Commentaire – Cette tribune est parue dans le Figaro de ce matin. Les lecteurs curieux des procédures parlementaires et constitutionnelles y trouveront quelques réponses. Ceux – possiblement les mêmes – que préoccupent avant tout le sort du pays, la préservation de son identité, son « droit » à la continuité historique, y trouveront aussi leur compte, car l’auteur ne se limite pas aux considérations constitutionnelles puisqu’il conclut que quelle que soit l’issue des procédures, la France et les Français n’auront pas la vraie, bonne et efficace loi « immigration » qu’il faut au pays. Et c’est bien cela qui importe. De ce point de vue, il nous faut pointer ce que nous croyons être ne erreur d’Eric Zemmour : nous ne vivrions pas une crise institutionnelle, La constitution de la Ve République ayant justement tout prévu, pour que, même sans majorité parlementaire, l’Exécutif ne soit pas empêché de gouverner… La France d’aujourd’hui est-elle gouvernée ? Sauf à la godille ! Les décisions fortes à prendre pour le Bien du pays peuvent-elles l’être ? La belle affaire que les Institutions fonctionnent ! De Gaulle ne les voulait pas faites pour fonctionner mais pour gouverner, décider, exécuter. Pas pour débattre ou dérouler des procédures. En ce sens, il a échoué. Les Institutions de la Ve République ne satisfont pas ou plus au besoin du Pays ni au vœu des Français dans leur profondeur. Empêché de gouverner, De Gaulle se fût retiré, comme en 1946 et 1969, laissant la France livrée aux partis et aux clans. La voici à nouveau en déshérence et grande pitié !
TRIBUNE – Après l’adoption d’une motion de rejet préalable contre la loi sur l’immigration, ce 11 décembre, le gouvernement peut encore convoquer une commission mixte paritaire qui lui permettrait de reprendre la main sur le texte, analyse l’ancien secrétaire général du Conseil constitutionnel, Jean-Éric Schoettl.
L’ouverture à l’immigration est, pour la gauche macronienne, un marqueur identitaire qu’il faut défendre à tout prix, fût-ce contre le sentiment de la population, contre l’intérêt du pays, contre sa propre survie électorale.
Le 11 décembre a été adoptée une motion de rejet préalable contre la loi sur l’immigration. Aux termes de l’article 91:5 du règlement de l’Assemblée nationale, l’objet d’une telle motion est «de faire reconnaître que le texte proposé est contraire à une ou plusieurs dispositions constitutionnelles ou de faire décider qu’il n’y a pas lieu à délibére ». Elle consiste donc à rejeter un texte sans discussion de ses articles, soit pour des motifs constitutionnels, soit en raison de convenances politiques. Deux motions de rejet préalable au texte de loi sur l’immigration ont été déposées : l’une par les écologistes, l’autre par Les Républicains (LR). C’est la motion des écologistes qui a été tirée au sort, puis adoptée.
Les oppositions pouvaient, pour des motifs certes fort différents, voter le rejet préalable. Pour leur part, les LR ont toujours dit : «Au Sénat, nous avons fait œuvre constructive. Mais nous ne poursuivrons dans cette voie que si l’Assemblée ne détricote pas notre texte». Or c’est bien à une mise en pièces des apports du Sénat qu’on a assisté en commission des lois de l’Assemblée nationale. Les LR n’avaient pas grand intérêt à laisser se dérouler la séance publique, car celle-ci avait toutes les chances de confirmer le texte de la commission des lois. Deux raisons à cela. La première est procédurale : le débat en séance publique a lieu sur la base du texte de la commission. La seconde est politique : les amendements qu’auraient présentés les LR pour «remonter la pente» auraient été probablement rejetés par une conjonction de votes Nupes et majorité présidentielle (les membres de celle-ci se ralliant à leurs collègues de la commission des lois par conviction ou loyalisme).
Avec le texte voté par le Sénat, le ministre de l’Intérieur – et, avec lui, l’exécutif macronien et le parti présidentiel – tenaient pourtant un fil d’Ariane providentiel pour sortir du labyrinthe de la procédure législative. Un texte nettement plus ferme sur le fond que le projet déposé en février, quoique respectueux des contraintes constitutionnelles et conventionnelles qui s’imposent actuellement à nous. Ainsi, le texte du Sénat ne supprime pas le droit au regroupement familial (ce serait contraire aux jurisprudences du Conseil constitutionnel et de la Cour européenne des droits de l’homme) : il allonge simplement de 18 à 24 mois la durée de séjour en France au terme de laquelle le «regroupant» peut revendiquer ce droit. De même, le texte du Sénat ne fait pas du séjour irrégulier un délit puni d’une peine de prison (ce serait contraire à la «directive retour», telle qu’interprétée par la Cour de justice de l’Union européenne), mais il le rend passible d’une amende de 3750 euros. Les autres amendements du Sénat, fruits de compromis entre les LR et les centristes, sont à l’avenant.
