1761 : Naissance de Jean-Charles Pichegru
Napoléon a dit de lui : « Comme Général, Pichegru était un homme d’un talent peu ordinaire ».
De fait, dans l’imagerie populaire, il restera avant tout comme celui qui a réalisé une opération proprement inimaginable : capturer une flotte entière, par une charge de cavalerie ! Il faut dire que la flotte en question était prise dans les glaces, la plupart des canons pointés en hauteur, les bateaux ayant été figés de biais, les canons vers le haut, et ne pouvant donc pas tirer sur leurs assaillants.
Il n’empêche, la chose reste unique dans les annales : impossible n’est vraiment pas français !
Gravure reprise de notre album Le dernier livre de Jacques Bainville
Mais Pichegru représente aussi autre chose : dans cette période où, en réalité, rien n’était écrit d’avance (le fameux sens de l’Histoire, dont on nous aura tant rebattu les oreilles, n’existe pas…), Pichegru montre bien comment tout aurait pu être différent, et comment un très grand nombre de protagonistes de la Révolution auraient très bien pu changer de camp : Danton lui-même n’a jamais fait mystère du fait que, s’il ne servait pas la Cour et Louis XVI c’est, tout simplement, parce que celui-ci ne lui offrait pas assez d’argent.
Quoi qu’il en soit, valeureux soldat et très brillant général, Pichegru, comme tant d’autres, aurait pu… Avec lui, ou avec d’autres, les choses auraient pu prendre une autre tournure.
Il ne s’agit pas de cultiver de vains regrets mais, tout simplement, de le savoir, et de ne pas être dupe des boniments et des images d’Epinal d’une histoire officielle prétendant que la Révolution – du moins dans les formes qu’elle a prises… – était inéluctable, et inscrite dans l’ordre naturel et obligatoire des choses.
De l’Encyclopedia universalis :
« Fils d’un cultivateur du pays d’Arbois, Pichegru parvient très jeune à devenir répétiteur de mathématiques à Brienne ; il s’engage comme soldat en 1780 (contrairement à la légende, Napoléon n’aura donc guère eu le temps de profiter de ses connaissances mathématiques) et fait la guerre d’Amérique. Sergent-major en 1789, il milite avec ardeur au club des Jacobins de Besançon et devient lieutenant-colonel d’un bataillon de volontaires. La rapidité de ses promotions est alors foudroyante ; en octobre 1793, il commande en chef l’armée du Rhin. Il est subordonné à Hoche (ce qu’il supporte mal) pour la délivrance de l’Alsace; au printemps de 1794, soutenu par la faveur de Saint-Just, il commande l’armée du Nord, conjugue ses actions avec Jourdan pour achever la conquête de la Belgique et, en janvier 1795, s’empare de toute la Hollande. Pichegru apparaît alors comme l’un des plus glorieux et des plus sûrs entre les chefs « sans-culottes » des armées de la République.
De passage à Paris en avril 1795, il reçoit pleins pouvoirs de la Convention pour mater l’insurrection populaire de germinal an III. Est-ce alors que, premier général révolutionnaire appelé à trancher de l’épée les nœuds de la politique, il entrevoit à son ambition de nouvelles perspectives ? À peine nommé au commandement de l’armée nouvellement créée de Rhin-et-Moselle, il accepte d’avoir une série d’entrevues avec un agent du futur Louis XVIII et du prince de Condé ; il s’engage par écrit à mettre sous quelque délai son armée au service de la royauté, moyennant énormément d’argent, le bâton de maréchal, le gouvernement de l’Alsace et la propriété de Chambord. C’est dans de telles vues qu’il entame fort mollement sa campagne d’été de 1795, laisse battre Jourdan sans le secourir et se replie. Se sentant suspecté, il offre sa démission, qui est acceptée contre son attente en mars 1796; ici prend fin une carrière militaire qui promettait mieux.
