1609 : Mort de François Miron
Fils de magistrat, François Miron eut une belle carrière : d’abord Maître des requêtes, il devint Lieutenant civil (c’est-à-dire responsable de la sécurité à Paris) et, enfin, Prévôt des marchands.
Il édicta des règlements contraignants pour améliorer la salubrité de la capitale, aménagea des fontaines, pava les bords de la Seine, réglementa l’apparence des façades et l’alignement des rues ; il interdit en particulier les façades en saillie, dont les encorbellements risquaient de s’effondrer.
Mais quand le roi décida d’aménager la place Dauphine (ci-dessous) et d’en réserver les habitations à des bourgeois et des commerçants, à l’exclusion des artisans, Miron écrivit une lettre à Henri IV pour l’en dissuader. Faisant preuve de beaucoup de sagesse, et d’un intuition fort politique, il parla sans détour au roi, avec une franchise qui l’honore :
« Cher Syre, permettez que je me retire ; en jurant fidélité au Roy, j’ai promis de soustenir la royauté ; or Votre Majesté me commande un acte pernicieux à la royauté… Je refuse; je le répète à mon cher maistre et Souverain bien-aimé : c’est une malheureuse idée de bâtir des quartiers à l’usage exclusif d’artisans et d’ouvriers. Dans une capitale ou se trouve le Souverain, il ne faut pas que les petits soyent d’un côté et les gros et dodus de l’autre, c’est beaucoup et plus sûrement mélangés ; vos quartiers pôvres deviendraient des citadelles qui bloqueraient vos quartiers riches. Or comme le Louvre est la partye belle, il pourroit se fait que les balles vinssent ricocher sur votre couronne… Je ne veulx pas syre estre le complice de cette mesure… »
Mélanger les « dodus » et les « menus », éviter de créer des ghettos, et leur préférer le brassage des populations : c’était assurément un sage conseil que Miron donnait là à son « cher » souverain.
Celui-ci avait bien de la chance d’avoir de tels serviteurs, qui n’hésitaient pas à parler franc, pratiquant ainsi – avant même que Boileau ne l’exprimât – son sage précepte : « Aimez qu’on vous conseille, et non pas qu’on vous loue. »
Dans une autre lettre à Henri IV, datée du 24 mai 1605, et relative à l’aménagement de la toute nouvelle Place royale (aujourd’hui, Place des Vosges), François Miron, toujours sincère, expliqua au roi ce que devait être, selon lui, le développement de Paris :
« Syre, la capitale de votre empire ne doit pas être une ville de commerce, encore moins d’industrie et flanquée de manufactures… Si vous attirez à Paris, par vos fabriques, un essaim trop prodigieux d’artisans et d’ouvriers, vous vous condamnez à leur bailler toujours de l’ouvrage; si vous n’en pouvez mais, dans vos caques si l’argent manque, gare à la sédition ! Votre trône est sur un tonnelet de poudre ! Protégez l’industrie, soutenez, encouragez, fortifiez le commerce, mais que ce soit dans vos villes de province : à Lyon, la soie; dans la Picardie, les étoffes de laine; à chaque province, à chaque ville, chose spéciale selon son goût et ses aptitudes. A Paris, faites du luxe, c’est-à-dire de beaux et superbes bâtiments pour amorcer vos voisins qui apporteront leur pécule; ranimez les arts comme peinture qui parle à l’âme et musique au coeur. Que votre noblesse, dangereuse dans les châteaux, loin de l’oeil royal, c’est-à-dire du maître, vienne dans Paris. Le soleil aura ses rayons ! Sans cela, Syre, que Dieu garde vos successeurs de malencontre. Si le populaire de vos provinces se jette sur Paris, comme sur une proie, ils dévoreront tout, oui, tout jusqu’à la royauté ; j’ai dit. François Miron »
1629 : Début de la construction du Palais Cardinal, futur Palais Royal
C’est le cardinal de Richelieu qui commanda à son architecte, Jacques Lemercier (éphéméride du 13 janvier), l’hôtel splendide qui porta, d’abord, son nom : le Palais Cardinal.
