européennes sont « de droit divin » et que le Liechtenstein est une monarchie sinon absolue, du moins très puissante, le prince y jouissant de droits politiques très étendus.
Passées les deux crises de 1789 puis celle de 1792 , ce n’aurait été qu’un long fleuve tranquille pour aboutir à la formule de « monarchie républicaine » laquelle fermerait le ban . L’historien passe sous silence Napoléon I er . C’est un premier point .
Deuxième point , il n’est pas fait mention de tout le reformatage de l’esprit des esprits aux débuts de la III e .
Extrait de « C’était de Gaulle » page 497 :
« Et la III eme République, vous croyez qu’elle se serait enracinée, si elle n’avait eu de la poigne, si elle n’avait pas pris en main les écoles, les lycées, l’université, les manuels d’histoire, la plupart des journaux ? Elle a imposé le fait accompli à une classe dirigeante qui lui était massivement hostile ; » la Gueuse » ! sic
Précision : page 497 du tome I .