COMMENTAIRE – Avons-nous quelque chose à dire ou rien – nous, royalistes, maurrassiens, Action Française – sur la nomination de Gabriel Attal à Matignon ? ? Toujours en proie à la tentation de se forger de nouvelles illusions et d’y plonger à pleins bords, la Droite conservatrice fait peine à voir quand elle s’active à de longs chants de louanges sur le mode : « Il est né le divin enfant« , comme l’écrit le chroniqueur Michael Sadounn au tout début de son papier que nous reprenons ici. (FigaroVox, 9 janvier). Même le brave Pascal Praud, sur CNews, se fait enguirlander par ses auditeurs puis par ses partenaires de plateau, pour son enthousiasme vaguement inepte, faussement naïf, presque indécent. De surcroit sans fondement. C’est notre première remarque. Elle pointe une certaine droite conservatrice, mais pas seulement. C’est non sans raison que Natacha Polony s’insurge : « Gabriel Attal à Matignon, ou comment Macron veut faire du vieux avec un jeune » et Marianne titre par ailleurs : « Nouvel ange Gabriel », « déjà une rupture » : « Attal devient Premier ministre… et la presse devient dingo« . Le discours gnian-gnian sur la jeunesse de l’impétrant (nouveau Fabius ! Ah ! oui !), son autorité, sa droitisation, ses qualités de communiquant, etc. etc… tout cela fait florès. On aurait pu attendre un peu, se dit-on…. Mais attendre quoi au juste ? Le Quotidien du Médecin, cité par Richard de Seze, voit plus clair pour son propre compte que les vieux routiers de l’analyse politique (Alain Duhamel, par exemple, toujours pontifiant) : Entre Touraine et Strauss-Khan, tout est dit du parcours intellectuel du bonhomme. On va pleurer… écrit Richard de Seze et de citer le Quotidien du Médecin : « À 34 ans seulement, l’ancien conseiller de la ministre de la Santé Marisol Touraine (2012-2017), apparatchik strauss-khanien puis macroniste de la première heure, déjà plusieurs fois ministre, est devenu le plus jeune locataire de Matignon de l’histoire de la cinquième République. » Rideau ! Revoilà l’invocation au jeunisme ! « Jadis, sous la Ve République » écrit, plus politique, Maxime Tandonnet, dans le même Figaro, pour mettre en garde contre l’attalomania en marche. La vérité est plutôt là : la Ve République est morte, comme les quatre autres. Elle offrait de belles promesses. Elles ont été avalées par le Système, comme De Gaulle disait. Un Système qui en deux siècles épuise une nation ne saurait être le bon, disait aussi Renan. Jadis ! comme l’écrit Tandonnet. Emmanuel Macron en aura été le le plus récent avatar. Peut-être Attal en sera-t-il la réincarnation suivante. Si le Pays est encore là – cela n’est plus assuré du tout – pour en faire son nouveau président marionnette. Il n’y a de possible voie de salut que hors du mortel Système. Les maurrassiens ont-ils autre chose à dire aux Français qui ne soit pas de purs mensonges ?
FIGAROVOX/TRIBUNE – Le nouveau chef du gouvernement reste pour l’heure un ministre sans bilan et sans ligne politique précise, estime le chroniqueur Michael Sadoun.
Une question se pose sur la ligne d’un ministre qui, fidèle à son mentor, ne se revendique plus de la droite ni de la gauche mais seulement d’Emmanuel Macron.
Il est né le divin enfant ! Après moult tergiversations qui ne captivent qu’un public restreint, Gabriel Attal devient donc le plus jeune premier ministre de la Ve République, battant le record quarantenaire de Laurent Fabius. Depuis 2017, aucun ministre n’avait suscité autant d’enthousiasme, aussi bien chez les CSP+ centristes qui lui perçoivent toutes les qualités du monde – jeune, diplômé et présentable – que chez un électorat de droite plus classique, qui se désespérait du mandat à la fois suffisant et insuffisant de Pap Ndiaye, et se réjouissait de la posture de fermeté prise par son successeur.
Dans ce concert d’apologistes, on n’ose émettre de nuances : rien n’est plus grand que les qualités d’un ministre qui arrive (excepté les défauts d’un ministre qui part). Et pourtant Gabriel Attal, malgré un accueil médiatique béat, reste un ministre sans bilan et sans ligne politique précise.
D’abord, sa nomination n’acte aucun revirement politique dans ce second quinquennat qui patine : Gabriel Attal vient comme Elisabeth Borne du PS, et il est proche de la « bande de Poitiers » qui a forgé la première victoire d’Emmanuel Macron en 2017. Autant dire que sa jeunesse n’est pas une fraîcheur, et que ce remplacement n’est ni une rupture ni un renouveau.
Ensuite, sa carrière éclair, si elle impressionne par sa fulgurance, ne lui a pas permis de mener de changements significatifs avant son accession à la rue de Grenelle. Gabriel Attal a sauté de ministère en ministère sans jamais avoir eu le temps d’y laisser une marque durable : brève initiation du Service national universel (alors brouillon et optionnel) sous la houlette de Jean-Michel Blanquer entre 2018 et 2020, porte-parolat habile mais par nature non-agissant entre 2020 et 2022. Puis une action discrète à Bercy comme ministre du budget – Gérald Darmanin y avait quant à lui brillé avec notamment une bonne réforme du prélèvement à la source –, poste qu’il ne brigue que 15 mois avant de devenir ministre de l’Éducation nationale en juillet dernier.