Le texte du Sénat aurait dû fonder un accord sinon enthousiaste, du moins majoritaire des députés. Il pouvait en effet obtenir, «faute de mieux et en attendant mieux» (une révision constitutionnelle), un ralliement de la droite LR et RN. Compte tenu de sa modération, il était en outre digestible, du moins à première vue, par la majorité présidentielle. Mais voilà : la gauche macronienne ne veut pas entendre parler de mesures coercitives ou restrictives en matière migratoire. L’ouverture à l’immigration est, pour elle, un marqueur identitaire qu’il faut défendre à tout prix, fût-ce contre le sentiment de la population, contre l’intérêt du pays, contre sa propre survie électorale. À cet égard, la gauche macronienne est au diapason idéologique de la gauche tout court, dont elle émane le plus souvent. Or la gauche macronienne tient une position stratégique : la commission des lois de l’Assemblée nationale. Il faut comprendre que, dans cette affaire, le principal opposant à Gérald Darmanin est non Oliver Marleix, président du groupe LR à l’Assemblée nationale, mais Sacha Houlié, président de la commission des lois de cette assemblée et membre du groupe politique Renaissance. Gérald Darmanin ne le dira pas, mais on peut penser qu’il en est convaincu…
Le gouvernement peut cependant encore retrouver le fil d’Ariane que lui ont coupé les députés en commission des lois. En effet, la motion de rejet sans débat n’est pas, comme l’a soutenu le ministre de l’Intérieur (usant d’une formule habile mais inexacte), rejet définitif du débat. Le gouvernement a maintenant le choix entre laisser se poursuivre la navette ou bien convoquer une commission mixte paritaire. Composée de sept députés et de sept sénateurs et de centre de gravité plus à droite que celui de l’Assemblée (on l’a vu pour la loi sur les retraites), la CMP pourrait adopter un texte proche de celui du Sénat. D’autant que la CMP aurait le choix entre la page blanche des députés et le texte adopté par les sénateurs : difficile, dans ces conditions, d’inventer un texte de compromis ! Le texte de la CMP, proche donc de celui du Sénat, reviendrait alors devant les assemblées. L’exécutif disposerait, dans cette hypothèse, du pouvoir considérable que lui donne le troisième alinéa de l’article 45 de la Constitution. Cet alinéa dispose que, en cas de CMP conclusive, aucun amendement n’est recevable sauf accord du gouvernement. L’exécutif devrait alors prendre une position franche et ne plus se contenter, comme l’a fait le ministre de l’Intérieur jusqu’ici, de se féliciter des positions successives antagoniques des assemblées, tout en disant espérer le miracle de la convergence des contraires lors du débat en séance publique. Ce serait également une épreuve de vérité pour la majorité présidentielle, très partagée sur la politique migratoire. Toutefois, dans ce scénario, l’adoption d’une loi proche du texte du Sénat ne serait pas exclue. Le président de la République le mesure-t-il ? Entend-il intervenir pour favoriser une telle issue ? Pour l’empêcher ? Entend-il d’ailleurs intervenir ?
Autre scénario : face au risque d’enlisement ou de nouveau rejet global du texte, le vote de celui-ci est différé sine die par le gouvernement. Il n’y a pas de loi.
Une autre hypothèse encore est que la CMP ne soit pas conclusive ou que le gouvernement ne s’oppose pas aux amendements des députés frondeurs sur le texte de la CMP. L’Assemblée nationale retrouverait alors toute sa marge de manœuvre. Elle aurait le dernier mot et celui-ci irait probablement dans le sens de sa commission des lois. Au terme de cet accouchement traumatique, le ministre de l’Intérieur aurait une loi, mais ce serait une victoire à la Pyrrhus. D’abord parce que, loin d’être consensuelle comme il dit l’espérer, cette loi créerait un clivage gauche-droite qui compromettrait la macronie avec la Nupes sur un sujet régalien essentiel et lui aliénerait les LR pour le reste du quinquennat. Ensuite, parce que cette loi révélerait rapidement son incapacité à réduire les flux migratoires, contrairement aux promesses de fermeté faites par l’exécutif et aux vœux de la grande majorité de nos compatriotes. Ceux-ci se sentiraient floués. À l’horizon 2027, et eu égard à la gravité des problèmes dont l’actualité révèle la composante migratoire, ce serait un échec inexpiable pour nos dirigeants comme pour les élus du parti présidentiel. ■
les francais veulent une loi immigration qui défende leur sécurité et l’identité nationale !
un point ,, cest tout
cordialement