Le néo-féminisme, hélas ayant renoncé à toute féminité, est devenu à bien des égards une machine incohérente principalement vouée à nuire aux hommes et si possible à détruire les plus « virilistes » d’entre eux, surtout s’ils occupent des positions en vue. Et cela, désormais sans tenir compte de leurs situations politiques, sociales ou religieuses. Tout homme serait-il coupable par définition ? Un simple baiser volé en public par un sportif, et voilà le fautif soudain voué aux gémonies par ces dames et demoiselles occupant bruyamment écrans et journaux, arènes politiques nationales et tribunes internationales.
DE CHATEAUBRIAND À SACHA GUITRY
Le politiquement correct le plus orthodoxe même ne protège plus ; on est en train de s’en rendre compte avec Picasso (1881-1973). Oui, le grand Espagnol, l’intouchable artiste-monde, obligatoirement et unanimement admiré depuis les années 1940 (même Otto Abetz, le très « ami des arts », ambassadeur du Führer à Paris, tint à le rencontrer). Ensuite solidement protégé par son communisme affiché, son antifascisme de congrès et son cubisme iconoclaste, l’artiste aux 50 000 œuvres en tous genres, fut embaumé vivant avant de l’être pour de bon en son magnifique château de Vauvenargues, superbement entouré de 1000 hectares de terres provençales. (Photo : Staline par Picasso, dessin paru dans Les Lettres françaises d’Aragon après la mort de Staline).
Allait-on l’y laisser reposer en paix en ce haut-lieu sublime ? C’était compter sans les très vigilantes gardiennes du chaudron féminard ! La faute de Picasso était-elle d’avoir, sous prétexte d’innover en art, défiguré, « déconstruit », les visages, les corps de nombre de belles femmes ? Non point ! Son péché, le seul, est, selon la relecture ultra-féministe de sa vie, lecture imitée évidemment des modes états-uniennes, d’avoir eu, suivant divers témoignages tous à charge, des comportements « machistes », « virilistes » ou tout simplement « inappropriés » à l’égard de nombreuses jeunes filles et femmes, dont deux seulement furent épousées officiellement, qui emplirent la vie de vert-galant que mena notoirement Picasso à l’instar des meilleurs rois de France, de Voltaire, Chateaubriand, Victor Hugo, Sacha Guitry, Porfirio Rubirosa et de légions d’autres mecs encore … (Photo : Françoise Gillot la seule des nombreuses compagnes de Picasso qui osa publier un livre, apràs leur séparation, sur leur vie commune).
L’OFFENSE DE LA PETITE-FILLE À L’AÏEUL
Déjà certes, en 1964, Françoise Gillot, une des concubines du harem de Picasso, pour parler comme des mâles orientaux entre eux, avait publié un livre savoureux, assez cru et plein d’esprit, pas étonnant sous la plume de cette femme intelligente, sur ses années de vie commune avec le peintre qui avait voulu être picador … (encore un élément à charge contre lui puisque la corrida est devenue « incorrecte »…) plus près de nous la Gillot a été largement dépassée par une descendante directe du défunt, Marina Picasso, qui est allée jusqu’à évoquer la « sexualité animale » de son grand-père ! Ça alors ! Qu’en savait-elle ? Va-t-on bientôt nous parler aussi de pédomanie ? D’inceste ? Selon cette Marina, l’artiste « asséchait les femmes avant de les délaisser ». (Photo : Les Demoiselles d’Avignon)
SAUVONS QUAND MÊME PICASSO !
Cependant bien fort sera celui qui parviendra à calmer la « picassophobie » des féministes … ■
Photo : Le timbre soviétique consacré a Picasso avec la fameuse colombe…
Longtemps correspondant du Monde dans l’aire arabe, Péroncel-Hugoz a publié plusieurs essais sur l’Islam ; il a travaillé pour l’édition et la presse francophones au Royaume chérifien. Les lecteurs de JSF ont pu lire de nombreux extraits inédits de son Journal du Maroc et ailleurs. De nombreuses autres contributions, toujours passionnantes, dans JSF.
Retrouvez les publications sous ce titre…
J’aime bien Péroncel, mais la haine des féministes ne me fera pas aimer Picasso, qui avait sans doute du talent, mais, selon l’expression de Dali, n’a jamais fait que des brouillons. De la même façon que la haine des vainqueurs ne me fera pas aimer Céline, ni Richard Wagner, ni les germanophobes détester Arno Breker.