Pierre Corneille a vanté la beauté de l’édifice en termes élogieux :
« Non, l’univers entier ne peut rien voir d’égal
Aux superbes dehors du Palais-Cardinal.
Toute une ville entière, avec pompe bâtie,
Semble d’un vieux fossé par miracle sortie,
Et nous fait présumer, à ses superbes toits,
Que tous ses habitants sont des dieux ou des rois. »
paris1900.lartnouveau.com/paris01/le_palais_royal
Richelieu devait, très vite, offrir son palais à Louis XIII (par une donation entre-vifs, le 6 juin 1636), mais le roi – qui mourut peu de temps après son ministre, en 1643 – n’habita jamais le Palais-Cardinal. Anne d’Autriche, sa veuve, quitta le Louvre en octobre 1643, avec ses deux fils, Louis XIV et son frère Philippe, encore enfants, et vint demeurer dans le Palis, qui prit alors le nom de Palais-Royal.
La régente ordonna de nombreux embellissements dans le palais, dont une galerie, placée à l’endroit le plus retiré : c’est là que se tenait le Grand conseil se tenait.
En 1652, Louis XIV abandonna la résidence du Palais-Royal pour aller habiter le Louvre. On avait, entre-temps, construit un appartement dans le palais pour son frère, appelé, selon l’usage d’alors, Monsieur.
Monsieur épousa Henriette d’Angleterre dans la chapelle du Palais-Royal, le 31 mars 1661, et conserva, dès lors, ce palais pour résidence habituelle. Cet usage fut confirmé en février 1692 par Louis XIV, qui donna par lettres-patentes la propriété du Palais-Royal au duc d’Orléans, son frère, à titre d’apanage.
Jules Hardouin-Mansart, premier architecte de Louis XIV et surintendant des bâtiments du roi, éleva ensuite une galerie – décorée par Charles-Antoine Coypel – puis Philippe d’Orléans, son fils, fit exécuter de grands travaux. Il choisit Gilles-Marie Oppenord (1672-1742), qui passait pour le plus habile architecte de son temps, et lui confia le grand salon qui servait d’entrée à la vaste galerie construite par Mansart.
Très grand rectangle de paix et de beauté en plein cœur de Paris, les jardins du Palais royal
Durant la Révolution, le Palais royal fut malheureusement l’un des endroits d’où partaient les attaques contre Louis XVI et la monarchie : le duc d’Orléans de l’époque – qui se fit appeler Philippe-Egalité – haïssait son cousin, et ne songeait qu’à le remplacer. Il aurait dû méditer l’adage selon lequel la révolution mange toujours les révolutionnaires : lui qui joua les apprentis sorciers, et tint un rôle si indigne durant cette époque, paya de sa vie son comportement.
La Révolution effaça autant qu’elle le put les traces de la royauté dans le Palais royal : dans notre album Fleur de lys, fleurs de lys., voir la photo « Au Palais royal (I) : avant… » et les deux suivantes.
Ensuite, au XIXe siècle, l’endroit devint un lieu à la fois raffiné et interlope : Balzac et d’autres romanciers en ont fait leurs délices.
Aujourd’hui, la paix est revenue dans ce havre de tranquillité et de beauté, hélas défiguré par les colonnes de Buren et autres soi-disant œuvres d’art de prétendus artistes qui n’existeraient pas si leurs prétendues ouvres d’art – payées à grands frais par el contribuable – étaient présentées – et donc inconnues – ailleurs qu’en un lieu si beau.
1666 : Première du Misanthrope, ou l’Atrabilaire amoureux
La pièce est jouée au Théâtre du Palais-Royal à Paris.
Cette seizième pièce de Molière, pourtant l’une de ses meilleures comédies, n’a que peu de succès à ses débuts.
L’auteur interprète lui-même le rôle d’Alceste qui, avec sa franchise brutale et son mépris des conventions, représente le véritable homme libre dans une société hypocrite.
• « …Je veux qu’on soit sincère et qu’en homme d’honneur
On ne lâche aucun mot qui ne parte du cœur ».
