Pierre Builly a consacré une chronique étincelante, comme elles le sont toutes, à l’adaptation filmée que la télévision a tirée en 1962 des Célibataires de Montherlant. Nous recommandons de la lire, notamment si l’on s’accorde le plaisir de voir ou revoir ce superbe film, tout à fait digne du roman, et à vrai dire œuvre d’art en lui-même au titre du cinéma.
De l’art d’Henri de Montherlant Pierre Builly note à juste titre : « On n’a guère écrit, au XXe siècle, dans une langue plus pure et plus haute et avec un tel tempérament ».
L’adaptation télé est de cette veine, à cette hauteur.
À propos de Montherlant, Pierre Builly note encore quelles sont les valeurs qu’il défend : « stoïcisme et rigueur, courage physique et lucidité ». On les retrouve d’ailleurs aussi – cela dit pour les amateurs – dans son théâtre empreint du même souci de grandeur stoïque : La Reine morte, Le Maître de Santiago, Le Cardinal d’Espagne… et quelques autres pièces inoubliables souvent servies par de magnifiques acteurs.
Patrimoine cinématographique • Les Célibataires – Pierre Builly – 11 septembre 2022.
Il y a verge dans mon nom. De quoi me faire battre pour ce que je vais écrire. Les Célibataires du film m’ont déçu et même lassé au point d’abandonner à mi- parcours. Pire, je ne suis même pas cinéphile. Ma critique est donc indéfendable.
Qualité des décors, de la photographie, des acteurs, sans conteste ! et je me fie à JSF pour la fidélité à Montherland. Justement : est-ce de la fidélité ou une espèce de déférence paralysante ? Il me semble que Jean Prat illustre un texte écrit au lieu de bâtir un film. Quand le roman, surtout s’il est bien écrit, permet, appelle même, de lentes et linéaires descriptions ou narrations, le film doit exploitersa capacité à dépayser, traduire, peindre … quasi-instantanément et se concentrer sur les dialogues, l’action et cette « autre chose » qui le caractérisent. C’est ce que ne me semble pas faire ce film et cette impression est renforcée par la lecture surimposée de ce que je suppose être des extraits du texte original. Et pourquoi avoir choisi la voix traînante de Marielle, espèce de merle moqueur parigot ? Second degré, comme on dit dans ce cas ? C’est lent, lourd, insistant, didactique, servile à l’excès.
@ Marc Vergier : Je ne partage pas du tout votre avis sur la voix de Jean-Pierre Marielle, qui est, à mon sens, avec celles de Jean Servais et de Philippe Noiret et qui, en « off » relie les épisodes du récit avec talent. Mais vous avez bien le droit de ne pas apprécier.
Le reste de votre avis me semble d’une autre nature ; vous n’avez pas tort de trouver l’adaptation peut-être trop sage, trop fidèle ; j’ajouterais volontiers très « scolaire ». Mais il ne faut pas oublier qu’il s’agit là d’un téléfilm présenté au public de l’unique chaîne de télévision de l’époque et qui se devait d’être intelligent mais aussi clair, sans ellipses, sans allusions compliquées.
Cette télévision-là prenait à coeur sa mission éducative et avait pour désir d’ouvrir la lecture des grandes oeuvres à tous. Sans trop évoquer les « Perses » d’Eschyle réalisés, eux aussi par Jean Prat en 1961 et interprétés avec tous les codes de la tragédie grecque, voyez les grandes adaptations de Balzac, « La cousine Bette », « Les illusions perdues », « Splendeurs et misères des courtisanes » et tant et tant d’autres.
Un film peut – et doit aussi sans doute – s’adresser d’une autre façon aux spectateurs… Cela étant je ne peux imaginer « Les célibataires » souvent lus et relus sans voir Coantré en Moulinot et Coëtquidan en Ledoux…