Député, et aussitôt président des Cinq-Cents (avril 1797), Pichegru se pose alors ouvertement en leader de la droite et prépare secrètement un coup d’État royaliste ; Barras (ci-contre) le paralyse en le menaçant de publier une note sur sa trahison, remise par d’Antraigues à Bonaparte en juin; arrêté le 18-Fructidor, Pichegru est déporté en Guyane, s’évade et se réfugie à Londres.
Il n’abandonne pas la partie; lié à l’élaboration du complot de Cadoudal (ci contre), il débarque clandestinement à Biville en janvier 1804, vient à Paris, met en rapport avec Cadoudal son vieil ami (et déjà complice ?) Moreau, mais est arrêté. Le 6 avril au matin, il est trouvé étranglé dans sa prison… »
1785 : Expérience de Lavoisier, qui décompose l’eau en oxygène et hydrogène
L’eau est transformée en vapeur par l’immersion d’un fer chauffé au rouge, et cette vapeur est décomposée dans un canon à fusil chauffé à blanc. Il apparaît à sa sortie de l’ « air inflammable » (hydrogène); l’ « air vital » (oxygène) s’est fixé dans le fer.
Lavoisier avait déjà réalisé une première synthèse de l’eau, le 24 juin 1783.
Souvent considéré comme le père de la Chimie moderne, Louis Pasteur a dit de lui qu’il était le législateur de la chimie.
historyofscience – Comite-Lavoisier
Cette gloire ne devait pourtant pas le protéger: le 24 novembre 1793, la Convention lance un décret d’arrestation contre les fermiers généraux. Le 8 mai 1794, le Tribunal révolutionnaire juge trente-deux fermiers généraux : vingt-huit d’entre eux sont condamnés à la guillotine et exécutés le jour même; tous leurs biens sont confisqués: Lavoisier est le quatrième.
Ayant demandé un sursis pour pouvoir achever une expérience, il s’entend répondre par Jean-Baptiste Coffinhal, le président du tribunal révolutionnaire : « La République n’a pas besoin de savants ni de chimistes ; le cours de la justice ne peut être suspendu. »
Au lendemain de sa mort , son collègue Joseph Louis Lagrange (1736-1813) commente :
« Il ne leur a fallu qu’un moment pour faire tomber cette tête, et cent années, peut-être, ne suffiront pas pour en reproduire une semblable. «
1786 : Naissance de François Arago
Dominique François Arago, astronome, physicien et homme d’État français, né le 26 février 1786 à Estagel et mort le 2 octobre 1853 à Paris
expositions.obspm – F.Arago
1855 : Naissance de la météorologie
Le 14 novembre 1854, une tempête coule trois vaisseaux et trente-huit cargos franco-anglais au large de Sébastopol.
A Paris, le Ministère de la guerre crée une commission d’étude, dirigée par l’astronome Le Verrier, qui conclut que des observations systématiques auraient permis de prévoir, donc d’éviter, cette catastrophe.
A la suite de ce rapport, Napoléon III ordonne, le 16 février 1855, la création d’un vaste réseau météorologique, afin de prévoir le temps.
Urbain Le Verrier, peint par Daverdoing en 1846.
C’est lui qui découvrit, par un « simple » calcul, la planète Neptune (éphéméride du 23 septembre)
meteofrance/decouvrir-la-meteorologie/notre-histoire
1892 : Léon XIII prône le Ralliement dans son encyclique « Inter innumeras sollicitudines ».
Le souhait de Léon XIII n’était évidemment pas de se rallier lui-même à « la République« , ni de pousser les catholiques français à se rallier aux idéaux révolutionnaires en tant que tels. Il s’agissait simplement, dans l’esprit du pape, après l’échec de la restauration monarchique en France, et alors que la jeune république se montrait très agressive envers le catholicisme, de renoncer à une opposition systématique au régime en place, et même d’accepter la Constitution pour combattre « par tous les moyens honnêtes et légaux » les lois anti-chrétiennes, en permettant aux catholiques de peser de tout leur poids sur les nouvelles institutions.