Extrait d’une lettre de Picasso à Giovanni Papini (1952), publié dans «Chrétienté-Solidarités», n° 20 (novembre 1984), repris par moi-même dans «Les Échos d’ici, d’ailleurs et de nulle part» (printemps 1988)… D’aucuns ont tout fait pour convaincre qu’il s’agissait d’un faux ; Picasso ne démentit jamais avoir écrit cette lettre. Voilà l’extrait :
«Du moment que l’art n’est plus l’aliment qui nourrit les meilleurs, l’artiste peut exercer son talent en toutes les tentatives de nouvelles formules, en tous les caprices de la fantaisie, en tous les expédients du charlatanisme intellectuel. Dans l’art, le peuple ne cherche plus consolation et excaltation, mais les raffinés, les riches, les oisifs, les distillateurs de quintessence cherchent le nouveau, l’étrange, l’original, l’extravagant, le scandaleux. Et moi-même, depuis le cubisme et au-delà, j’ai contenté ces maîtres et ces critiques, avec toutes les bizzareries changeantes qui me sont passées en tête, et moins ils comprenaient, et plus ils m’admiraient. À force de m’amauser à tous ces jeux, à toutes ces fariboles, à tous ces casses-tête, rébus et arabesques, je suis devenu célèbre et très rapidement. Et la célébrité signifie pour un peintre : ventes, gains, fortune, richesse. Et aujourd’hui, comme vous savez, je suis célèbre, je suis riche. Mais, quand je suis seul à seul avec moi-même, je n’ai pas le courage de me considérer comme un artiste dans le sens grand et antique du mot. Ce furent de grands peintres que Giotto, le Titien, Rembrandt et Goya ; je suis seulement un amuseur public qui a compris son temps et épuisé le mieux qu’il a pu l’imbécillité, la vanité, la cupidité de ses contemporains. C’est une amère confession que la mienne, plus douloureuse qu’elle ne peut sembler, mais elle a le mérite d’être sincère.»
On me permettra d’assortir cette mention de la confidence que me fit mon très très cher ami disparu, Noël Devaud, peintre qui n’avait jamais cessé de travailler «à l’ancienne» (il broyait lui-même ses couleurs, employait les glacis comme au Moyen Âge, etc.). Cependant, par intelligence théorique, il en était venu à l’abstrait (école «abstraction lyrique», dont le royaliste Georges Mathieu, son ainé de quelques années seulement, fut le plus célèbre représentant). Il y sacrifia vingt ans durant et puis, au temps où je l’ai beaucoup connu, il convint de revenir à la peinture figurative, seulement, m’expliqua-t-il, désespéré : «Je ne sais plus peindre… Je dois tout réapprendre…»
Il me semble que la question n’est pas d’apprécier ou non Picasso, mais de s’amuser (ou d’être glacé par la constatation) que le Moloch révolutionnaire brûle même ses enfants chéris….
Le propre de ce Moloch auto-combustible a toujours été, en effet, de s’entre charcuter, ainsi de Danton/Robespierre, pour commencer, des bolcheviks, pour continuer, qui se fusillaient gaillardement les uns les autres, et par les libéraux, enfin, qui sont en train de mettre au point l’art et la manière de se reproduire par procédures interposées, c’est-à-dire de s’exécuter par souci de postérité socialisante.
Quant aux divers Picasso piquant dans les assiettes les miettes fiduciaires, il n’y a pas lieu de savoir distinguer s’ils peignaient, barbouillaient, tambouillaient ou politiquaient : ils figurent toujours au générique de l’agitation laborieuse et, bel et bien, libidineuse.
La race des Picasso est molochoïde, un point c’est tout, et en tout.
Relu l’article. PH ne dit pas du tout s’il aime ou n’aime pas la peinture de Picasso. Ce n’est pas son sujet.
Néanmoins, sans sa peinture, on ne parlerait pas de Picasso dans les mêmes termes. C’est bien dans le rapport entretenu avec l’art que cet individu a compté. Ne parlerait-on pas expressément de sa peinture, c’est à partir de sa peinture que l’on en vient à évoquer son personnage. Le sujet est donc inéluctablement la peinture de Picasso, seule chose qui ait fait de lui ce que l’on peut en dire. Du reste, c’est là le nœud du problème artistique moderne : pour un peintre moderne, la peinture n’est plus le sujet ; pour un musicien non plus ; c’est Theodor Adorno, sauf erreur, qui avançait l’idée selon laquelle, «aucune grande œuvre poétique ne peut advenir après Auschwitz ». Ce que d’aucuns ont pu transcrire par «Depuis “Guernica”, on ne peut plus faire de la peinture de la même façon.» Tous propos de suréminente crétinerie, au point de vue artistique – ma dactylographie dérapante avait tapé artRistique, c’est bien le mot, au fond, il ne s’agit que d’artre, d’emplâtre pour jambe de bois, concocté par des artristes, tristes mais contentés, contentés et ainsi, toujours, frappés d’érotomanie – l’érotomanie, pied bot du diable qui botte ses pompes en touches boiteuses.