• « …Je refuse d’un cœur la vaste complaisance
Qui ne fait de mérite aucune différence ;
Je veux qu’on me distingue; et pour le trancher net,
L’ami du genre humain n’est point du tout mon fait. »
• « …Je veux que l’on soit homme et qu’en toute rencontre
Le fond de notre cœur dans discours se montre. »
(Acte I, Scène I)
1721 : Après la grande peste, le « Vœu des Échevins de Marseille »
C’est aujourd’hui la Chambre de Commerce qui a pris le relais de la Municipalité, et qui offre chaque année, le 4 juin, un cierge de cire blanche, aux armes de la Ville de Marseille (Croix bleue sur fond blanc). A l’origine, le cierge devait peser « quatre livres », soit quasiment deux kilos.
Un peu d’histoire :
Marseille voeu des Echevins.pdf
1783 : Premier vol de montgolfière
A Annonay (Ardèche), près de leur papeterie, les frères Montgolfier réussissent pour la première fois à faire voler un objet fabriqué par l’homme.
Le ballon de toile et de papier, gonflé avec de l’air chaud produit par la combustion d’un mélange de paille et de laine, s’élève à près de 1 000 mètres et parcourt 2 kilomètres en 10 minutes.
Le premier voyage habité en montgolfière aura lieu le 21 novembre 1783 dans le parc du château de la Muette à Paris.
1814 : Louis XVIII établit la Charte constitutionnelle
« Octroyée« , et ce « lors de la dix-neuvième année de son règne« , elle garantit la liberté de la presse, le respect des biens nationaux, l’égalité devant la loi.
Elle représente un effort pragmatique pour s’accommoder de la révolution-fait et, selon le mot de Chateaubriand, pour « préparer notre entrée dans l’ère nouvelle, en gardant ce qui valait de l’être de la Révolution et de l’Empire. Avoir un roi qui règne, des ministres qui gouvernent et sont responsables devant les deux chambres de la représentation. » On verra ce que deviendra cette entrée dans l’ère nouvelle dont se réjouit ici Chateaubriand, grand littérateur, médiocre politique, comme Maurras et Bainville l’ont souligné.
D’Anne Bernet :
« (À son retour) Louis XVIII est confronté à un quadruple problème :
• négocier au plus vite la paix, dans les conditions les moins désavantageuses, et le retrait de coalisés;
• doter la France d’une constitution;
• éviter la banqueroute des finances publiques et faire voter les budgets 1814 et 1815;
• enfin, réconcilier les Français.
Le 30 mai, la Traité de Paris concède à la France ses frontières de 1792, donc les annexions révolutionnaires du Comtat Venaissin, Montbéliard, Annecy, Chambéry, avec leur demi-million d’habitants. Les conquêtes impériale sont d’ores et déjà perdues et le Roi, en acceptant, ne fait qu’entériner l’irrémédiable. En revanche, il refuse absolument de verser des dommages de guerre ou de rembourser les dettes de l’Empire vis-à-vis des puissances étrangères… »
Voici deux passages de Jacques Bainville, tirés de l’Histoire de France, chapitre XVIII, La Restauration.
I. Premier passage, qui explique bien les écueils intérieurs
« …Louis XVIII n’ignorait pas les écueils qui entoureraient la monarchie, restaurée après une si longue interruption.
Sur le moment, tout était facile. Les Bourbons n’avaient pas eu à s’offrir : on les demandait. La France était lasse de la guerre, lasse aussi de ce qu’on appelait le despotisme impérial. Louis XVIII, qui avait de l’expérience, de l’étude, de la finesse, qui avait vu beaucoup de choses, se rendit compte des circonstances dans lesquelles il rentrait. Il avait à ménager son autorité et il n’eût pas été prudent de commencer son règne en humiliant le principe dont il tirait sa force. Il avait aussi des satisfactions à donner aux idées du temps. Le Sénat, en l’appelant au trône, avait établi des conditions, fixé des garanties pour les personnes et pour les biens, tracé un programme de gouvernement constitutionnel.