Le pape – ingénument – pensait que, les catholiques étant majoritaires en France, cela suffirait à leur faire gagner les élections, et donc à diriger ou – si l’on peut dire – cornaquer les gouvernements :
« Accepter la constitution, fait accompli, mais pas la législation, fait réformable, et pour cela, par les élections sous étiquette républicaine, s’insérer dans le régime républicain et y faire de bonnes lois. » disait le pape.
Trois mois après l’encyclique, le Pape s’adressait aux cardinaux français : « Acceptez la République, c’est-à-dire le pouvoir constitué… respectez-le, soyez-lui soumis, comme représentant le pouvoir venu de Dieu… Inutile de rappeler que tous les individus sont tenus d’accepter ces gouvernements et de ne rien tenter pour les renverser ou pour en changer la forme. »
S’adressant au Baron de Montagnac, qui refusait le Ralliement, Léon XIII s’exclama : « Faites-vous républicain d’une bonne république. Vous comprenez ? Je veux que tous les catholiques entrent, comme une cohue dans la République… Les traditions doivent céder pour un moment… vous les retrouverez après l’œuvre accomplie… il faut abandonner les traditions pour le moment, un petit moment seulement. »
Le pape avait « simplement » oublié les paroles de Saint Cyprien, au IIIème siècle : « Il existe un mal pire et plus meurtrier que la persécution, c’est l’empoisonnement perfide de la mentalité. »
Sa vision, purement théorique, était une grave erreur au plan des principes, comme au plan de la tactique : descendre sur le terrain de l’adversaire en utilisant sa doctrine et ses pratiques, cela relevait d’un angélisme profond, qui, pour être sincère, n’en témoignait pas moins d’une incompréhension fondamentale de ce qu’était la république idéologique française, fondée sur les dogmes de la Révolution : cette république, cette Révolution, ces dogmes étaient – et restent – une nouvelle religion, dont le but premier et essentiel est de remplacer l’autre, la chrétienne, la traditionnelle, et de la détruire, par tous les moyens; en détruisant également toutes les racines historiques et culturelles d’un pays millénaire, l’expression « l’an 1 de la République » étant – à cet égard – parfaitement révélatrice de cette nouvelle France, de cette nouvelle société que la république idéologique – comme l’a si justement dit Jules Ferry – voulait bâtir « sans roi et sans dieu ».
Méconnaître cette haine destructrice et cette volonté farouche d’effacer tout ce qui a fait une Nation pendant mille ans – y compris et surtout ses racines chrétiennes – témoignait d’une incompréhension politique dramatique à ce niveau. La rupture avec un siècle d’opposition aux thèses révolutionnaires était brutale, et l’Eglise renonçait à combattre son ennemi mortel : le Ralliement fut à la fois un stupéfiant marché de dupes – comme les choses devaient très vite le montrer – et une non moins stupéfiante capitulation idéologique en rase campagne..
Le cardinal français Pitra, qui s’opposait fermement à cette rupture dans la politique vaticane, se vit réprimander par Léon XIII lors d’une audience très pénible de trois quarts d’heure, durant laquelle, debout et tête nue, il reçut les plus aigres reproches d’un Léon XIII en l’occurrence fort peu compréhensif. Le cardinal accepta, par obéissance, de ne plus s’opposer au pape, et se retira dans une abbaye, où il mourut en 1889, soit trois ans avant la publication de l’encyclique : il se contenta de déclarer « Hora est potestas tenebrarum », reprenant les paroles du Christ à ceux qui venaient l’arrêter (citées par Luc – 22) : « Haec est hora vestra et potestas tenebrarum » (« C’est ici votre heure et la puissance des ténèbres »).