Son action au ministère de l’Éducation, qu’il occupait depuis seulement six mois, reste son principal fait d’armes. Il faut évidemment saluer des prises de position salutaires, toujours rapides, peu ambiguës et correspondant à l’aspiration populaire au rétablissement de l’autorité. L’interdiction de l’abaya en fut un premier signal dès la rentrée de septembre (court-circuitant d’ailleurs la rentrée politique de son rival Gérald Darmanin). Suite à cela, Attal annonce début décembre, dans la foulée de la publication du classement Pisa peu flatteur pour l’hexagone, une série de mesures constituant un «choc des savoirs» dans l’Éducation nationale : retour de la «méthode de Singapour» en mathématiques ou de la syllabique en lecture, manuels labellisés dans le premier degré, groupes de niveau au collège, brevet obligatoire avant le passage en seconde, réforme du redoublement, et même expérimentation de l’uniforme dans certains départements. Un programme qui s’approche même des propositions du Rassemblement national ou de Reconquête en 2022 – on autorise plus volontiers à tirer des constats pragmatiques celui qui, venant de la gauche, ne peut naturellement n’être que l’honneur de l’humanisme.
Mais à l’Éducation nationale aussi, son bilan concret reste maigre, et pour cause : s’il était nommé le « mammouth » par Claude Allègre, c’est que ce ministère – l’une des plus lourdes administrations au monde – avance lentement et que le plus dur n’est pas d’y exprimer une parole juste mais d’y faire infuser une action efficace. Sa nomination précoce lui coupe une fois de plus l’herbe sous le pied et laisse l’Éducation nationale orpheline d’un ministre qui semblait pour une fois prometteur.
Une question enfin se pose sur la ligne d’un ministre qui, fidèle à son mentor, ne se revendique plus de la droite ni de la gauche mais seulement d’Emmanuel Macron. En effet, Gabriel Attal vient de la gauche mais il court vers la droite pour suivre l’opinion majoritaire : c’est une équation gagnante dans la politique française. Tellement gagnante que sa nomination à Matignon est apparue comme une évidence au commentariat médiatique, qui voit déjà le jeune premier au palais de l’Élysée dès 2027.
Mais c’est oublier que Gabriel Attal vient quand même d’un terreau idéologique, et que sur les sujets non-attenants à l’éducation, son pragmatisme semble moins évident : très favorable à la fermeture des centrales nucléaires lorsque François de Rugy s’y appliquait, il a également pris ses distances avec Gérard Collomb, jugé trop virulent dans ses prises de paroles et dans son action contre les passeurs et l’immigration illégale.
Gabriel Attal semble simplement avoir compris les aspirations populaires, bien plus proches du gaullisme que de la social-démocratie. Satisfaire cette exigence dans l’Éducation nationale est assez consensuel : tout le monde, de la gauche «républicaine» à la droite de la droite, désirait la revalorisation des savoirs fondamentaux ou l’application d’une laïcité rigoureuse dans l’école. Mais assumer la même fermeté en matière de sécurité, de justice ou d’immigration demande un tout autre courage politique car ces thématiques sont des marqueurs forts. Sanctionner un élève qui ne respecte pas la minute de silence pour Samuel Paty ne représente pas le même risque politique et social que réformer le droit du sol ou le regroupement familial. Les déboires de la récente loi sur l’immigration l’ont prouvé avec fracas.
On souhaite donc bien du courage à Gabriel Attal pour trouver sur tous les domaines de l’action publique le même savant mélange de fermeté et d’habileté qu’il avait trouvé dans son ancienne fonction. Mais n’oublions pas que, tout comme Elisabeth Borne, Gabriel Attal aura du mal à construire une majorité fixe dans un parlement bloqué et que même dans cette éventualité, Emmanuel Macron reste seul décisionnaire jusqu’en 2027. ■
Cette république est agonisante tout simplement.Un pseudo premier ministre aussi jeune ,sans aucune expérience de la vraie vie, c’est pathétique. On m’a toujours dit qu’avant d’être capitaine, il fallait être matelot. Je crois que nous avons pas fini de rire.
Gabriel Attal, un premier ministre aux racines orthodoxes
La Croix, 10 janvier 2024
Le plus jeune premier ministre de la Ve République, Gabriel Attal, est le fils d’un juif non pratiquant et d’une mère russe orthodoxe. Bien qu’il ne se dise aujourd’hui « pas étranger à la question de la transcendance » , il se considère comme non croyant.
Quel est l’itinéraire religieux du nouveau premier ministre âgé de seulement 34 ans ? Né d’une mère orthodoxe issue d’une noble lignée de Russes blancs, et d’un père juif non pratiquant, Gabriel Attal a été baptisé dans l’église orthodoxe russe de la rue Daru dans le 8e arrondissement de Paris.
L’article complet :
https://www.la-croix.com/religion/gabriel-attal-un-premier-ministre-aux-racines-orthodoxes-20240110