Sauf un point, Louis XVIII accepta tout. Deux Chambres, comme en Angleterre, c’était le système qui semblait le meilleur et même le plus commode pour une monarchie. L’égalité civile n’avait rien non plus pour déplaire à un roi de France; le frère de Louis XVI savait combien la résistance des privilégiés, en arrêtant les réformes, avait été funeste à l’ancien régime. La garantie des propriétés, des rentes, des pensions allait de soi : pour régner sur la France, il fallait la prendre telle qu’elle était.
Il n’y eut qu’une chose que Louis XVIII n’accepta pas : c’était le caractère conditionnel de cette Constitution. D’une Charte imposée, qui l’eût diminué, qui eût soumis son pouvoir à toutes sortes d’exigences et de capitulations successives, comme il était arrivé à Louis XVI, il fit une Charte accordée, « octroyée ». Ainsi le principe monarchique était sauf, ou bien ce n’était pas la peine de restaurer la monarchie, et la transition était assurée entre la monarchie « absolue » et la monarchie « constitutionnelle ». Louis XVIII y gagnait de s’être fait respecter des nouveaux constituants comme il se faisait respecter des souverains ennemis. « On aurait dit, remarquait Alexandre, que c’était lui qui venait de me replacer sur le trône… »
II. Deuxième passage, qui replace bien la difficile position de Louis XVIII, à l’extérieur cette fois
« …La monarchie avec la Charte était donc la combinaison la plus favorable, la plus naturelle aussi que l’on pût trouver. Elle conciliait le passé et le présent, l’ordre et la liberté.
Mais, avant tout, sans les Bourbons, la France était vouée, comme le disait Talleyrand, à l’asservissement ou au partage. L’étranger vainqueur était sur notre sol, il restait à conclure la paix et ce n’était pas le moins difficile.
La monarchie était bien innocente du désastre. Ce qui avait porté le dernier coup à, Louis XVI, c’était son opposition à la guerre de 1792, la guerre qui venait seulement de se terminer par l’entrée des Alliés à Paris. La monarchie avait pour tâche de liquider cette longue aventure.
On s’aperçut alors que les Alliés n’avaient combattu ni la Révolution ni Napoléon, mais la France. La paix qu’ils firent était à peine moins dure que celle qu’ils auraient imposée vingt ans plus tôt à la République s’ils avaient été vainqueurs.
Il leur était indifférent que leurs exigences fussent nuisibles à la popularité des Bourbons, rendus responsables d’une situation qu’ils n’avaient pas créée… »
Dans notre album Maîtres et témoins (II) : Jacques Bainville. voir la photo « Le peuple, jamais plus heureux que de 1816 à 1830 »
Sur ce roi en un sens exceptionnel que fut louis XVIII,voir :
• notre éphéméride du 16 septembre (jour de sa mort) ;
• du 4 juin (Louis XVIII établit la Charte constitutionnelle) et du 8 juillet (retour définitif du roi à Paris) ;
• du 20 février et du 26 février sur l’échange de lettres entre le Roi et Napoléon ;
• du 21 novembre (jour où les troupes Alliées quittent définitivement la France : concrètement, jour de notre libération nationale.)
1916 : « Le Vaillant », pigeon voyageur, remplit sa mission, malgré les gaz asphyxiants
Eh, oui ! Des animaux, aussi, peuvent servir la Patrie : les chiens décorés – et pensionnés, jusqu’à leur mort… – sont les plus connus, et ne se comptent plus.
Les pigeons voyageurs sont peut-être moins connus : profitons donc de ce 4 juin pour rappeler l’aide immense qu’ils ont apportée à l’armée française, dans son héroïque Grande Guerre, et particulièrement l’action de « Le Vaillant », ce pigeon voyageur qui reçut le Diplôme de Bague d’honneur, puis la Croix de Guerre en 1916, avec cette citation :
« Malgré les difficultés énormes résultant d’une intense fumée et d’une émission abondante de gaz, a accompli la mission dont l’avait chargé le commandant Raynal.
Unique moyen de communication de l’héroïque défenseur du Fort de Vaux, a transmis les derniers renseignements qui aient été reçus de cet officier fortement intoxiqué, est arrivé mourant au colombier « .
Cette éphéméride vous a plu ? En cliquant simplement sur le lien suivant, vous pourrez consulter, en permanence :