« Macron s’est trompé sur ce que l’on attendait d’un roi »….
Par Jean-Philippe Chauvin.
Soyons clairs : la Cinquième République, ce n’est pas la Monarchie et le président n’est pas le roi, comme l’a signalé avec justesse le philosophe Marcel Gauchet il y a quelques années :
« Mais [Macron] s’est trompé sur ce que l’on attendait d’un roi. Un roi, ce n’est pas un manager, pas un patron de start-up qui secoue ses employés pour qu’ils travaillent dix-huit heures par jour pour que les Français, par effet d’entraînement, deviennent tous milliardaires ! Dans la tradition française, un roi, c’est un arbitre. Quelqu’un qui est là pour contraindre les gouvernants à écouter les gouvernés. Quand les gens accusent Macron d’être le président des riches, ils lui reprochent surtout de ne pas être l’arbitre entre les riches et les pauvres. (1) »
En quelques lignes, le philosophe fait litière de la confusion savamment entretenue par certains doctrinaires d’une Gauche qui se veut républicaine façon Révolution française pour éviter de se pencher sur les limites de leur modèle idéologique, souvent plus idéalement fantasmé que réellement convaincant, au regard de l’histoire comme de la promesse du lendemain…
Dans le même temps, Marcel Gauchet peut nous permettre de préciser ce qu’il ébauche de la nature et de la forme de la Monarchie royale en France, qui ne peut être confondue avec la « monocratie » (2), qui est sans doute un terme plus exact pour définir la Cinquième République fondée par le général de Gaulle. Quand la monocratie est le pouvoir d’un seul sans contre-pouvoirs effectifs et efficaces, nous sommes bien loin d’une Monarchie royale à la française où le pouvoir central ne peut s’émanciper complètement des pouvoirs locaux (provinciaux et communaux) ou sociaux (socioprofessionnels, corporatifs et syndicaux, entre autres).
En Monarchie, le pouvoir royal « ordonne » l’ensemble, il n’intervient pas forcément dans le fonctionnement et les décisions des organes et des corps intermédiaires : il est, d’abord, un arbitre, et il laisse « jouer les ordres et libertés » selon le principe de subsidiarité, rappelé régulièrement par Maurras, reprenant la vieille formule héritée des légistes médiévaux, « Sous le Roi, les Républiques » : ce qu’il faut bien entendre ici, ce n’est pas un rapport de soumission des républiques locales, professionnelles ou universitaires à l’État central, mais le fait qu’elles se trouvent à l’abri de l’État royal, leurs libertés étant garanties par cet État qui les surplombe sans les plomber.
Tout l’inverse de cette République qui, en se disant aujourd’hui inclusive, se fait de plus en plus intrusive, au risque d’étouffer toute initiative libre ou non-conforme aux dogmes de l’idéologie dominante. ■
(1) : Marcel Gauchet (Entretien à Le Soir du 25 décembre 2018).
(2) : La monocratie, qui vient du grec monos (le seul) et kratein (l’emporter sur, dominer), c’est le pouvoir, la domination sans partage d’un seul, sans contre-pouvoirs (au contraire de la tradition monarchique française et de ses lois fondamentales) et sans légitimité autre que celle de Créon…
Source:
Jean-Philippe ChauvinRoyaliste français
« le principe de subsidiarité » ne fait-il pas partie de la doctrine sociale de l’Eglise »…fort peu connue, et c’est bien dommage.
.D’accord avec Jean-Philippe Chauvin
Excellent texte de JP Chauvin, même parler de « monarchie royale » m’agace un peu. Il a raison d’opposer monarchie et monocratie ; on pourrait ajouter qu’étymologiquement « archè » désigne le fondement, le principe d’un être, si bien que la monarchie correctement entendue, loin d’accaparer le pouvoir à son seul profit, est la clé de voute permettant aux autres pouvoirs de s’exprimer.
Excellent texte