Par Gabrielle Cluzel.
Cet article est paru ce matin du juillet dans Boulevard Voltaire. Nous ne le commenterons pas ayant écrit en titre ce que nous en pensons.
Halte au sketch, aux congratulations, à la gloriole bruyante. Car ce tapage triomphant n’est qu’un grossier trompe l’œil. Tout est affaire de récit. Jean-Luc Mélenchon, peu après 20 heures et la publication des résultats signant l’arrivée en tête Nouveau Front populaire prend la parole. Il se réjouit bruyamment de la défaite du Rassemblement national, qui à l’écouter aurait été balayé. Mais la réalité est tout autre : si l’on en croit les estimations à l’heure où j’écris ces lignes, son parti La France Insoumise, stagne, tandis que le Rassemblement national voit son nombre de députés presque multiplié par deux. En nombre absolu, le Rassemblement, national a rassemblé près de neuf millions de voix, contre 7 millions pour le NFP et un peu plus de 6 millions pour Ensemble. L’apparent succès du Nouveau Front populaire n’est lié qu’à une entourloupe arithmétique, comme un bilan d’entreprise au bord de la faillite qui maquille son bilan en additionnant adroitement des lignes comptables. Et cette entourloupe va permettre à la gauche de diriger un pays ayant voté à droite.
Évidemment, le résultat du RN n’est pas celui annoncé, loin s’en faut. Bien sûr, le barrage, même usé et essoufflé, a une fois de plus fonctionné. Naturellement, le gouvernement de coalition qui s’annonce à de quoi inquiéter, sur tous les plans : celui de l’immigration, de la sécurité, de la justice, de l’économie, du sociétal… Sans parler des élus plus que douteux : un fiché S – en la personne de Raphaël Arnault, député à Avignon, la ville où a été tué le policier Éric Masson, quel symbole ! – fait son entrée à l’Assemblée nationale. Mais ouf grâce aux front républicain, la danger RN est écarté. Quel soulagement, la France peut dormir tranquille, n’est-ce pas ?
Sauf que s’il y a une dynamique, elle est du côté du RN. Et ces désistements bricolés ne peuvent effacer le motif même de ces élections législatives : le résultat des Européennes.
Parmi tous les commentaires entendus sur les plateaux de télévision ce dimanche soir, ceux de l’ancien ministre de la Défense et centriste Hervé Morin sont sans doute les plus sages car les plus humbles et les plus inquiets : que l’on puisse refermer tranquillement le couvercle sur la cocotte-minute des Européennes et du premier tour des législatives, bien ligotée avec la vieille grosse ficelle du cordon sanitaire, en s’imaginant que le contenu va se volatiliser est une folie. Il va au contraire macérer, montrer en pression. Jusqu’aux prochaines élections. Les Présidentielles.
En attendant, place de la République les émeutes ont commencé. Quand l’extrême-gauche perd, elle casse tout. Quand elle gagne, elle casse tout aussi. ■ GABRIELLE CLUZEL