Le Ralliement fut peu suivi par les catholiques français, à de rares exceptions près, notamment celle de ce grand royaliste social que fut le comte Albert de Mun – qui ne tarda pas à le regretter amèrement. Mais, comme le note Michel Mourre », « se heurtant à la majorité des catholiques et du clergé français… c’est cependant dans la ligne du ralliement que put commencer à se développer, au début du XXème siècle, le mouvement de démocratie chrétienne. »
Et, surtout, 34 ans après, les sanctions vaticanes contre l’Action française orientèrent définitivement la structure et la mentalité même de l’Eglise-institution, en la vassalisant au pouvoir républicain, qu’elle reconnaissait, de fait, comme la norme suprême, le cadre obligé dans lequel toute organisation – y compris elle-même, l’Eglise – devait agir; mais à la condition de reconnaître les lois et règles de la république idéologique comme la loi et la norme supérieure, s’imposant à tous. Et bien sûr, a fortiori, en s’interdisant de les combattre en tant que tels.
C’est à ce marché de dupe, à cette capitulation en rase campagne qu’il faut sans cesse revenir; et à partir desquels on peut marquer, dater l’origine profonde et essentielle des destructions méthodiques et continues de tout ce qui faisait l’essence même de la société française.
Quatre éphémérides traitent des rapports entre l’Eglise et la République idéologique française, en général, et des rapports entre l’Eglise et l’Action française en particulier :
• pour les rapports entre l’Eglise et la République idéologique française, en plus de celle-ci sur le « Ralliement », voir l’éphéméride du18 novembre – sur le « toast d’Alger », qui préparait les esprits à ce « ralliement »;
• pour les rapports entre l’Eglise et l’Action française, l’éphéméride du 29 décembre, sur les sanctions vaticanes contre l’Action française, et l’éphéméride du 10 juillet, sur la levée de ces sanctions par Pie XII.
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Que l’histoire n’ait pas de sens,cela paraît une évidence indiscutable.Cela nous conduirait à un déterminisme destructeur au pire,ou à la prédestination chère à Calvin,réductrice des capacités humaines au mieux.Ce sont les hommes qui font ou défont l’histoire en fonction de leurs qualités ou de leurs défauts,de leurs vertus ou ce leurs vices,de leurs aspirations ou de leurs besoins.
Par contre les religions ont un rôle déterminant dans la formation et l’orientation de l’histoire,en particulier par les passions qu’elles peuvent susciter.Quand quelqu’un se prétend agnostique,je me demande toujours à quoi il croit tout de même,sans vouloir l’admettre.
En revanche,je ne suis pas sûr qu’il faille tresser trop de lauriers à Pichegru.C’était une tête dure et bien faite du Jura aux talents et à l’expérience militaires incomparables.Sa victoire de Texel aux Pays-Bas,avec quelques régiments de cavalerie contre toute la flotte hollandaise prise par les glaces
fut admirée par le monde entier,et livra tout ce pays à la France,d’un coup.
Mais l’ambition fut le trait dominant de son caractère et l’amena à manger à tous les râteliers.Ancien Conventionnel, devenu jacobin,après avoir été girondin et maçon,les excès sectaires et sangunaires de Thermidor l’effrayèrent suffisamment pour qu’il se rapprochât de l’habile Louis XVIII qui dut,je pense,lui promettre monts et merveilles.Cela ne l’empêcha pas de devenir ensuite Président du Conseil des 500,tout en complotant avec Cadoudal,ce qui le conduisit en prison.Sa mort par strangulation au Temple reste un mystère : la police impériale la transforma en suicide,alors que tout porte à croire qu »il fut assassiné sur ordre du futur empereur (l’Empire naissait un mois et demi après), qui voyait en lui un concurrent au service des Bourbons.(Alors même que quelques jours avant la mort de Pichegru,le futur Napoléon commettait l’ignominie de faire enlever à l’étranger-en Allemagne- par le général de Caulaincourt le duc d’Enghein-un Bourbon-Condé-,le faisait juger sommairement et exécuter dans les fossés du château de Vincennes au bout de trois jours).
on écrit souvent qu’Albert de Mun
regretta son « ralliement »,
un internaute peut-il donner des références à ce sujet?
Merci